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Les Iraniens, patriotes mais pas suicidaires

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[image:1,l] « Vatan », la patrie. C’est ainsi que les Iraniens ont pris l’habitude d’appeler leur pays depuis plusieurs générations. Alors que les menaces de l’Occident se font de plus en plus pressantes, la fierté persane se transforme peu à peu en vagues de nationalisme.


Le gouvernement de Mahmoud Ahmadinejad a appris depuis longtemps à utiliser ce puissant levier. Publier les photos du drone américain capturé, évoquer un embargo pétrolier ou le blocage du détroit d’Ormuz sont autant de façons de stimuler la fibre patriotique des Iraniens en vantant leur indépendance et leur force de frappe.


Patriotisme plutôt que nationalisme


Pourtant, en 2012, le nationalisme en Iran n’est pas nécessairement politique. Conscients du poids des dépenses militaires et des fanfaronnades internationales du gouvernement de Mahmoud Ahmadinejad, beaucoup cherchent à oublier les menaces qui pèsent sur le pays en replongeant dans son passé glorieux.


Au Iran’s National Museum, on trouve des objets datant de plus de 7000 av J.-C. Ce symbole de la grandeur du pays sert à la fois de repaire et de souvenir d’une époque passée. Javad, qui travaille comme guide dans le musée, regarde l’édifice avec mélancolie : « Quand je regarde les trésors qu’il y a ici, je suis toujours attristé de voir à quel point cet âge d’or est loin. »


Dans les rues de Téhéran, le nationalisme ne prend pas toujours ce visage nostalgique. Certains cherchent à se remonter le moral en se réjouissant des succès internationaux de l’équipe de football en salle ou du triomphe aux Oscars et aux Golden Globes du film Une séparation d’Asghar Farhadi. D’autres voient les menaces contre le pays comme une fatalité et souhaitent défendre leur pays, quitte à y perdre la vie.


L’esprit de sacrifice


Nazanin, jeune diplômé de 27 ans, a vu son amour du pays prendre le pas sur l’espoir d’une vie plus sûre : « J’ai voulu quitter l’Iran pendant des années, mais maintenant, je sais au fond de moi que je désire rester. Je ne laisserai jamais des envahisseurs étrangers venir nous attaquer. Même si je ne soutiens pas du tout le régime actuel, je défendrai l’Iran. C’est un pays compliqué, mais c’est avant tout mon pays. »


Comme lui, de nombreux jeunes Iraniens ont oublié leurs rêves d’évasion pour se tenir prêts à défendre leur terre. Après l’assassinat du professeur Mostafa Ahmadi Roshan en janvier 2012, plus d’une centaine d’étudiants de l’université Sharif avaient demandé à changer de filière pour rejoindre la section de physique nucléaire et participer au péril de leur vie à l’avancement des recherches.


Une large mobilisation étudiante avait également demandé la libération, début février, du professeur Seyed Mojtaba Atarodi, détenu et condamné à 460 000 dollars d’amende aux Etats-Unis pour avoir exporté du matériel électronique vers l’Iran.


L’amour du pays, loin de l’Iran


Comme ce scientifique parti aux Etats-Unis, de nombreux Iraniens tentent de concilier patriotisme et exil. En 2011, ils étaient entre 50 000 et 80 000 à choisir de quitter le pays en attendant des jours meilleurs. Pour la plupart, il ne s’agit pas de renoncer à vivre en Iran. Mais plus tard, lorsque les choses se seront calmées. Souvent à contrecœur, ils s’envolent par centaines vers la Turquie ou la Malaisie, pays où les visas sont faciles à obtenir. D’autres tentent de partir en tant que touristes vers l’Europe avant de demander l’asile politique dans une ambassade américaine.


Kazem est homme d’affaires, pour lui l’Iran est un pays unique mais trop instable à l’heure actuelle : « Il n’y a pas de meilleur endroit au monde que l’Iran pour gagner de l’argent. Mais pas en ce moment. Trop incertain. »


Même son de cloche chez Nilofer, enseignant en quête d’un visa vers l’étranger : « J’aime profondément ce pays. Mais pour le moment, je préfèrerais résider ailleurs, je ne suis pas rassuré ici. »


GlobalPost/Adaptation Emmanuel Brousse pour JOL Press

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