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Les artistes au secours du moral des Grecs

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[image:1,l] Un Grec, un Portugais et un Espagnol sont avec Dieu. Le Portugais et l’Espagnol lui demandent dans combien de temps les dettes de leur pays seront remboursées. Dieu répond alors : « Dans 100 ans pour le Portugal et dans 150 ans pour l’Espagne ». Déçus, ils disent : « Mais nous serons morts d’ici là. ». Alors le Grec pose la même question à Dieu et celui-ci répond : « Je ne sais pas, je serai mort d’ici là ».

L’humour noir fait fureur en Grèce depuis quelques temps, et les Grecs avouent ouvertement leur pessimisme quant à la situation de leur pays. Dans cette troisième année de récession, l’humour et l’art sont devenus des mécanismes de survie pour faire face à un chômage élevé, à la pauvreté et au chaos de la politique grecque. Grâce aux caricatures, à l’art de la rue et aux blagues, les Grecs arrivent à mieux résister devant le sinistre.

L’art de la rue, journal public de la société

[image:2,s] Il y a une phrase dans une célèbre chanson grecque qui dit : « Les rues ont leur propre histoire, quelqu’un l’a écrite sur les murs avec de la peinture ». C’est ce qu’il semble se produire actuellement à Athènes. Sur le côté d’un immeuble, à deux rues de la place principale, une paire de mains peintes méticuleusement sont jointes comme pour une prière du ciel vers la terre. En dessous, de nombreux toxicomanes passent quotidiennement après avoir obtenu leur dose.

 

[image:3,s, r] « L’art de rue est le journal de la société affiché publiquement » disait Bleeps, un activiste grec qui ajoute des couleurs sur les murs de tout son pays. (www.bleeps.gr). Dans une des rues passantes d’Athènes, Bleeps a peint « Le prochain modèle économique de la Grèce », qu’il propose comme un nouveau symbole pour la Grèce. Ce dessin illustre une jeune femme portant un bikini, marchant d’un pas assuré vers l’avant malgré sa jambe de bois. A travers son travail, Bleeps essaye de rappeler aux Grecs qu’ils ne sont pas seuls, car ils sont unis pour se débarrasser du système actuel.<!–jolstore–>

 

 

[image:4,s] Loin des rues commerçantes d’Athènes, sur Santorin, une des îles les plus visitées du monde, Bleeps a peint une autre femme, Adieu l’UE. « Nous disons au revoir à l’Union européenne, pas parce que nous allons être mis à la porte, mais parce qu’afin d’y rester nous devrons dire adieu à une partie de nous-mêmes. »

 

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« Joyeuse crise à tous »

Les murs dans le centre d’Athènes sont couverts de dessins et de slogans impertinents. L’un des plus populaires montre un petit garçon en train d’uriner sur le soleil, le soleil étant le symbole du Pasok, un des principaux partis politiques en Grèce. Un autre souhaite de joyeuses fêtes aux Grecs, et à la grecque : « Joyeuse crise et bonne nouvelle peur ».

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Humour digital

Comme pour la plupart des mouvements sociaux ces jours-ci, la réponse à la crise inclut l’utilisation intensive des réseaux sociaux. Des photos retouchées ont créé un véritable buzz sur Facebook et Twitter. Une série de photo qui ont fait le tour du monde en 2011 montraient George Papandréou, l’ancien Premier ministre grec, photoshopé, à l’image du montage utilisé par Apple sur la couverture du livre de Steve Jobs. Sous la photo, la légende précise : « No Jobs 2009-2011 », une référence au taux de chômage de 19 % dont souffre actuellement la Grèce. Plusieurs photos illustrant d’autres personnalités politiques grecques ont été modifiées de la même manière. A chacune correspond son slogan : « No votes, no friends, no clues ». (« Pas de votes, pas d’amis, pas d’idées »).

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[image:8,s] En 2011, alors que les leaders politiques adoptaient de nouvelles mesures d’austérité, Athènes a vécu ses plus grands mouvements de protestation des 40 dernières années, ainsi qu’une violence policière généralisée. En octobre, des satiristes ont riposté : la photo de Barbie Princesse Parlement a fait beaucoup parler d’elle. La photo originale a été prise lors d’une manifestation, après que certains manifestants ont jeté de la peinture rose sur la police anti-émeute. « Le mouvement de moquerie contre ces policiers peints en rose a pris de nombreuses formes et s’est très vite répandu sur le Web », expliquait Yannis Skarpelos, professeur agrégé de culture et de communication visuelle à l’université Panteion à Athènes. « Nous avons vraiment l’humour caustique ici, mais c’est une forme de résistance contre la répression, quelque chose avec lequel les Grecs ont appris à vivre depuis les deux dernières années. »

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Sur une photo du Parlement grec, une fenêtre informatique est ouverte et demande à l’utilisateur s’il veut vraiment supprimer les 300 membres de l’assemblée : les députés sont largement tenus pour responsables de la situation du pays.

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L’Allemagne a le mauvais rôle dans l’affaire, c’est elle qui insiste sur l’importance d’imposer toujours plus de mesures d’austérité. Facile alors pour les Grecs de comparer la discipline économique actuelle avec l’ère nazie. Ici, une photo représente le nouveau gouvernement grec habillé d’uniformes nazis.

 

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Ici, la Une du journal Ta Nea illustre Angela Merkel dirigeant la Grèce comme un pantin et son marionnettiste.

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La mendiante de l’Europe

Parmi les nombreuses modifications apportées au drapeau européen, un motif que tous les dessinateurs grecs adorent utiliser est une main tendue parmi les 12 étoiles. Les médias européens appellent souvent la Grèce « la mendiante de l’Europe ».

 

 

« La chute de Monsieur FMI », vidéo ci-dessous, représente l’ancien Premier ministre George Papandréou détruisant la Grèce.

« Ce montage a été créé par une classe de jeunes âgés de 11 à 14 ans », explique Tzeni Orneraki, directeur de l’école de design graphique Ornerakis. « L’idée et le script viennent d’eux et leur professeur ne les a absolument pas aidés. Le directeur du groupe était Elias, un garçon de 11 ans. »

Caricaturistes démunis

Un pays en crise comme la Grèce pourrait être un sujet idéal pour les artistes comiques. Mais les caricaturistes dans la plupart des journaux grecs affirment avoir parfois quelques difficultés à dessiner. « Nous sommes aussi des citoyens de ce pays et notre humeur est affectée par la situation », explique Elias Makris, caricaturiste pour Kathimerini, un des plus gros journaux grecs.

[image:13,s] Tous les lundis, les gros titres préparent la Grèce à « la semaine la plus cruciale pour le pays. Donc depuis 2009, nous avons vécu des centaines de semaines critiques, durant lesquelles rien ne changeait », explique Elias Makris, qui dessine depuis des années.

[image:14,s,r]Kosta Mitropoulos est dessinateur depuis cinquante-sept ans, et caractérise souvent le Grec moyen grâce au port du fez, ce chapeau venu de la civilisation ottomane. Dans ce dessin, qu’il a réalisé pour Global Post, un Monsieur-tout-le-monde grec saute, nu, par-dessus un buisson de cactus pour passer de 2011 à 2012 :

« Il chose la plus facile à faire pour un dessinateur comme moi serait de s’attaquer aux leaders européens, Merkel ou Sarkozy », déclare Kosta Mitropoulos, qui travaille pour le journal Ta Nea. « Ça aurait beaucoup de succès et ça se vendrait bien. Mais ce qui est difficile est de dessiner la réalité et d’expliquer aux Grecs que nous avons mené nous-mêmes le pays dans la situation actuelle. »

Pour les dessinateurs, la dégradation du système politique entrave leur créativité. « Dans le passé, les politiciens ont gagné le respect du peuple, et il était plus facile de faire rire », explique Andreas Petroulakis, dessinateur pour le journal Kathimerini. « Quand quelque chose est déjà détruit, comment puis-je encore le détruire ? »

Global Post/Adaptation Sybille de Larocque – JOL Press

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