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État-providence: la France doit réviser son effort redistributif

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Le système français de prestations sociales a deux failles, au moins…

Première faille, la France distribue davantage que ses partenaires au regard des moyens dont elle dispose : si l’on prend en compte ses dépenses par rapport au PIB, les chiffres d’Eurostat pour 2010, la France se retrouve, juste derrière le Danemark, en tête des 27 pays de l’Union européenne. À la source du mal, un PIB français qui était, en 2010, plus de 20% en dessous de celui des Pays-Bas, 14% en dessous de celui du Danemark et de la Suède, encore plus si l’on ne prend en compte que le PIB marchand, 6% en dessous de l’Allemagne, légèrement inférieur au PIB anglais et… très supérieur au PIB italien.

Deuxième faille, la France distribue mal : la couverture des différents risques est appréhendée de manière séparée et les revendications d’assistance s’accumulent au gré de la conjoncture.

Pour l’iFRAP, think tank dédié à l’analyse des politiques publiques et laboratoire d’idées innovantes, la France est trop dépensière.

Rappel : ce que l’on entend par prestations sociales

Les prestations sociales désignent toutes les prestations en espèces (revenu de remplacement, ex : indemnités journalières) ou en nature (remboursement des dépenses engagées ou financement direct de services) que les institutions de protection sociale versent à leurs bénéficiaires. Elles constituent une des formes de la redistribution des revenus et représentaient, en 2009, 31,3 % du produit intérieur brut.

Les comptes de la protection sociale, publiés annuellement, distinguent six catégories de prestations correspondant à autant de risques :

· le risque « vieillesse-survie » : c’est le plus important, avec 45,5 % des prestations en 2009, en raison du poids des retraites ;

· le risque « santé » : inclut la maladie, l’invalidité, les accidents du travail et les maladies professionnelles. En 2009, il représentait 35 % des prestations servies ;

· le risque « maternité-famille » : inclut notamment les indemnités journalières pour maternité, les soins aux femmes enceintes et les différentes prestations familiales (allocations familiales, aides à la garde d’enfant). Il représentait 9 % des prestations en 2009 ;

· le risque « emploi » : c’est-à-dire l’indemnisation du chômage, les aides à la réadaptation et la réinsertion professionnelle, les préretraites, soit 6 % des prestations ;

· le risque « logement » : il recouvre les différentes aides versées aux ménages pour faire face à leurs dépenses de loyer ou de remboursement d’emprunt, soit 2,7% des prestations ;

· le risque « exclusion sociale », essentiellement pris en charge par le revenu de solidarité active (RSA), généralisé à l’ensemble du territoire le 1er juin 2009, constitue 1,8 % des prestations.

Dans tout cela, il convient de distinguer les prestations sans condition de ressources – chômage ou suivi du parcours professionnel – des prestations sous conditions de ressources – l’aide au logement, par exemple.

Prestations sans conditions : le poids croissant des dépenses liées au chômage

En 2010, avec 557 euros par tête et 42,5 milliards d’euros, c’est le chômage qui est comparativement en France la dépense la plus importante de tous les pays. Seul le Danemark y consacre davantage, avec 864 euros par habitant.

Pour l’iFRAP, les raisons de cette tendance sont connues : la hausse continue du chômage et une indemnisation avantageuse des chercheurs d’emploi, même si des mesures ont été prises au cours des cinq dernières années pour en alléger le coût – et en accentuer l’efficacité en termes de retour au travail.

Le niveau élevé de ces dépenses au Danemark s’explique par un dispositif unique – coûteux mais efficace, semble-t-il – de suivi du parcours professionnel.

Prestations sous conditions : un effort de redistribution brouillon

La France se distingue par l’importance des prestations sous conditions de ressources en espèces. Elle est même en tête de l’Europe à 27, puisqu’elle y consacre 545 euros par tête sur les 906 euros totaux (avec ou sans conditions).

Cette pratique française repose sur un principe simple et fâcheux : lorsqu’un besoin est identifié comme justifiant une prestation sous conditions de ressources, une somme forfaitaire y est attribuée et elle vient s’ajouter à l’ensemble des prestations distribuées par ailleurs. Ces allocations forfaitaires n’ont pas forcément de rapport avec les besoins des bénéficiaires et elles viennent s’ajouter aux minima sociaux.

L’iFRAP cite l’ARS – Allocation de rentrée scolaire – qui vient d’être augmentée de 25% pour atteindre des chiffres sans rapport avec les dépenses de rentrée scolaire. Le dispositif a été, à cette occasion, utilisé pour accorder un surplus de pouvoir d’achat aux familles, l’équivalent de 2 840 000 Français en 2012 – et une proportion importante n’a même pas retourné le certificat de scolarité exigé. Aucun contrôle n’est effectué – et ne pourrait être effectué sur l’utilisation précise de cet argent.

Ce que l’iFRAP propose…

« Ces pratiques d’assistance, dont on ne connaît pas le montant cumulé, exaspèrent à juste titre les Français. À côté des prestations en nature, il serait souhaitable de régler le problème des allocations annexes aux minima sociaux par une allocation unique censée représenter globalement l’effort de redistribution de la France envers les plus démunis, que ces derniers, comme le restant des Français, seraient libres d’utiliser comme ils l’entendent. Ceci éviterait d’avoir à répondre à des revendications d’assistance s’additionnant sans fin les unes aux autres au gré de la conjoncture. »

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