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Benjamin Netanyahu joue sur plusieurs tableaux

[image:1,l]Alors que les négociations sont en cours à Istanbul concernant le programme nucléaire iranien, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu n’a qu’une seule idée en tête : clamer haut et fort le danger représenté par la République islamique, quels que soient les moyens trouvés par la communauté internationale pour y remédier.

Un cadeau de la communauté internationale à l’Iran

À la suite des conclusions des dernières discussions entre l’Iran et les puissances occidentales, Benjamin Netanyahu a exprimé son agacement face à la lenteur du processus diplomatique de la communauté internationale. Selon lui, les intervalles entre chaque sommet ne sont rien d’autres qu’un « cadeau » fait à l’Iran pour lui permettre de poursuivre ses activités de développement de sa capacité nucléaire.

Derrière ce discours agressif, de nombreux analystes affirment que les prises de positions du Premier ministre israélien font partie d’une longue stratégie pré-électorale, visant à faire face à des menaces contre la stabilité de sa coalition.

Alon Liel, ancien directeur général du ministère des Affaires étrangères estime que le dossier iranien représente une double opportunité pour Benjamin Netanyahu. Sur le plan extérieur, il est accusé de ne pas avancer sur le terrain du dialogue avec les Palestiniens et s’en trouve vulnérable. À l’intérieur, il doit consolider son flanc droit avant les prochaines élections.

« Dans les cercles politiques de Benjamin Netanyahu, et même plus loin, c’est très confortable pour lui de faire parler de l’Iran et de se faire remarquer sur ce dossier. Il a besoin de se pencher sur les réalités politiques internes et consolider un consensus israélien tout en écartant le dossier palestinien », explique-t-il. « Il est beaucoup plus simple pour lui de parler du danger iranien que de faire face à la crise avec les Palestiniens ».

Pour Alon Liel, bien que Benjamin Netanyahu soit sans aucun doute très sérieusement concerné par la possibilité de voir l’Iran devenir une plus grande menace pour Israël, une grande partie de cette rhétorique n’a pour objectif que de servir ses ambitions électorales.

« Je suis personnellement beaucoup plus effrayé par le silence des Palestiniens que par les « va-et-vient verbaux » entre Barack Obama et Benjamin Netanyahu»

Barack Obama justifie la communauté internationale

Le président américain a rapidement répondu aux vives réactions de son homologue israélien.

« Désormais l’horloge tourne. J’ai été très clair envers l’Iran et nos partenaires sur le fait que nous n’allons pas tolérer que ces pourparlers s’éternisent. L’idée, que nous aurions accordé une concession ou une prime, signifierait que l’Iran aurait gagné quelque chose. En fait, ce qu’ils ont gagné, ce sont des sanctions plus dures qui les attendent d’ici quelques mois s’ils ne profitent pas de ces pourparlers. J’espère qu’ils le feront. »

Pour Alon Pinkas, ancien consul général israélien à New York et chef de cabinet de plusieurs ministres des Affaires étrangères, les accès de colère de Benjamin Netanyahu sont vraiment irresponsables.

« La rapidité et la fermeté de la réponse des États-Unis suggère que les réserves émises par Israël auraient dû être évoquées dans la tranquillité. La réaction de Benjamin Netanyahu a donné une impression de divergence majeure entre les États-Unis et Israël qui, dans les faits, n’existe pas. »

Retrouver une unité nationale avant les élections

Benjamin Netanyahu jongle aujourd’hui avec de nombreux challenges qui entourent les élections prévues l’année prochaine. En interne, le Premier ministre doit de nouveau affronter le mouvement « Occupy » qui, après avoir organisé de nombreuses vagues de protestations l’été dernier, profite de ce printemps pour remettre son mouvement en marche.

Dans son propre gouvernement, certains alliés politiques tels que le vice-Premier ministre et ancien chef de cabinet, Moshe Ya’alon, le menacent de quitter leur poste s’il persiste à se conformer à une ordonnance de la Cour Suprême exigeant l’évacuation de colonies juives illégales en Cisjordanie.

Déjà, de nombreux ministres israéliens se sont résignés à attendre l’effondrement du gouvernement bien avant la date des élections, prévues fin 2013.

Benjamin Netanyahu, ce génie des relations publiques

Amos Yadlin, ancien chef du renseignement militaire, a pris la semaine dernière l’inhabituelle initiative de calmer toutes les rumeurs concernant une éventuelle attaque d’Israël contre l’Iran, déclarant sur une radio publique, « même si l’Iran obtient les capacités de fabriquer une bombe, je ne pense pas que la première chose qu’ils fassent soit d’attaquer Tel Aviv ».

De nombreux analystes israéliens estiment également que les jeux politiques autour du dossier iranien ne servent qu’à la médiatisation de l’image de front uni, que veulent donner Benjamin Netanyahu et Barack Obama. « Cinq semaines, ce n’est pas la fin du monde » a déclaré en ce sens l’expert iranien, Meir Javedanfahr, au magazine israélienTimes of Israel, répondant au propos de Benjamin Netanyahu, sur les intervalles entre les négociations.

Pour Alon LielBenjamin Netanyahu « est un maître en manipulation et un génie des relations publiques, un vrai maître. La dernière chose qu’il souhaite, par exemple, c’est de voir l’ONU accéder aux requêtes des Palestiniens, et de devoir détruire les colonies juives. Il veut la paix sur ce front. Et le meilleur moyen pour obtenir ce silence est d’élever le ton sur le dossier iranien. »

Même son de cloche chez le blogueur israélien Anshell Pfeffer qui estime également que les calculs du Premier ministre pour les échéances électorales expliquent totalement son impertinence.

« Il a besoin de se présenter à l’électorat israélien avec un bilan au sujet de l’Iran et il en a besoin rapidement. Le Premier ministre entend non seulement le « tic-tac » de l’horloge atomique iranienne, mais aussi les clameurs des rues de Tel Aviv de l’été dernier. »

Global Post / Adaptation Sybille de Larocque – JOL Press

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