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Un énième plan pour sauver l’euro

Londres. Ce week-end, les dirigeants européens participant à la réunion annuelle du Fonds monétaire international (FMI) à Washington ont été verbalement « lynchés » pour leur inaction dans la résolution de la crise en Europe. Certains craignent que s’ils continuent de traîner les pieds, un défaut de paiement en Grèce pourrait se répercuter ailleurs, et entraîner toute l’économie mondiale par effet domino.


Un nouveau plan pour limiter les dégâts de la crise grecque


Les dirigeants semblent comprendre le message. Enfin, un plan commence à prendre forme. S’il est mis en œuvre d’ici à cinq ou à six semaines, il vise à autoriser la Grèce à ne pas rembourser toute sa dette, et les banques et autres créditeurs enregistreraient des pertes de 50 %. Mais, en contrepartie, la zone euro ne se désintégrerait pas – au moins pas pour le moment. Ce plan pourrait également renforcer le Fonds de secours européen, qui atteindrait 3 000 milliards, selon la BBC.


Dans une interview accordée à l’agence de presse Bloomberg ce week-end, la chancelière allemande Angela Merkel a appelé à dresser un « cordon sanitaire » autour de la Grèce, pour s’assurer que les retombées de la crise grecque ne feront pas couler d’autres économies européennes (Bloomberg signale également que la chancelière a précisé qu’elle-même suivait un traitement pour lutter contre une crise d’hypertension).


En quoi consiste ce plan ?


À la racine, un déséquilibre en Europe


D’abord, reconnaître qu’un défaut de paiement grec est inévitable représente un premier pas. Au-delà de ses dépenses excessives et de son incapacité à récolter les impôts, la Grèce a suscité son défaut en laissant perdurer une situation hors de contrôle, le déséquilibre entre les performances économiques entre le Nord et le Sud de la zone euro.


L’économie européenne fonctionne en deux temps, comme l’économie américaine au fil des années 1970 et 1980, lorsque la Manufacturing Belt s’est contractée et que la Sun Belt [la « ceinture du soleil, États du sud et de l’ouest des États-Unis en plein dynamisme économique, ndlr] a pris son essor. Mais à cette différence près que les États-Unis, pays fédéral ont un système fiscal uniforme, qu’ils les moyens de gérer ce déséquilibre – tandis que l’Europe, sans politique fiscale unifiée, en est incapable.


Le bonheur des uns fait le malheur des autres


« Durant la première décennie de l’existence de l’euro, la hausse des prix en Allemagne fut très lente, les salaires augmentaient à peine », explique Simon Tilford, du Centre pour la réforme européenne, un groupe de réflexion de Londres. Le résultat, dit-il, a été un boom de l’exportation. L’euro s’est renforcé, et les pays méditerranéens se sont retrouvés avec une inflation causée par le succès économique de l’Allemagne.


« À présent, dit Tilford, pour que les pays du Sud exportent et dopent leurs économies, les Espagnols et les Italiens doivent réduire leurs prix vis-à-vis de l’Allemagne. L’Allemagne a besoin de générer une inflation. » Traduction : les prix de la main-d’œuvre allemande augmenteraient.


Mais comme une aversion pour l’inflation reste ancrée dans la société allemande depuis les années 1920, il est difficile d’imaginer la chancelière Angela Merkel, ou n’importe quel homme ou femme politique allemand, préconiser une inflation pour améliorer les économies des pays voisins !


L’union fiscale, seule solution ?


En revanche, Merkel n’est pas totalement impuissante : elle pourrait promouvoir la ratification du Fonds européen de stabilité financière (FESF), le fonds de secours européen, qui fit l’objet d’un accord au sommet de l’Union européenne le 21 juillet, et sur lequel le Bundestag va voter jeudi 29 septembre.


Mais rien n’est simple en temps de crise. La question est de savoir combien de membres de la coalition de Merkel voteront en faveur du fonds. Ulrike Guerot, du Conseil européen des relations étrangères à Berlin nomme « majorité de la chancelière » les 60 à 70 % des partis politiques au Bundestag qui sont, selon elle, favorables à un plan de sauvetage.


La résistance au projet vient essentiellement du parti de Merkel lui-même, l’Union chrétienne-démocrate. Si une majorité ne suit pas la chancelière, il y aura fort à parier que l’avenir de l’euro sera sombre.


Mais même si Mme Guerot ne s’attend pas à une importante désertion à son encontre, la chancelière devra composer avec les électeurs allemands. « Elle devra leur dire qu’il n’existe pas de solution miracle à une crise, et qu’une union fiscale devient vitale. Au final, c’est ce qui adviendra, nécessairement. Elle devra dire la nécessité d’une union fiscale plus profonde, d’une union politique, et probablement une euro-obligation. »


Un horizon immédiat compliqué


Mais ce projet se déploiera à moyen terme, sur les deux prochaines années. À court terme, la situation sera plus difficile. Pour Simon Tilford, « il est peu probable que l’euro soit toujours vaillant dans 12 mois ». Il s’attend même à voir certains pays abandonner la monnaie unique.


Mais le pessimisme de Tilford n’est pas unanime.


Stephen Gallo, chef des analyses de marché pour Schnieder Foreign Exchange, à Londres, ne voit pas tout en noir. Il explique que le FESF sera sans doute ratifié par tous les pays de la zone euro. « Une façon de s’acheter du temps », car la zone euro peut « absorber un défaut de paiement grec… et peut-être un défaut de paiement du Portugal », afin de protéger ses pays centraux. Ensuite, les marchés pourraient se tourner vers les États-Unis.


 


GlobalPost/Adaptation JF – JOL Press

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