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Les ambassadeurs découvrent le monde vu par François Hollande

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C’est le romancier Laurent Binet qui en fait le constat dans son récit de la campagne hollandaise – Rien ne se passe comme prévu -, l’orateur François Hollande serait un peu comme un diesel, lent au démarrage, et ses discours débutent souvent péniblement pour terminer dans de grandes élancées lyriques et des messages forts.

Ce fut le cas lors du discours présidentiel prononcé en ouverture de la 20ème conférence annuelle des ambassadeurs, lundi 27 août, à l’Elysée. Après près de 40 minutes de discours, le président de la République a donné, avec force et détermination, son point de vue sur les quatre sujets, selon lui, les plus brûlants de l’actualité diplomatique.  

« Bachar al-Assad doit partir »

« Le principe est simple : Bachar al-Assad doit partir. Il n’y a pas de solution politique avec lui. Il constitue une menace, il continue avec une violence inouïe à massacrer la population, à détruire les villes et à provoquer la mort de femmes et d’enfants, nous en avons encore la preuve ces derniers jours, », a lancé le président de la République.

A plusieurs reprises, il a dénoncé les effets négatifs de l’attitude de la Russie et de la Chine, soutiens du régime au pouvoir et, notamment, le blocage que cela générait au sein des instances de l’ONU – et du Conseil de sécurité en premier lieu. François Hollande a appelé Moscou et Pékin à revoir leurs positions.

Il a aussi indiqué que la France reconnaitrait le gouvernement provisoire dès que celui-ci serait formé. Une semaine après Barack Obama, il a indiqué que l’utilisation d’armes chimiques par les forces de Bachar al-Assad justifierait une réaction internationale sous la forme d’une intervention militaire.

Le nucléaire iranien et le conflit israélo-palestinien

Le programme nucléaire iranien, sans finalité civile crédible, constitue une menace pour tous les pays de la région – en particulier pour Israël tant que, à Téhéran, resteront au pouvoir des hommes qui, comme le président Mahmoud Ahmedinejad appellent à la destruction d’Israël.

François Hollande estime que « la position de la France est claire : il serait inacceptable que l’Iran se dote de l’arme nucléaire ». Le Président entend, toutefois, que soit privilégiée la voie de la négociation et que, si nécessaire, de nouvelles sanctions soient envisagées.

La résolution du conflit israélo-palestinien reste, pour la France, la clé de la stabilité au Proche-Orient. Celle-ci « ne peut s’accomplir qu’en reconnaissant aux Palestiniens le droit à l’autodétermination et en garantissant à Israël sa sécurité. Une solution durable du conflit israélo-palestinien passe par une paix négociée sur toutes les questions, » a affirmé François Hollande. Il a également fait part de son inquiétude au regard des événements récents au Sinaï et a déclaré qu’il faisait « confiance à l’Egypte et à son nouveau président, issu d’un choix démocratique, pour jouer tout le rôle qui doit être le sien dans la région, au service de la paix, mais dans le respect de ses engagements internationaux ».  

La lutte contre le terrorisme : de l’Afghanistan au Sahel

Tout d’abord sur l’Afghanistan et le retrait des troupes françaises : « C’était un engagement que j’avais pris, il s’applique conformément à la décision que j’ai adoptée au lendemain de mon élection, » a rappelé François Hollande. A la fin du mois d’août, 650 soldats français seraient rentrés et 2000 autres le seront d’ici à la fin de l’année. La France restera présente en Afghanistan mais sous d’autres formes.

Mais, dans la lutte contre le terrorisme, c’est le Sahel qui préoccupe le président de la République : « Au nord du Mali s’est constituée une entité terroriste assumée et revendiquée comme telle, qui lance un défi à nos intérêts, à nos valeurs, à notre population. Ce défi, nous y répondons ».

Quelles réponses y apporter ? « La France est directement concernée, non pas dans les formes que nous avons pu connaître, mais en tout cas, nous aurons à agir, non pas par les interventions d’hier – ce temps-là est révolu – notre rôle consiste à appuyer nos partenaires africains ; ce sont eux qui doivent prendre l’initiative, la décision, la responsabilité, et les organisations régionales, dans les actions qu’ils souhaitent mener. Mais notre mission sera à ce moment-là d’appuyer leur action dans le cadre des Nations unies et de ce que décidera le Conseil de sécurité ».  

Un plaidoyer pour l’Europe

L’Europe demeure-t-elle une question de politique étrangère ? Non, plus véritablement. Mais, il n’en reste pas moins qu’elle exige de faire preuve de trésors de diplomatie – et que pour cela la France compte aussi sur ses diplomates en poste dans les 27 – et bientôt 28 – pays de l’Union.

François Hollande a rappelé que « la France est totalement déterminée à agir pour l’Europe et pour préserver l’euro. L’euro est irréversible car il s’agit d’un engagement fondamental. Sa défense ne se résume pas à un simple calcul financier, non, elle est la condition de la gouvernance économique. »

Union économique et union politique aussi. Le président de la République privilégie ce qu’il appelle « l’intégration solidaire ». A chaque étape, des mécanismes nouveaux doivent être accompagnés par des avancées démocratiques. Cela passe aussi par le renforcement de l’Eurogroupe et de son président.

Un plaidoyer pro-européen, peu surprenant chez un ancien « bébé Delors ». Pourtant, celui-ci a bien pris soin de ne pas utiliser les termes de « fédéralisme » ou « fédéralisation » – même si l’essentiel de ses propositions vont dans cette direction.

Les grands principes du hollandisme en politique étrangère

François Hollande a décrit un monde instable et incertain avec cette crise qui fragilise les pays les plus pauvres. Dans ce contexte, il importe, selon lui, de ne pas fléchir sur les grands principes de la politique étrangère française telle qu’elle s’est développée tout au long de la Vème République.

La France doit plus que jamais se placer en exemple. Ainsi, la place de la France serait plus que jamais liée à ses valeurs universelles – droits de l’homme, démocratie, laïcité, égalité entre les hommes et les femmes – qu’elle doit continuer à défendre pour rester un pont entre les nations, un médiateur entre les civilisations. Mais, la France doit aussi s’appuyer sur ses partenaires traditionnels – l’Europe en premier lieu – et s’inscrire dans le cadre des institutions internationales.

La foi fortement affirmée dans les institutions internationales et leur prévalence est sans doute un élément caractéristique fort du discours de politique étrangère qu’avait développé la gauche et le Parti socialiste au cours de ces dernières années et que reprend à son compte François Hollande. La gouvernance mondiale doit s’appuyer sur des structures de débat et d’action fortes – et qui doivent être renforcées -, avec l’espoir d’un gouvernement mondial. Un choix à l’opposé de la diplomatie de la canonnière et qui, quand il se cantonne à la déclaration d’intention, peut passer pour faible ou utopique.

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