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Morsi peut-il changer la vie des Palestiniens?

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L’unité palestinienne en ligne de mire

Mohamed Morsi, le nouveau Président d’Egypte, Frère musulman, peut-il apporter la paix au Proche-Orient ? A Gaza, officiels, analystes et militants s’accordent en tous cas pour dire que l’homme d’Etat a au moins quelques clés en main pour faire des progrès à cette fin. Ainsi, Mohamed Morsi pourrait contribuer à réunir les deux factions rivales palestiniennes, le Hamas et le Fatah.

Les deux sont des ennemis acharnés, et ont même brièvement lutté en 2007 au cours d’une sanglante guerre civile qui a laissé Gaza entre les mains du Hamas, et la Cisjordanie sous le contrôle du Fatah. Cette rupture au sein des territoires palestiniens a encore contribué à bloquer les négociations avec Israël, qui refuse de négocier avec le Hamas. 

L’année dernière, en plein cœur des soulèvements arabes, les deux factions ont signé un accord, mais il n’a pas fait long feu, chaque partie s’accusant mutuellement d’avoir fait machine arrière sur des points clé de celui-ci. Ainsi, le Hamas reproche à son rival de ne pas lui avoir fourni la liste de prisonniers politiques détenus en Cisjordanie demandée tandis que le Fatah considère que les efforts du Hamas pour recenser les électeurs dans la bande de Gaza sont insuffisants, ce qui retarde les nouvelles élections.

Mais au-delà de ces deux problèmes, c’est la restructuration de l’Organisation de Libération de la Palestine, organisme représentatif de tous les Palestiniens, y compris ceux de la diaspora, qui est à l’ordre du jour.

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Des observateurs indépendants, mais aussi des officiels des deux côtés de cette fracture, s’attendent à ce que le Président égyptien, nouvellement élu, contraigne les rivaux à s’unir et à former un gouvernement intérimaire. Avec, à terme, la fin potentielle du blocus imposé par Israël aux territoires palestiniens et la réouverture à la frontière égyptienne du terminal de Rafa.

Ainsi, le docteur Sabri Saidam, administrateur général du Conseil révolutionnaire, le corps législatif interne du Fatah, déclare que « Morsi peut détenir les clés d’une réconciliation, ou du moins jouer le rôle de catalyseur [entre les deux factions]. »

Mahmoud Abbas, le leader du Fatah et Président de l’Autorité palestinienne, doit rencontrer Mohamed Morsi au Caire ce mercredi 18 juillet. Sabri Saidam précise : « Il est clair qu’une nouvelle ère commence en Egypte. […] Peut-être que Morsi mettra l’énergie qu’il faut pour obtenir une réconciliation. »

Le problème américain

Mais d’autres doutent que Mohamed Morsi soit capable de tenir tête aux Etats-Unis, qui catégorisent le Hamas comme une organisation terroriste, et qui pourraient bien empêcher l’Egyptien de faire le moindre progrès significatif. Ceci dit, lors d’une réunion Samedi dernier avec le chef d’Etat, Hillary Clinton, la secrétaire d’Etat américaine, a appelé les deux factions à faire la paix, sous entendant de ce fait qu’il pourrait y avoir une place pour le compromis.

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Eyad Sarraj, un psychiatre palestinien qui est impliqué dans les pourparlers et qui a contribué à la signature des accords de Camp David en 2000, livre ainsi son analyse : « Ce doit être un bon deal. Morsi doit dire aux Américains qu’il ne peut pas accepter le siège de Gaza et la division des Palestiniens. Il doit leur dire qu’il en veut la fin, qu’il n’est pas Moubarak et que si les Etats-Unis veulent avoir des relations avec l’Egypte, ça doit se passer comme ça et pas autrement. […] Il y a à mon sens de bonnes chances que les Américains acceptent. »

Les Palestiniens espèrent que Mohamed Morsi trouvera la force de sortir de l’impasse du passé, qu’il sera un négociateur neutre et ferme, moins redevable aux puissances étrangères qu’Hosni Moubarak.

La fin du blocus ?

Les dirigeants du parti de Mohamed Morsi, Liberté et Justice, considèrent qu’unir les factions palestiniennes est une priorité absolue afin de mettre un terme aux souffrances des Palestiniens, qui subissent un blocus israélo-égyptien qui empêchent la libre circulation des personnes et les exportations. Chaque jour, seul un millier de personnes traverse la frontière. En revanche, le commerce n’est lui pas permis et seuls passent ponctuellement des convois humanitaires.

« C’est pour cela que la réconciliation est indispensable, le blocus étant la conséquence directe de la division entre le Hamas et le Fatah », analyse Rahman Saeed Al Shourbagy, le chef de Liberté et Justice dans la province du Nord Sinaï. « Cela apporte de la souffrance au peuple palestinien, et Morsi ne tolèrera pas l’injustice tant qu’il sera au pouvoir. »

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Le Hamas, qui est une sorte d’émanation des Frères musulmans, s’attend à ce que Mohamed Morsi le soutienne dans la Bande de Gaza. Ainsi, Ismaël Haniyeh, dirigeant du Hamas, a appelé l’Egypte à la rescousse lors de l’inauguration, la semaine dernière, de nouvelles infrastructures au niveau du passage de Rafah :

« Nous appelons l’Egypte à faire en sorte que ce passage soit ouvert en permanence, jour et nuit, et que les restrictions qui pèsent sur lui soient levées. […] Nous voulons que [Rafah] soit un point de passage commercial entre Gaza et l’Egypte. Nous voulons écrire une nouvelle page avec l’Egypte. […] Les Egyptiens ont toujours été avec les Palestiniens, et le sont encore. Nous avons besoin de la force de la place Tahrir pour nous libérer. »

L’Egypte d’abord, la Palestine ensuite

Mais tout le monde ne partage pas cet enthousiasme. Ainsi, un officiel de l’ONU à Gaza, qui a requis l’anonymat, doute : « Les Palestiniens sont trop optimistes quant aux capacités de l’Egypte à changer leur vie quotidienne. » Pour lui, l’Egypte et Mohamed Morsi font face à de bien trop importants enjeux nationaux pour se concentrer pleinement sur la question palestinienne.

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Le problème de l’armée, l’économie déficiente, le faible soutien international à son gouvernement, ou encore la question de la nouvelle constitution sont autant de problématiques prioritaires par rapport au blocus.

Eyad Sarraj le reconnaît lui-même : « Il faut ramener un peu de calme en Egypte. Laissez d’abord Morsi mener à bien ses 100 premiers jours. […] Ensuite, il sera possible de s’occuper de la Bande de Gaza et du Hamas. Car c’est toujours une question très importante aux yeux de la Confrérie. »

Global Post / Adaptation Charles El Meliani pour JOL Press

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