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Un avenir toujours aussi incertain

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Une situation chaotique qui n’en finit plus


Les sirènes s’entendent partout, même dans des coins éloignés de Kaboul comme celui où je me suis abrité avec une douzaine d’autres réfugiés. Nous étions tous coincés ici à cause des attentats qui ont explosé dans le centre-ville mardi après-midi pendant des heures. Aujourd’hui, ce sont des hommes armés qui surveillent les portes de cette maison d’hôtes de l’ouest de Kaboul. À bon entendeur, il reste des places sur le toit. Mais tous les réseaux téléphoniques sont saturés, il est donc presque impossible de communiquer avec des amis dans la zone « chaude ». La population afghane est tendue, et personne ne sait ce qui va arriver.
Ce qu’on appelle attaque « complexe », autrement dit qui implique une série d’agressions et des violences, est en cours à l’ambassade américaine. Des explosions ont été détectées dans plusieurs régions de Kaboul, et il a été dit qu’un car scolaire comprenant des enfants avait été touché. Il s’est avéré plus tard qu’il était vide.


 


Le siège de l’Otan et des bâtiments officiels pris pour cible par les talibans


Une roquette en direction de l’ambassade des États-Unis est tombée mardi sur une maison d’un quartier résidentiel situé à proximité de Kaboul, elle a tué le cuisinier. Au moins quatre policiers afghans ont été tués, ainsi que deux civils. Plus de 20 blessés ont été signalés. Toutefois, comme se bousculent les informations, les chiffres devraient peu à peu augmenter. Le porte-parole de l’ambassade américaine explique qu’il n’y a pas de victimes américaines « à l’heure actuelle », et un officier de l’USAID a déclaré sur Facebook : « Nous allons très bien. » L’attaque semble avoir également voulu viser le siège de la Fias (Force internationale d’assistance et de sécurité) qui représente la composante militaire de la coalition en Afghanistan, sous l’égide de l’Otan. Pas de victimes signalées, mais apparemment quelques dégâts. En fait, les détails se font rares.


 


L’Otan contre-attaque à Kaboul


Les forces de sécurité afghanes soutenues par des hélicoptères de combat de l’Otan affrontaient mercredi matin les insurgés talibans au lendemain de la vague d’attaques coordonnées lancées à Kaboul. Un nombre indéterminé d’islamistes se trouvaient encore retranchés dans un immeuble de 12 étages proche du quartier des ambassades dans la capitale afghane, qui abrite la chancellerie américaine fortifiée et le quartier général de l’Alliance Atlantique. Un fonctionnaire du ministère de l’Intérieur a déclaré que moins de 10 insurgés ont été impliqués dans les attentats qui ont paralysé et terrorisé la capitale pendant plus de six heures. Au moment où j’écris, deux seulement sont encore vivants [les informations font état de leur mort depuis, NDLR], mais le bruit des hélicoptères, des sirènes et des explosions n’a pas connu de trêve.


 


Pour le chef de l’Otan, les Forces de sécurité Afghanes seront maîtresses du terrain


C’est un cauchemar qui est d’autant plus angoissant depuis les déclarations faites à Bruxelles par le chef de l’Otan, Anders Fogh Rasmussen : « Nous suivons les événements de près et nous avons confiance en la capacité des autorités afghanes à faire face à cette situation. » Il ajoute que l’ennemi fait tout ce qu’il peut pour freiner le processus de transition mais qu’il ne peut pas « l’empêcher ». « Transition » est le terme utilisé pour le transfert de la responsabilité de la sécurité, qui relevait de l’Otan, aux Forces de sécurité nationales afghanes (FSNA) depuis juillet. Jusqu’à présent, les FSNA se sont occupées de sept régions meurtries, y compris celle de Kaboul. Le discours de Rasmussen peut être dur à encaisser pour les résidents de Kaboul, encore sous le choc des attaques de mardi.


 


Plus d’espoir ?


« Ces attaques ont ébranlé la confiance des Afghans », a déclaré Bilal Sarwary, reporter à la BBC.
D’autres ont été tout aussi définitifs dans leurs commentaires. « J’espère que quelqu’un a mentionné le ‘”Ring of Steel” dans son rapport », a twitté un observateur de la situation. Il fait allusion aux points de contrôle de police répartis dans toute la ville, qui arrêtent, tracassent les femmes étrangères et les hommes afghans respectueux de la loi, mais qui, à l’inverse, laissent passer bien trop souvent les plus dangereux. « À quoi servent-ils ? » demande une jeune reporter afghane, en parlant de deux dirigeables à l’allure de « ballons espions » qui planent sur Kaboul. On dit qu’ils sont à l’origine du flux constant d’informations transmises aux Forces de sécurité nationales afghanes.


 


Des attaques qui ne surprennent plus


Les premiers rapports des réseaux de sécurité en début d’après-midi ont indiqué que les troupes d’Amaniyat, service de renseignements de l’Afghanistan, ont pu arrêter les tirs d’un groupe armé d’opposants avant qu’ils ne puissent atteindre leur cible. Néanmoins, ils ne les ont pas empêchés longtemps. En milieu d’après-midi, la ville était tétanisée et le trafic avait pratiquement cessé sur la plupart des routes principales. Ce fut un choc mais pas une surprise pour les habitants de Kaboul apparemment plus blasés que terrifiés face au chaos. « Le pays a été calme pendant trop longtemps. Je savais que quelque chose comme ça allait arriver », explique un humanitaire installé à Kaboul depuis sept ans. La ville a en effet été calme pendant quelques mois. La dernière attaque majeure remonte à la fin du mois de juin : l’Hôtel Intercontinental, situé à l’ouest de Kaboul, est mis à feu (sept morts). De nombreux incidents dans d’autres parties du pays avaient existé. Il y a trois jours, une explosion toucha le Wardak, province éloignée, 79 militaires américains ont été blessés. Comme ceux qui travaillent pour l’aide internationale, beaucoup sont préparés en cas d’attaque, des préventions existent. La ville a été figée pour le 10e anniversaire des attaques du 11-Septembre et les restrictions de sécurité ont été levées tard la nuit dernière.


 


Quant aux optimistes…


D’autres habitants de Kaboul ont été plus optimistes dans leurs observations. Il y a deux jours, le nouvel ambassadeur américain à Kaboul, Ryan Crocker, a déclaré au Washington Post que « le plus gros problème à Kaboul est le trafic ». Regrettable cynisme. La résidence de l’ambassadeur est des plus vulnérable aux attaques de roquettes…


 


GlobalPost/Adaptation Marguerite Lafferère – JOL Press.

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