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Les républicains face à la tentation de l’extrême droite

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Encore un moment-clé dans les annales de la démocratie américaine à la mode du XXIe siècle.

La falaise fiscale n’était pas une falaise, bien sûr, juste une métaphore – bien que, si l’on y ajoute des lemmings, ces petits rongeurs qui commettent des suicides collectifs en sautant des falaises, on obtient une description assez fidèle de la façon dont le Congrès nous a menés. Le meilleur exemple en reste la lutte nocturne menée à la Chambre des représentants pour adopter un projet de loi sur un budget qui mettrait fin aux allègements fiscaux pour les plus riches mis en place par George W. Bush.

Oh, bien sûr, nous élisons le Congrès, et donc, en fin de compte, c’est notre faute. Mais nous avions élu ces gens parce que nous étions convaincus qu’ils voulaient le meilleur pour notre pays. Les 9% d’approbation péniblement gagnés par le Congrès reflètent ce que l’électorat américain a constaté ces derniers jours, à savoir qu’entre amener le chaos économique sur le pays ou être réélu, la plupart des membres du Congrès choisiraient la réélection.

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« Donnez-moi la liberté ou donnez-moi la mort » – une notion bien pittoresque. Et qui s’applique aux dirigeants américains contemporains presque aussi bien que le choix de Cincinnatus s’appliquerait à l’Italie d’aujourd’hui – un héros romain antique qui avait décidé de renoncer à ses pouvoirs dictatoriaux pour retourner labourer ses champs.

Un Parti républicain méconnaissable

La sénatrice Olympia Snowe, qui a abandonné le Sénat à cause de sa frustration évidente face à ses dysfonctionnements et la politique partisane qui y règne, a récemment décrit la façon dont fonctionne le Congrès.

« Il s’agit de gouverner par reports, délais et blocages, dévoile-t-elle. Le Congrès pourrait arriver à trouver une solution, mais cela serait un processus très douloureux, et qui n’aboutirait pas forcément à une réussite, parce que nous ne mobiliserions pas toute la rigueur et la délibération que ce type de question exige. »

Mais la vraie raison de sa démission est certainement que le Parti républicain qu’elle représentait depuis 34 ans, d’abord à la Chambre des représentants, puis au Sénat, a changé au point de devenir presque méconnaissable.

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Polarisation vers l’extrême-droite

Ces jours-ci, selon la sagesse populaire, le pays serait de plus en plus polarisé, avant tout parce que le Parti démocrate serait devenu plus libéral et le Parti républicain plus conservateur. Pas vraiment. Les prises de position des démocrates sont restées les mêmes. C’est le déplacement des républicains vers l’extrême-droite qui est à l’origine de cette polarisation.

Le président Obama est tout aussi pragmatique et modéré que le président Clinton ou les présidents républicains avant lui, que ce soit dans son utilisation offensive des drones dans les relations internationales, que l’on a du mal à distinguer de la politique que George W. Bush suivait lors de son second mandat, ou dans son projet de loi sur la santé, que le président Nixon aurait tout aussi bien pu mettre en place.

Les républicains incohérents face à l’impôt

L’ironie tient dans le fait que la dette fédérale, à l’origine de tant d’angoisses chez la droite républicaine, est une conséquence directe des réductions d’impôts de Bush II, de ses deux guerres et de l’effondrement des finances qui a culminé sous son ère. D’autant plus que, souvenez-vous, Bush avait hérité des années d’excédents budgétaires accumulées par Clinton.

Les républicains se sont hissés eux-mêmes comme défenseurs des réductions d’impôts,  à la manière de Grover Norquist. Pourtant, il seraient aussi prêts à sculpter le visage de Ronald Reagan sur le Mont Rushmore, celui-là même qui avait augmenté des impôts plus d’une douzaine de fois, et qui appliquait avec frénésie, tant les valeurs les plus conservatrices, que les politiques centristes les plus basiques, ce qui, aujourd’hui, lui vaudrait d’être frappé d’anathème par les membres du Tea Party s’ils ne se cachaient pas constamment derrière des théorie révisionnistes sur la présidence de Reagan.

Bien sûr nous finirons par y arriver – éviter les mises sous sequestres et les coupures massives dans le budget qui condamneraient notre économie. Mais comme le dit la sénatrice Snowe : « Cela ne sera pas bien fait. » Idem pour la falaise que représente le plafond de la dette, et qui se profile à l’horizon, de plus en plus menaçante.

Et pardon pour ce pessimisme – qui n’est certainement pas ce que vous comptiez célébrer en ce début d’année.

GlobalPost / Adaptation : Antonin Marot pour JOL Press

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