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Le Hezbollah doit-il être intégré à la liste noire de l’UE?

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Après avoir été accusé par la Bulgarie d’être à l’origine des attentats qui ont coûté la vie à cinq touristes israéliens l’été dernier, le Hezbollah est dans le viseur de l’Union européenne qui se pose la question de savoir si l’organisation chiite libanaise ne devrait pas être placée sur la liste noire des organisations terroristes.

Il y a d’autres options

« Actuellement, le Hezbollah ne figure pas sur la liste des organisations terroristes de l’Union européenne et les États membres vont examiner diverses options. C’est l’une d’elles mais ce n’est pas la seule, » a ainsi déclaré  la porte-parole des services diplomatiques de l’Union européenne, Maja Kocijancic, mercredi 6 février.

Catherine Ashton, chef de la diplomatie européenne, a pour sa part affirmé que le classement du Hezbollah sur cette liste, en réponse aux attentats de Bulgarie, n’était qu’une « option parmi d’autres ». Et parmi ces autres options, Catherine Ashton a notamment soulevé l’éventuel renforcement du contrôle d’Europol sur ce mouvement.

L’Iran aurait programmé les attentats

À l’origine de cette interrogation, les accusations de la Bulgarie émises mardi 5 février. Les autorités bulgares ont accusé le Hezbollah d’être à l’origine des attentats qui ont coûté la mort à cinq touristes israéliens en juillet dernier, à Bourgas, sur la mer Noire.

À l’époque, Israël avait immédiatement accusé l’Iran d’être à l’origine de cet attentat provoqué par une bombe placée dans un car de touriste.

« Tous les signes mènent à l’Iran, » avait alors déclaré Benjamin Netanyahu tandis que le ministre israélien de la Défense, Ehud Barak, ajoutait que l’attentat avait sans doute été mené « par des activistes du Hezbollah et commandité par l’Iran. »

Le Hezbollah accuse Israël de vouloir le diaboliser

Devant ces nouvelles accusations bulgares, le Hezbollah s’est alors défendu, sans directement commenter les déclarations de Sofia, et a accusé Israël d’être à l’origine de cette rumeur internationale

Dans un discours prononcé mercredi 6 février, le numéro deux du parti, Naïm Kassem, a ainsi dénoncé « la campagne d’accusations et d’allégations menée par Israël contre le Hezbollah. »

« Nous ne cèderons pas aux pressions, » a-t-il ajouté selon des propos rapportés par l’Agence nationale d’information.

Terroriste ou pas ?

Déjà sur la liste des organisations terroristes américaines depuis les attentats du 11 septembre, mais aussi sur celles du Canada, de l’Australie, du Royaume-Uni et des Pays Bas, le Hezbollah pourrait donc intégrer la liste européenne, et Israël et les États-Unis font pression en ce sens sur l’Europe. Pourtant, celle-ci se montre divisée sur la question.

Car le Hezbollah n’est pas une organisation « terroriste » comme les autres. Allié puissant de la Syrie et de l’Iran, le Hezbollah est un parti gouvernemental qui a toute sa place dans le paysage politique libanais.

Créé en 1982, à la suite de l’invasion israélienne au Liban, le Hezbollah a été fondé à partir de sa branche armée, cette même branche armée qui a été l’élément déterminant pour de nombreux pays.

L’Union européenne divisée

Jusqu’ici, l’Europe a toujours été contrastée sur la question. Le 1er août 2006, le président de l’Union européenne en exercice affirmait que le Hezbollah n’intègrerait pas la liste des organisations terroristes. Cependant, l’officier supérieur des services de renseignements du mouvement, Imad Fa’iz Mughniyah a été placé sur la liste des terroristes par le Conseil de l’Union européenne.

Le 10 mars 2005, le Parlement a également adopté une résolution non-contraignante pour qualifier le Hezbollah de terroriste.

L’Union européenne pourrait-elle alors décider, à son tour, de placer l’organisation chiite sur cette liste ? Il semble que cela soit, actuellement, peu probable. Pour inclure le Hezbollah sur cette liste, déjà composée de 62 organisations, il faut en effet que les 27 se prononcent à l’unanimité.

Or, parmi les pays les plus hostiles à la stigmatisation du Hezbollah, on compte la France, dont les liens avec le Liban sont historiques, mais également l’Italie, Chypre et Malte.

Car au sud du Liban, où les forces françaises sont déployées depuis de nombreuses années, la France a pu compter sur une certaine souplesse du Hezbollah pour le bon déroulement des opérations de la Force intérimaire des Nations unies au Sud-Liban (Finul). L’Italie est dans le même cas.

Le Hezbollah se montre raisonnable face à la Syrie

Plus récemment, et alors que le Liban est souvent considéré comme l’arrière-cour de la Syrie, le petit pays aurait pu s’embraser au rythme de l’évolution de la crise syrienne. Et pourtant, malgré des affrontements religieux au nord du pays, malgré la tension qui règne depuis bientôt deux ans, le Liban tient bon.

Pour de nombreux experts, ce « miracle » tient notamment au fait que le Hezbollah a, depuis le début du conflit, montré une certaine distance avec son allié de Damas.

« Le Hezbollah a compris que la Syrie de Bachar al-Assad n’avait plus d’avenir, » expliquait Antoine Assaf, spécialiste du Liban, en octobre dernier.

Alors que le conflit syrien provoquait à l’époque un début d’embrasement du pays, « Hassan Nasrallah ne s’est pas positionné en faveur de l’envoi d’hommes en Syrie. Il a même affirmé que cet envoi ne serait pas dans l’intérêt du Liban, » ajoutait Antoine Assaf.

La position « pacifiste » qu’a adoptée le Hezbollah fait hésiter et alors que l’axe triangulaire Syrie/Iran/Hezbollah est menacé depuis deux ans, le dialogue avec le Hezbollah semble fondamental.

Le terrorisme du Hezbollah doit être puni

Faut-il pour autant tout pardonner à l’organisation d’Hassan Nasrallah ? C’est la question que se posent d’autres partenaires européens pour qui l’Union européenne doit apporter une réponse ferme aux agissements du Hezbollah.

Ainsi, les Pays-Bas et le Royaume-Uni veulent envoyer un « message clair » au Hezbollah. « Nous pensons que la bonne réponse serait que l’UE classe la branche militaire du Hezbollah dans la liste de l’UE des organisations terroristes dont les avoirs doivent être gelés, » a ainsi indiqué le Bureau des Affaires étrangères britannique. « Nous ne voyons aucune raison qui ferait que ce classement européen puisse affecter la stabilité politique du Liban, » a ajouté le Foreign Office.

Même son de cloche aux Pays-Bas, qui plaident pour que le Hezbollah intègre cette liste depuis 2004.

Les avis divergent et compte tenu des positions radicalement opposées des pays européen, il y a fort à penser que l’Union choisira une des autres « options » envisagées par Catherine Ashton.

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