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Le FMI appelle aux armes

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Une nouvelle fois, Business, le supplément du Telegraph britannique, formate une une qu’il est intéressant de décrypter.

 

Une infographie partie prenante de la une

D’abord par son titre sur « cinq colonnes à la une ».

Le FMI en « appelle aux armes » pour protéger l’euro. Les termes employés par le Fonds monétaire international sont en l’occurrence suffisamment alarmistes pour justifier amplement cette manchette qui prend valeur d’affichette d’alerte dans les kiosques. Mais, comme Business s’en est fait une spécialité, c’est le couplage avec son infographie majeure qui donne tout son poids à « l’affiche ».

 

L’image lisible

Dans la plupart des médias, l’infographie reste un complément, une illustration, un soutien à la « parole » du « papier » du journaliste. Sur la une de Business, elle prend pratiquement le pas sur l’écrit, par sa taille et sa mise en forme. Elle « vaut tous les discours » comme l’on dit volontiers de l’image, mais en l’occurrence cette image se « lit » avec attention tellement les éléments qui la composent sont tous « parlants ».

 

Une mise en scène adaptée

Pour la décrypter, lisons-la comme un article, à commencer par son titre, invariablement « rouge au blanc », comme on l’exprime en jargon de métier : le texte est blanc sur fond rouge. Un peu comme ces alertes à la toxicité sur certains produits. Il dit sobrement que « l’économie mondiale court à l’échec ». Pas moins. Puis le graphique, de simples rectangles, décline une palette de couleurs dans les mêmes tons : du rouge sang à l’oranger. Comme un jeu de cube inversé, le « socle » en haut s’étale sur toute la largeur du graphique. Intuitivement, le lecteur va saisir que l’infographiste habile part de la plus forte croissance, identifiée à gauche : c’est la Chine. La légende explique qu’il « s’agit des ajustements de croissance du FMI pour la seule année 2011, d’octobre 2010 à septembre 2011 ». Dès lors, la dégringolade des grands « cubes » (blocs) pointe vers l’Italie, tout en bas.

 

Du global au détail

Le premier plan de lecture du graphe devient donc le rang réel des « blocs » ou des pays selon leur taux de croissance sur une année. Le deuxième est la traduction du ralentissement de cette croissance grâce aux rectangles de couleur. L’œil identifie tout de suite la puissance « malade » : les États-Unis, avec ce taux de 2,3 en octobre 2010, abaissé à 1,5 en septembre 2011, maintenant. Attelé à l’Amérique, le Royaume-Uni à son tour montre sa récession : de 2 à 1,1. Chaque lecteur « ciblera » ainsi le pays ou la zone qui l’intéresse au premier chef : les Français repèrent une France parmi les plus bas taux de croissance, mais avec un 1/10e de point de mieux : on se rassure comme l’on peut…

 

Registre bleu, comme « blue » (« triste, morose », en anglais)

Les autres informations du graphique frappent par leur complémentarité et l’intelligence de leur traduction visuelle. Dans le registre, cette fois, du « bleu », de la mer belle au « big blue », les chiffres montrent les croissances les plus rapides, où l’on remarque le Ghana après le Qatar, puis les plus lentes : ce sont bien sûr la Grèce et la Côte d’Ivoire qui « s’enfoncent ». Enfin le socle des rectangles de base montre le taux de croissance du monde entier défini par le FMI : la planète a perdu 0,2 point. À cette échelle, c’est énorme.

 

L’alerte du capitaine

Au centre du dispositif, une image, celle d’un tanker chargé de marchandises en train de couler. Raccourci saisissant du globe : tout le monde est sur le même bateau, les sociétés de consommation ne tiennent que par leurs produits, et ce cargo coule ! Avec ce mot du « capitaine » (Olivier Blanchard, chief economist du FMI qui endosse la responsabilité des prévisions, avec Christine Lagarde) : « l’économie mondiale est entrée dans une nouvelle phase hérissée de dangers… Le retour à la croissance se montre défaillant dans des proportions énormes. Des politiques déterminées sont nécessaires qui viseront à redresser la barre et à limiter les risques. »

Redresser la barre ? à en croire l’image, la rédaction de Business n’y croit pas vraiment…

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