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Victoire des Frères musulmans: Mohamed Morsi élu président

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Comme lors des dernières législatives égyptiennes, en janvier dernier, les Frères musulmans ont anticipé, dimanche 17 juin, le résultat du scrutin, en annonçant la victoire de leur candidat Mohamed Morsi avec plus de 52% des voix. Résultat confirmé dimanche 24 juin.

Les Frères musulmans se préparent à dénoncer la fraude

Une nouvelle annoncée en plein dépouillement du scrutin mais qui pourrait se révéler exacte en raison du nombre impressionnant d’observateurs que les Frères musulmans ont à leur disposition dans tout le pays. Néanmoins, si cette déclaration a permis aux partisans du candidat Mohamed Morsi de se réjouir avant l’heure, en se réunissant place Tharir dans la matinée de lundi, elle a, avant tout, permis aux Frères musulmans de préparer leurs arrières.

Dimanche 24 juin, jour de l’annonce officielle des résultats, le candidat Morsi est officiellement élu.

L’armée, acteur du scrutin

A l’occasion de ce deuxième tour de la présidentielle, ce ne sont pas seulement deux candidats qui se sont opposés, mais bien deux candidats sous le regard insistant d’une armée plus que présente. L’armée, au pouvoir depuis la chute d’Hosni Moubarak et très hostile aux Frères musulmans – et plus largement aux islamistes – n’avait elle-même pas attendu que les résultats soient tombés pour prendre toutes les précautions nécessaires afin de réduire les pouvoirs du président. Au cas où le candidat islamiste serait élu.

La « déclaration » qui rend l’armée surpuissante

Alors que les bulletins étaient en cours de dépouillement, dans la soirée du dimanche 17 juin, le Conseil suprême des Forces armées (CSFA) avait rendu publique une « déclaration constitutionnelle » ayant pour objectif de réduire les pouvoirs du président, de rendre l’armée indépendante du pouvoir et de décaler dans le temps, une fois de plus, le transfert de tous les pouvoirs à une autorité civile.

Quelques jours après avoir dissout l’Assemblée nationale, élue en janvier dernier et composée d’islamistes à 70%, en s’appuyant sur une décision de la Cour suprême constitutionnelle, cette « déclaration constitutionnelle » a des allures de coup d’Etat pour de nombreux observateurs.

L’armée, qui s’est emparée du législatif depuis la dissolution de la Chambre basse du Parlement, aura désormais un regard et un droit de véto sur la formation de l’Assemblée constituante et donc sur la  rédaction de la Constitution qui sera ensuite proposée au peuple par référendum.

Selon cette déclaration, le président élu n’aura pas autorité sur le Conseil suprême des Forces armées qui nommera directement le ministre de la Défense et se chargera du budget de l’armée – un budget qui était également autonome sous Hosni Moubarak.

Alors que l’armée avait promis, il y a quelques mois, de transférer définitivement les pouvoirs qu’elle détenait à un gouvernement civil à compter 1er juillet, cette déclaration est une preuve de plus que le CSFA n’est pas prêt à sacrifier ce pouvoir que l’armée détient depuis janvier 2011.

Vers une guerre entre armée et Frères musulmans ?

Première force du pays, l’armée détiendrait environ 40% du PIB de l’Egypte. Durant l’intérim qu’elle a assuré à la tête du pays, l’armée s’est largement chargée d’assurer la sécurité de son trésor en cas de transfert du pouvoir. Désormais, elle attend, en échange de sa bienveillance, des garanties de la part du futur président avant de lui remettre officiellement le pouvoir. Si cette garantie aurait été assurée par le candidat Ahmed Chafik, lui-même militaire, celle-ci ne le sera peut-être pas par Mohamed Morsi dont le parti a été largement maltraité durant les trois décennies du régime d’Hosni Moubarak. Si le candidat islamiste a assuré qu’il serait le président de tous les Égyptiens, sans aucune rancune, sa relation avec l’armée sera évidemment source de résistances.

Tous ces éléments laissent imaginer que la tension ouverte qui opposent l’armée aux Frères musulmans pourrait aboutir à de réels affrontements. Si, actuellement, le candidat Mohamed Morsi a appelé à la réserve, les tentatives de détournement du pouvoir opérées par l’armée, si elles semblent favoriser certains groupes politiques très peu représentés à l’Assemblée jusqu’à aujourd’hui, restent une offense à l’idéal démocratique dont se revendiquaient les manifestants place Tahrir pendant la révolution. 

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