Site icon La Revue Internationale

Mali: le timide soutien à la France n’honore pas les Européens

[image:1,l]Des difficultés à l’allumage. C’est à cela, tout du moins, que s’apparente la passivité de la réaction des alliés occidentaux de la France depuis le début de son intervention au Mali. Principaux accusés, les partenaires européens et Bruxelles dont les silences comme les timides déclarations de soutien traduisent une profonde incompréhension des enjeux de ce conflit. Car ce qui se joue au Mali, en Algérie et dans l’ensemble du Sahel va bien au-delà de la solidarité entre membres de l’Union…

Mais à quoi joue l’Europe ?

Samedi 12 janvier, de retour de Marseille, capitale européenne de la culture 2013, Manuel Barroso faisait une halte à l’Élysée. À la sortie de sa rencontre avec François Hollande, le président de la Commission se contentait de saluer l’action des forces françaises au Mali et en Somalie. Fermez le ban.

Mardi 15 janvier, tout en exprimant, à l’unanimité, leur soutien à l’intervention française au Mali les membres du Parlement européen ont regretté l’incapacité de l’Union européenne à agir collectivement pour assurer sa sécurité à sa porte. La Haute représentante de l’UE pour les Affaires étrangères, la Britannique Catherine Ashton, s’est contenté de remercier les États engagés au Mali et « notamment la France », avant d’annoncer l’adoption prochaine par l’Union d’un plan de soutien logistique et humanitaire à Bamako. Indécente illustration de l’inutilité de cette charge et de l’impuissance – restons courtois – de celle qui l’a détient.

À défaut d’avoir les moyens d’agir directement, l’Union européenne et ses institutions pourraient au moins favoriser la définition d’une position et d’une réponse communes à une menace commune. Il n’en est rien.

À quoi jouent les Européens ?

Une preuve supplémentaire en a été apporté, jeudi 17 janvier, lors de la réunion des ministres des Affaires étrangères de 27, convoquée à Bruxelles. Certes, dès l’ouverture de la rencontre, les ministres ont, chacun leur tour, sans exception, manifesté leur solidarité envers la France. Certes, les mêmes se sont empressés de donner leur feu vert à l’établissement de la mission de formation des militaires maliens prévue en décembre dernier – le déploiement de quelque 250 instructeurs européens pour former 4 des 8 bataillons de l’armée malienne dès la mi-février. Mais, c’est tout et c’est peu.

À son arrivée à Bruxelles, Laurent Fabius avait pourtant souligné que « la France était au Mali un pays précurseur, mais que tous les pays étaient concernés », et qu’il « était normal que la solidarité européenne s’exprime ». D’élan enthousiaste – ou simplement responsable – de solidarité, il n’y en a pas eu. Et le ministre français n’aura été soutenu que timidement – pour ne pas écrire « lâchement ».

Ainsi, David Lidington, ministre britannique des Affaires européennes – remplaçant William Hague, ministre des Affaires étrangères, fort occupé en Australie ces jours-ci – se sera-t-il contenté de rappeler que le Royaume-Uni avait déjà fourni le support logistique réclamé, en mettant deux avions de transport C-17 à la disposition des Français avant de promettre flegmatiquement un « fort soutien britannique à l’intervention française ».

« Une intervention française »… plus qu’une question de vocabulaire

Intervention, le mot, bien que correct au regard du vocabulaire militaire, paraît bien faible. Dès samedi, le président de la république n’a pas mâché ses mots puisqu’il a osé parler de « guerre », une « guerre contre les terroristes ». Et s’il rechigne encore à abuser du terme « islamistes », il n’a pas minimisé, non plus, les buts de guerre. Lors de sa visite à Abu Dhabi, aux Émirats arabes unis, lundi 14 janvier, il a clairement indiqué que, si la sauvegarde du Mali, qui avait appelé au secours, avait motivé l’engagement des forces françaises, l’objectif était désormais de « détruire les terroristes » qui menacent l’équilibre de la région et, au-delà, la sécurité de la France, de l’Europe et du monde.

Intervention française peut-être, mais objectifs bien plus globaux, par lesquels on pourrait espérer nos partenaires de l’Union européenne davantage concernés. Et puis, depuis la prise d’otages en Algérie, d’autres pays que la France ne sont-ils pas à leur tour concernés par ce qu’il se passe au Sahel ? Car si, pour des raisons diplomatiques, le lien entre l’Algérie et le Mali n’est pas encore établi, ce serait folie que de ne pas faire le lien – ne serait-ce qu’en raison de l’idéologie commune des agresseurs…

Pour quand un Sommet européen de crise ?

Au cours des dix-huit derniers mois, les chefs d’État et de gouvernement des 27 se sont réunis près de trente fois. À chaque fois, leurs objectifs étaient ni plus ni moins de sauver l’euro, la zone euro, l’Europe… et, parfois, le monde. Il semblerait qu’ils y soient parvenus, même si l’on ne saurait ignorer que la crise économique, financière et sociale persiste.

Que ne peuvent-ils se réunir une fois de plus et se montrer unis et solidaires face à une menace authentiquement mortifère ? Non, manifestement non…

David Cameron, embarrassé qu’il est par la montée de l’euroscepticisme dans les rangs de son propre parti, se prépare à prononcer, vendredi 18 janvier à La Haye, un discours sur les relations entre le Royaume-Uni et l’Union européenne. Angela Merkel s’apprête, pour sa part, à rejoindre Davos où, accompagnée d’une vaste délégation, elle ira débattre de ses sujets de prédilection, l’économique et le financier.   

Évidemment, l’avenir du Royaume-Uni en Europe, cela reste important. Évidemment, la situation économique et financière, la recherche de solutions à la crise, cela reste essentiel. Mais, l’Histoire a montré que, face à un ennemi fanatisé, déterminé, rien ne pouvait justifier la mollesse. L’apaisement, la complaisance face à une idéologie globalisante aux velléités expansionnistes, comme le djihadisme – l’islamisme – se paie – et se paiera au prix fort. Fermeté et détermination s’imposent face à des forces obscures qui guettent les moindres de nos faiblesses.

Mercredi 16 janvier, Leon Panetta, le secrétaire américain à la Défense, depuis Rome, l’a dit clairement : « Au Mali, je ne crois pas qu’il s’agisse d’une guerre française, mais il faut un effort international ».

Quitter la version mobile