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Référendum égyptien: ultime mobilisation de l’opposition

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Vendredi 14 décembre au Caire. Les forces politiques sont mobilisées pour une dernière journée de rassemblement avant le référendum sur le projet de constitution qui cristallise la société égyptienne depuis plusieurs semaines.

Deux camps face à face

Alors que les islamistes, et plus généralement les partisans du président Mohamed Morsi et de son projet pour le pays, sont réunis dans une mosquée près du palais présidentiel, les libéraux, laïcs, chrétiens et tous ceux qui se réclament du Front de salut national ont pris le chemin de la place Tahrir, en souvenir de ces mois de révolution 2011.

C’est la dernière ligne droite avant ce référendum que l’opposition menace de boycotter, après trois semaines de violences meurtrières qui ont fait au moins huit morts et plusieurs centaines de blessés, la plus grave crise depuis la révolution qui a mis fin à l’ère Moubarak.

C’est aujourd’hui au nom de cette révolution que les deux camps adverses s’opposent.

Les uns, islamistes, bannis de la société sous Hosni Moubarak, accusent l’opposition de pactiser avec l’ennemi en étant notamment composée de « feloul », comme sont appelés les partisans de l’ancien régime.

Les autres, laïcs, libéraux, nassériens, chrétiens coptes et « feloul », se sont regroupés dans un mouvement hétérogène uni autour d’une conviction : le projet de constitution proposé par l’Assemblée constituante, elle-même composée d’une majorité d’islamistes radicaux, est une menace pour la laïcité en Égypte.

Vers une dérive théocratique ?

« La coloration islamiste de cette nouvelle constitution est manifeste. Elle prévoit que la charia est la principale source de législation. Mais beaucoup d’autres articles ouvrent la voie à des interprétations abusives. Ainsi, l’État pourra intervenir pour préserver la « morale » et les « vraies valeurs de la famille égyptienne ». Une simple loi pourra conduire à des condamnations aux travaux forcés. Elle donne par ailleurs un pouvoir très étendu à l’institution religieuse Al Azhar, ce qui pourrait conduire à une dérive théocratique », explique Karim-Emile Bitar, directeur de recherche à l’Institut des relations internationales et stratégiques.

« Il y a un an, l’homme fort des Frères musulmans, Khairat El Shater, déclarait au New York Times qu’il fallait que le processus de rédaction de la nouvelle constitution soit très inclusif, et que les libéraux, la gauche, les femmes, les coptes, les syndicats et toutes les forces vives participent au processus. Il n’en a rien été. Ce projet constitutionnel est né à la suite d’obscures manœuvres, même les formes n’ont pas été respectées. Il en résulte un texte très médiocre et potentiellement dangereux », ajoute-t-il encore.

L’influence des Frères musulmans leur assure une avance de taille

L’enjeu est donc de taille pour les opposants et face à la mobilisation attendue, le gouvernement égyptien a demandé à l’armée de prendre en charge la sécurité des scrutins, dont la première partie se déroule le 15 décembre et la deuxième, le 22 décembre.

120 000 militaires ont ainsi été mobilisés et 6000 chars devraient être déployés dans les régions potentiellement dangereuses.

Les efforts de l’opposition paraissent vains. En effet, si de nombreux Égyptiens sont favorables à la laïcité, ils sont également nombreux à préférer faire le choix de l’abandon des armes pour offrir une chance à l’Égypte de sortir de sa révolution et de sa très longue phase de transition.

D’autre part, les Frères musulmans sont une confrérie très influente et très active en Égypte, notamment dans les régions rurales. Leur influence leur assure une avance de taille.

Une fois votée, la constitution égyptienne pourrait entrer en vigueur en 2013, avant la tenue des prochaines élections législatives.

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