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Le fantasme de la femme-soldat

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Filles armées en Israël

Une photo a fait un véritable buzz récemment : une jeune Israélienne, en bikini, sur une plage bondée. Avec, soit dit en passant, un fusil d’assaut harnaché dans le dos. La légende de la photo ? « Uniquement en Israël. » Tout est dit. Parce que c’est uniquement en Israël que les jeunes filles peuvent afficher leurs fantasmes cachés de James Bond girl.

Voici une expérience que j’ai vécue récemment. J’étais en voyage à Tel-Aviv. Dans le train je me suis retrouvé assise à côté d’une très jolie femme. Armée. Je savais pourtant bien qu’en Israël, le service militaire ne concernait pas que les hommes. Seulement, je ne m’étais jamais retrouvée en compagnie d’une femme armée dans les transports en commun, aussi séduisante soit-elle. Ce n’est pas le genre de choses qui se produisent dans le New-Jersey.

Tandis que j’ôtais mon sac à main, elle posait son fusil. Puis, j’ai retiré mes lunettes de soleil. Elle, relâchait sa lourde ceinture militaire.

« Service militaire », se sentit-elle alors obligée de préciser.

« Vacances », lui ai-je répondu.

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C’est amusant cette faculté qu’ont les femmes de parler de manière étonnamment concise lorsqu’elles ont un fusil entre les mains. Je ne me suis pas sentie nerveuse à côté de cette jeune femme de 18 ans armée jusqu’aux dents. Ni même d’ailleurs en sécurité. Ce que j’ai ressenti, dans ma robe d’été et mes talons hauts, c’est un sentiment diffus, tenace, d’infériorité. Encore heureux qu’elle n’était pas en bikini.

Un nouveau fantasme ou une histoire de maths ?

Et puis, quel est le sens de tout ce raffut autour des armes et des bikinis de toute façon ? Où est passée l’idée que les hommes sont naturellement disposés à vouloir protéger le sexe faible ? Pourquoi cette fascination masculine pour les femmes armées ? Pour Allison Kaplan Sommer, qui s’est fendue d’un article de blog sur Haaretz pour commenter la fameuse photo, ce n’est pas le fusil qui est en cause, pas plus que le bikini. C’est la combinaison des deux. Il faut croire qu’Angelina Jolie et Megan Fox avait tout juste depuis le début.

« J’ai été quelque peu fascinée par cette fascination. Les photos de filles en bikini ne sont pas rares, pas plus que les photos de militaires. Mais combinez les deux, et vous aurez l’attention de tout le monde. La conjonction d’un corps féminin exposé à des armes semble impacter profondément sur le monde du fantasme masculin. Et même quand les filles sont complètement habillées d’ailleurs : il suffit de faire une recherche Google. Après, il y a d’autres pays avec beaucoup de femmes soldats, comme aux Etats-Unis. Mais en Israël, la conséquence du service militaire obligatoire, c’est que lorsque vous avez des cohortes de jeunes femmes de 18 ans dans l’armée, vous en aurez forcément une certaine proportion très attrayante. »

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Une simple question de maths donc ? Israël, après tout, est le seul pays de la planète où tous les jeunes de 18 ans doivent faire un service militaire : trois ans pour les hommes, deux pour les femmes. Et l’armée attend d’eux qu’ils aient leur arme avec eux en permanence, même quand ils ne sont pas en service. Perdre une arme est sévèrement puni.

Un enjeu majeur pour les Israéliens

Pourtant, Haaretz a récemment accusé ces jeunes militaires d’exhiber leur arme pour impressionner, voire séduire. Une mauvaise utilisation du matériel de l’armée, certes, mais ce n’est là que l’un des nombreux problèmes auxquels est confrontée l’IDF (Israeli Defence Force). Ainsi, près de 20 000 Israéliens ont récemment défilé à Tel-Aviv pour manifester en faveur de l’abrogation de la disposition légale qui permet aux hommes juifs ultra-orthodoxes d’être exemptés de service militaire afin de poursuivre des études religieuses.

Le dimanche suivant, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a donné son feu vert à des réformes qui mettrait fin à cette exemption, a rapporté Reuters. Mais on en revient toujours à la question des jolies militaires en bikini. Lorsque j’ai demandé à un ami ce que l’afflux potentiel de ces soldats ultra-orthodoxes pouvait signifier pour l’armée, il m’a répondu, sourire en coin : « Pas grand-chose à mon avis. Les juifs orthodoxes ont leurs propres plages. »

Global Post / Adaptation Charles El Meliani pour JOL Press

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