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Grèce: un geste de l’Eurogroupe ou le défaut de paiement dans 4 jours

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Les ministres des Finances de la zone euro se retrouvent à Bruxelles lundi 12 novembre pour une énième réunion de l’Eurogroupe consacrée à la dette grecque. Sauf coup de théâtre, les deux tranches de prêt – respectivement de 31,2 et 5 milliards d’euros – ne seront pas débloquées, mais il faudra trouver un accord avec la BCE afin d’éviter un défaut de paiement de la Grèce vendredi 16 novembre.

Budget 2013 : toujours plus de rigueur pour les Grecs

In extremis, dans la nuit de dimanche 11 novembre à lundi 12, le Parlement grec a voté, à une majorité de 167 voix sur 300, le budget pour 2013 ; un budget qui prévoit de nouvelles mesures d’économie et impose une rigueur extrême. Le dilemme auquel étaient confrontés les députés grecs était le même que depuis le début de la crise de la dette en 2010 : accepter 9 milliards d’euros d’économie pour 2013 et une sixième année consécutive de récession, ou risquer de placer le pays en défaut de paiement dans un délai de quelques jours.

Le budget a recueilli 167 voix sur les 168 sur lesquelles il pouvait compter – à savoir le total des élus des trois groupes qui soutiennent la coalition (la droite Nouvelle Démocratie, les socialistes Pasok et la gauche démocrate Dimar). Les 128 députés de l’opposition ont voté contre et quatre se sont abstenus.

Le Premier ministre Antonis Samaras a réussi à maintenir la cohésion de sa coalition, déjà testée lors du vote, il y a quatre jours, de la loi pluriannuelle de rigueur adoptée par une courte majorité de 153 voix. « Le deuxième pas décisif a été fait, maintenant, c’est l’heure de la croissance et de la reprise », a martelé Antonis Samaras en sortant du Parlement, faisant allusion à un premier vote de mercredi sur des économies de 18 milliards d’ici 2016.

Une nouvelle tranche de prêt de 31,2 milliards d’euros

Depuis juin, les bailleurs de fonds internationaux de la Grèce retiennent une nouvelle tranche de prêt de 31,2 milliards d’euros afin de contraindre le pays à adopter un programme d’ajustement budgétaire musclé. Aujourd’hui, les caisses athéniennes sont vides et, vendredi 16 novembre, l’État doit rembourser des bons du Trésor de 5 milliards d’euros.

Le ministre des Finances Yannis Stournaras avait assuré que l’adoption de cette nouvelle purge allait garantir un déblocage « à temps » des prêts de l’UE et du FMI. « La Grèce est arrivée au bout de ses forces », a, pour sa part, déclaré le chef du Pasok, Evangelos Venizelos, en appelant à une résolution du problème lors de la réunion à Bruxelles des ministres des Finances de la zone euro, ce lundi 12 novembre.

L’opposition grecque appelle à l’effacement de la dette

Alexis Tsipras, chef de la coalition de gauche radicale Syriza et leader de l’opposition, s’est inquiété de la situation de la dette. « La dette n’est pas soutenable, seule Mme Merkel le croit », a-t-il dit, en renouvelant sa proposition « d’un effacement de dette avec clause de croissance ».

Ce sera précisément une des principales revendications de la journée de grèves et de manifestations anti-austérité pan-européennes du mercredi 14 novembre, qui vont surtout toucher les pays du sud de l’Europe. Alexis Tsipras a appelé à une « solution globale pour l’effacement d’une grande partie de la dette de ces pays ».

Pas de déblocage de la nouvelle tranche de prêt

Le vote de nouvelles mesures d’économie et d’un budget de rigueur ne saurait néanmoins suffire à ce que, dès ce lundi, les ministres des Finances de la zone euro débloquent la nouvelle tranche de prêt.

Après avoir patienté depuis le début de l’été, ceux-ci devraient pouvoir prendre connaissance de l’essentiel du rapport de la troïka, établi par la Commission européenne, la BCE et le FMI. Et puis, il leur faudra se mettre d’accord… La directrice générale du FMI, Christine Lagarde prône une restructuration de la dette du pays par les créanciers officiels. Le président de la BCE insiste sur le fait qu’il ne lui est pas possible de prendre des pertes sur son portefeuille de quelques 45 milliards d’obligations grecques. Le commissaire européen Olli Rehn multiplie, pour sa part, les appels à « alléger le fardeau de la dette grecque ».

N’ayant pas eu avant ce lundi les documents de la troïka sur la mise en œuvre du programme en Grèce, les ministres européens ne pourront pas se prononcer et débloquer les tranches de prêts. Certains d’entre eux n’auront pas eu la possibilité de solliciter l’avis de leur parlement – c’est le cas des Allemands.

Vers un reprofilage de la dette

Ce lundi soir, la troïka confirmera que toutes ses évaluations sont fondées sur un report de deux ans de l’échéance du programme grec. Cet allongement ne saurait être en option.

La troïka devrait donner des indications sur le coût de cet allongement – on parle de 15 à 20 milliards d’euros -, mais le FMI, la BCE et la Commission européenne ne sont pas d’accord sur l’analyse de la viabilité de la dette, autrement dit sur la trajectoire de réduction de celle-ci et la possibilité ou non de la ramener à 120 % en 2020 ou comme le réclament les Européens en 2022.

Le dossier grec devrait être découpé en trois volets : les conditions, le financement, la soutenabilité de la dette. Les ministres des Finances devraient sur le premier volet acter des efforts entrepris par la Grèce pour faire face à ses devoirs. A-t-elle voté les réformes structurelles réclamées, a-t-elle pris les mesures budgétaires voulues ? Le temps d’analyser les votes, le feu vert formel à l’accord entre la troïka et le gouvernement grec sur le nouveau programme serait donné par téléconférence jeudi 15 novembre.

Sur le financement nécessaire à l’allongement du programme de deux ans, les ministres doivent commencer à évoquer le reprofilage de la dette via des réductions de taux d’intérêt, des rachats d’obligations, des allongements des maturités. Cela sera-t-il suffisant pour rendre la dette grecque « soutenable » ?

Un accord avec la BCE pour échapper au défaut de paiement

Parallèlement, le gouvernement grec devrait négocier un accord de court terme avec la BCE pour éviter le défaut de paiement vendredi 16 novembre. Celle-ci devrait accepter de retarder l’échéance d’un mois environ, si elle est convaincue de la bonne volonté des États à poursuivre leur aide à la Grèce. Athènes a d’ailleurs décidé vendredi de procéder à un emprunt de 3 milliards d’euros à court terme pour rembourser en partie sa créance. « La Grèce fait ce qu’elle a à faire, et l’Europe le fera aussi, la tranche d’aide sera versée », a ainsi assuré le ministre grec des Finances, Yannis Stournaras. Optimiste.

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