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Théâtre et forums d’idées contre la répression

Le régime sous la pression internationale

Après plus de six mois de manifestations et de répression meurtrière, le régime de Bashar al-Assad fait désormais l’objet de pressions internationales. Le président américain et ses alliés occidentaux appellent le chef de l’État syrien à la démission et renforcent leurs sanctions. Le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a condamné avec force les violences en Syrie et décidé d’y envoyer d’urgence une commission internationale d’enquête.

Aujourd’hui, tout indique que la marge de manœuvre de Bashar al-Assad s’est rétrécie, mais pour autant va-t-il quitter le pouvoir ? Toutes les options demeurent ouvertes, y compris celle d’une lente évolution vers un peu de démocratie surveillée et beaucoup de libéralisme économique.

 

Des rassemblements de population de plus en plus importants

En attendant les signes d’une évolution attendue, le chaos règne. Au milieu de ce mélange de terreur et de révolte, le pays est le théâtre de nombreux forums clandestins, rassemblements qui ressemblent plus à des salons d’idées qu’à une contestation ouverte. Selon un témoin qui veut rester anonyme, les Syriens les plus préoccupés par ce qui se passe dans le pays se réunissent afin de s’exprimer et de débattre sur les principaux enjeux à venir. Oser débattre : une audace autrefois impensable sous la dictature…

« Les discussions portent systématiquement sur la citoyenneté et la démocratie. Tout le monde est inquiet, mais excité à la fois. Ils savent que quelque chose se termine », explique un intellectuel syrien de Damas, lui aussi sous couvert d’anonymat. Lui assiste à des réunions hebdomadaires, composées d’une cinquantaine de personnes de toutes les provenances.

 

Des forums clandestins entre peur et défi

Les forums ont commencé aux alentours de mai, dit-il, et se tiennent dans des maisons de particuliers, suscités principalement par le bouche à oreille afin d’éviter une intrusion de la police secrète.Le dernier groupe actif, le Forum Jamal Atassi, a été fermé en 2005 après qu’un de ses membres a lu une déclaration interdite des Frères musulmans.Avec la police secrète accaparée par les manifestations qui explosent dans tout le pays, les intellectuels, les artistes et tous ceux qui souhaitent s’exprimer jouissent d’une liberté de fait qui leur était auparavant inconnue.

 

Le théâtre comme support

Mais cette liberté n’est pas réelle. Elle est sous-tendue par une menace permanente. Alors pour exorciser cette angoisse, les Syriens se regroupent aussi autour du théâtre. « Les règles sont simples, poursuit cet intellectuel syrien, il s’agit de la mise en scène d’un petit “psychodrame”. En jouant un rôle ou en dramatisant, les participants sont encouragés à agir sur leurs sentiments. » Les thèmes sont variés. Le dernier en date : le sentiment de peur.

Discuter, se mettre en scène, repenser l’avenir… les forums secrets sont le lien invisible qui unit une population syrienne solidaire. « Les réunions se déroulent après le travail, et tout le monde est fatigué. Pourtant, tous semblent motivés. Nous arrivons, nous tirons les stores et puis quelques personnes se mettent à jouer, à tenir des rôles. Ensuite nous parlons ensemble de nos ressentis sur la saynète et, inévitablement, la conversation s’ouvre à ce qui se passe en Syrie », raconte encore notre témoin.

 

La force du partage malgré le sang qui coule

Ces forums n’empêchent malheureusement pas le sang de couler en Syrie. Néanmoins, leurs effets positifs sont réels. « Bien sûr, c’est terrible d’avoir tous ces morts, et ce sang, et cette violence, mais d’un autre côté, il existe maintenant une réelle prise de conscience. De plusieurs manières, la population syrienne commence à retrouver un certain bonheur ». Le bonheur de rêver la possibilité d’une nouvelle société…

Global Post/Adaptation Marguerite Laferrère JOL-Press

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