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Barack Obama en Israël: les Palestiniens désabusés

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La piste d’atterrissage d’hélicoptère de Muqataa – le mausolée où est enterré le leader palestinien Yasser Arafat à Ramallah – a été nettoyée en prévision de l’arrivée, la semaine prochaine, du président américain Barack Obama. Mais à Ramallah, la population accueillera le président sans grande complaisance, et ne s’attend pas à de grands changements à l’issue de sa rencontre avec l’Autorité palestinienne.

« Je sais qu’il vient, mais il vient pour rien »

Obama devrait passer environ cinq heures à Ramallah lors de sa visite de trois jours en Israël, en Cisjordanie et en Jordanie, bien que des rapports récents suggèrent que le Président pourrait ne pas se rendre à Ramallah, et rencontrer le président Mahmoud Abbas à Bethléem.

Au centre commercial Plaza, plus de la moitié des personnes interrogées étaient même surprises de savoir que Barack Obama allait venir. « Son voyage n’a pas d’importance. C’est comme un jeu entre Israël, la Palestine et Obama », a déclaré Maida Awad, avant que son mari, Johnny, n’ajoute : « Israël contrôle Obama ». « Je sais qu’il vient, mais il vient pour rien », a quant à lui déclaré Mahmoud Salouri, un vendeur.

La position du gouvernement palestinien est plus optimiste

« Nous attendons un peu d’aide du président Obama », a déclaré Nabil Shaath, l’un des diplomates palestiniens les plus chevronnés, et le commissaire de l’Organisation de libération palestinienne pour les relations étrangères. « Nous allons essayer de créer un climat favorable et d’écouter ce qu’il dit être une solution ».

Selon Nabil Shaath, dans ses discussions avec Barack Obama, la direction palestinienne prévoit de mettre l’accent sur le mur de séparation entre Israël et les territoires palestiniens, ainsi que sur les activités de colonisation israélienne continue sur les terres que les Palestiniens espèrent obtenir dans un accord sur le statut final.

Mardi, le Jerusalem Post a cité un responsable palestinien qui affirmait que le président Mahmoud Abbas ferait des prisonniers palestiniens emprisonnés en Israël le problème numéro un des discussions avec la délégation américaine.

Palestiniens et Israéliens attendent des actions de la part de Barack Obama

Près de 5000 Palestiniens, dont certains ont plaidé coupables pour l’assassinat d’Israéliens, sont détenus dans les prisons israéliennes. Israël prétend que la majorité sont des terroristes ayant du sang sur leurs mains, mais ils sont célébrés comme des prisonniers politiques et des combattants de la liberté dans les rues palestiniennes ; ces dernières semaines, leur sort a été la cause de manifestations devant les prisons israéliennes.

Bien que la question soit populaire parmi les Palestiniens, il est difficile d’imaginer que Barack Obama ait la capacité ou la volonté d’agir en ce qui concerne les prisonniers.

Dans une initiative également sans grand espoir, plus de 100 000 Israéliens ont signé une pétition demandant à Barack Obama de gracier l’espion israélien Jonathan Pollard, emprisonné aux États-Unis depuis 25 ans. Montrant son soutien à la pétition, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a rencontré la semaine dernière la femme de Jonathan Pollard.

Beaucoup de Palestiniens espèrent que Barack Obama, que ce soit lors de ce voyage ou ultérieurement, présentera sa propre vision pour une paix israélo-palestinienne. Le président américain a dit à de nombreuses reprises précédant sa visite qu’il n’avait cependant pas l’intention d’apporter « un plan de paix grandiose ».

« Les États-Unis doivent comprendre que la paix sert leur propre intérêt »

Nabil Shaath, qui a rencontré Barack Obama à plusieurs reprises et lui a exprimé sa proximité et son affection personnelle, a déclaré qu’il tenait Barack Obama « responsable de tous les engagements antérieurs pris par les États-Unis », et que le rôle du président sera de « traduire ce qu’il voit et entend ici en quelque chose de réalisable ».

« Pas un seul accord entre nous et les Israéliens n’a pas été co-signé par les États-Unis », a-t-il souligné. « Les États-Unis doivent comprendre que la paix sert leur propre intérêt ».

Soulignant la construction continue de colonies israéliennes – « ils considèrent encore ces territoires comme contestés et non comme territoires occupés » – Nabil Shaath a ajouté que « l’application sélective des accords n’est en rien une application réelle ».

Le problème du Hamas

De nombreux renvois de balle se profilent à l’horizon dans les pourparlers américano-palestiniens. L’un des points de friction à surmonter est la tentative par l’Autorité palestinienne de parvenir à un accord d’unité avec le Hamas, la faction extrémiste islamiste qui contrôle la bande de Gaza, considéré comme une organisation terroriste par les États-Unis.

« Nous sommes très proches d’un accord, mais nous n’en sommes pas encore là », explique M. Shaath. « Le Hamas doit décider de son bureau politique et de son leadership ».

« Nous aimerions que les États-Unis soient plus impartiaux »

Si un accord se présente, dit-il, « les États-Unis doivent comprendre que la grande majorité des Palestiniens veulent à la fois l’unité et un processus de paix ». « Nous aimerions que les États-Unis soient plus impartiaux. La façon dont les États-Unis ont réagi à notre statut d’État non-membre observateur à l’ONU était inacceptable et inexplicable ».

Plutôt que d’attendre qu’un accord définitif avec Israël soit signé, en septembre dernier – dans ce que les États-Unis appellent une « action unilatérale » – l’Autorité palestinienne a demandé l’approbation de l’Assemblée générale des Nations Unies sur sa candidature en tant qu’État.

Et plus d’une voix grinçante a été entendue, et parmi elles celles des Palestiniens regrettant qu’après le vote de l’ONU, le Congrès américain a décidé de conserver les fonds d’aide à l’origine destinés à l’Autorité palestinienne.

Le discours de barack Obama au Caire : une erreur, selon certains observateurs

De nombreux observateurs voient également le discours de Barack Obama en 2009 au Caire, qu’il a tenu pendant les premiers jours euphoriques de son premier mandat, comme une erreur qui a exacerbé les tensions entre les États-Unis et Israël. Pour tenter de remédier à la situation, Barack Obama s’adressera à 2 000 étudiants israéliens dans un discours à Jérusalem la semaine prochaine.

« Je ne condamne pas Obama pour son discours du Caire », a déclaré M. Shaath, reconnaissant le caractère lourd du sujet. « À l’époque, il n’y avait pas de problème avec Israël. Le grave problème était avec le monde musulman, Ben Laden, les talibans et l’islamophobie en Occident ».

Mais d’autres voient ce discours et ces promesses non tenues comme la source de la désaffection palestinienne envers Obama aujourd’hui.

Pas de grande différence entre l’administration américaine et le gouvernement israélien

« Les Palestiniens attendaient beaucoup d’Obama et de ses promesses pendant son premier mandat, et n’ont rien obtenu », a déclaré Hani el Masri, un analyste géopolitique et directeur du think tank Masarat de Ramallah.

« Il a parlé aux Palestiniens et aux Arabes, puis il est rentré sans résoudre la lutte. La plupart des Palestiniens ne croient pas qu’Obama puisse leur donner quoi que ce soit. Ils voient cette visite comme une sorte de visite de courtoisie pour montrer qu’il y a un processus de paix, alors que les Palestiniens savent très bien qu’il n’y a pas de processus de paix, il y a seulement un processus, mais pas de paix ».

Citant un sondage publié la semaine dernière, Hani el Masri a déclaré que plus de 80 % des Palestiniens croient que les États-Unis sont « du côté d’Israël ».

« Ils ne voient qu’une petite différence entre l’administration américaine et le gouvernement israélien », explique-t-il, « et ils pensent que ces différences sont exagérées. L’enjeu principal est le soutien américain à Israël alors qu’Israël poursuit ses agressions, ses colonisations, et ses emprisonnements, de sorte qu’ils ne voient aucun espoir de la part de l’administration américaine ».

GlobalPost / Adaptation : Anaïs Lefébure pour JOL Press

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