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Un Printemps chinois en 2012?

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Une vague de liberté et de démocratie a balayé le monde en 2011. Cet esprit n’a pourtant pas soufflé sur la Chine qui reste toujours soumise au joug sans partage du Parti Communiste, parti unique depuis la création de la République Populaire de Chine en 1949.


Deuxième puissance économique mondiale et pays le plus peuplé avec 1,3 milliards d’habitants – un cinquième de la population mondiale – la Chine est un pays plein de contradictions. Un pays dans lequel le Parti Communiste d’Etat ne fait pas que tolérer le capitalisme, il l’encourage. Un pays dans lequel chacun peut devenir aussi riche que ses talents et ses relations le lui permettent, tant qu’il ne joue pas avec les lois du parti et n’ébranle pas le bateau politique. La Chine a une importante classe moyenne, qui tend à se développer mais aussi une classe prolétaire immense, tant dans les villes que dans les campagnes.


Depuis les vingt dernières années, un phénomène de fascination est apparu pour tout ce qui touche à la Chine. Curieusement, cette fascination ferait presque oublié la terrible réalité et le record d’atteintes aux droits de l’Homme.


Le monde ferme les yeux quand la Chine bafoue les droits de l’Homme


[image:2,s]Pendant que l’économie chinoise poursuivait sa course, toutes les entreprises mondiales se sont précipitées afin investir dans le pays.


La Chine est rapidement devenue la destination préférée de l’élite mondiale. Pourtant, la plupart de ces personnes, bien qu’intelligentes, ont toujours ignoré le bilan catastrophique de la Chine en matière de droits de l’Homme et l’absence de liberté d’expression que doit supporter son propre peuple.


Sauf pour les cas les plus célèbres, les protestations des Chinois à l’égard de leur gouvernement n’est quasiment pas médiatisée. L’Académie chinoise des Sciences Sociales a recensé plus de 80 000 « incidents de masse » contre le gouvernement en 2007. En 2006, il y en avait eu 60 000. Malheureusement, l’Académie n’a pas mis à jour ses données depuis ces quatre dernières années. Pourtant, on pense que ces chiffres ont largement augmenté.


Le Printemps Chinois commence à Wukan ?


Les récents évènements qui ont animé le village de Wukan, au sud de la Chine, dans la province de Guandgong, peuvent être le signe annonciateur d’un mécontentement généralisé à l’encontre des autorités chinoises.


Les manifestations à Wukan ont débuté en septembre dernier et leur intensité a rapidement augmenté. Les villageois se sont faits remarqués par leur bravoure, n’hésitant pas à remettre ouvertement en question les ventes de biens immobiliers dans leur village, ventes organisées par des responsables du Parti Communiste, et la confiscation de leurs terres au profit de propriétaires privés. Une accélération des manifestations a eu lieu en décembre, les responsables locaux ont été littéralement expulsés de la ville par les habitants lorsque ceux-ci ont appris que leur porte-parole était mort, prétendument d’une crise cardiaque, pendant une garde à vue. Les villageois sont, eux, convaincus qu’il a été assassiné.


La Révolution de Jasmin étouffée


[image:3,s]La Chine est dirigée par le Parti Communiste. A sa tête, le Comité Central et plusieurs milliers de fonctionnaires sont disséminés dans chaque province, district et village du pays. Le Parti Communiste Chinois (PCC) infiltre et dirige tous les aspects du gouvernement et de l’armée.


Les dirigeants chinois ont toujours été profondément attentifs aux actes de dissidence mais leur vigilance s’est accrue depuis le début du Printemps arabe, en décembre 2010, et le renversement des leaders arabes, en Tunisie d’abord, puis en Egypte et plus récemment en Libye.


Bien que l’accès à l’information soit largement censuré en Chine, les nouvelles du Printemps arabe ont inspiré de nombreux Chinois et certains s’imaginaient organiser leurs manifestations. Mais la Révolution de Jasmin version Beijing a été brutalement réprimée.


Les premières cibles de la répression


Renée Xia, directrice internationale pour l’organisation chinoise China Human Rights Defenders (CHRD), écrit que le gouvernement chinois, dans sa récente répression d’un embryon de mouvement de contestation, a « eu recours à toutes les armes disponibles, les disparitions forcées, les détentions arbitraires et la torture pour intimider quiconque voudrait tenter un Printemps Arabe en Chine. »


Les défenseurs des droits de l’Homme, activistes de la société civile, avocats, journalistes, même les artistes, comme Ai Weiwei, ont payé au prix fort la défense de la démocratie et des droits de l’Homme en Chine. 


Il y a deux semaines, Gao Zhisheng, un éminent avocat spécialisé dans la défense des droits de l’Homme, a été condamné à trois ans de prison. En 2006, il avait été condamné pour incitation à la subversion. Il était porté disparu depuis ces cinq dernières années.


La semaine dernière, l’activiste Chen Wei a été condamné à neuf ans de prison pour « incitation à la subversion » et Chen Xi, un écrivain, a été condamné à dix ans de prison. Ces deux condamnations sont parmi les plus lourdes jamais prononcées, selon le CHRD.


La répression s’intensifie


Il y a de nombreux autres cas et, bien sûr, il ne faut pas oublier Liu Xiaobo, prix Nobel de la paix 2010 – malgré la véhémence de la protestation chinoise – dont l’action a été décrite par le Comité Nobel comme un « long et pacifique combat pour les droits humains fondamentaux en Chine. »


Renée Xia explique que la situation en Chine n’a fait qu’empirer depuis ces dernières années.


La répression s’est intensifiée en s’appuyant sur un usage excessif de la peine de mort, de la torture, des emprisonnements arbitraires, de la censure et un accroissement de la répression des minorités religieuses et ethniques, les Ouïgours et les Tibétains, les pratiquants du Falun Gong, et les chrétiens clandestins. Le Tibet a connu cette année un nombre impressionnant d’auto-immolations en contestation du gouvernement chinois.


Les Russes réclament leur liberté


[image:4,s]Si les autorités chinoises se sont senties concernées par le printemps arabe, elles doivent suivre, de très près, les récentes manifestations en Russie.


La veille de Noël, environ 120 000 Russes étaient dans les rues de Moscou pour protester contre le gouvernement du Premier ministre, Vladimir Poutine, ancien président, à deux reprises, prêt à se présenter une nouvelle fois, en mars prochain. C’était la seconde grande manifestation à Moscou, au mois de décembre. Ces deux mouvements étaient d’une intensité jamais vues depuis la fin de l’Union Soviétique et du communisme.


Le peuple réclame sa liberté, c’est le message qui ressort de tous ces évènements.


En Tunisie, pays qui a donné naissance au Printemps arabe, il n’a fallu que 28 jours entre l’auto-immolation du jeune vendeur de fruits, Mohamed Bouazizi, et la chute du président Zine el-Abidine Ben Ali qui a conduit à l’établissement d’une nouvelle démocratie.


Le Printemps Chinois changerait la face du monde


Personne ne peut savoir,  ni quand, ni comment un tel évènement pourrait naitre en Chine et précipiter la chute du Parti Communiste Chinois. Même si quelque chose de semblable arrivait, ce ne serait sans doute pas si facile.


De nombreuses personnes, dans tout le pays, souhaitent que la situation ne change pas. Ils ont travaillé trop dur pourbâtir leur succès, et cela en dépit du régime actuel. Et, bien sûr, un évènement sérieux dans un pays de cette importance aurait un retentissement énorme sur l’économie mondiale.


Mais c’est inévitable et, un jour, cela arrivera. Le peuple chinois est incroyablement travailleur et intelligent et le combat pour la liberté est trop fort pour être repoussé éternellement.


Global Post / Adaptation Sybille de Larocque – JOL Press

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