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Chiites, sunnites, quelles différences?

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Dans le monde arabo-musulman, l’islam n’est pas indivisible. Des évènements quotidiens en témoignent, en Irak comme ailleurs, différentes communautés musulmanes vivent dans une tension religieuse et politique qui se traduit souvent par des attentats et des affrontements.

Quel héritier pour le prophète ?

Chiites et sunnites sont au cœur de cette tension millénaire qui se traduit parfois en violences meurtrières.

« Les chiites et les sunnites sont issus de groupes qui, après la mort de prophète Muhammad, ne se sont pas accordés sur sa succession », explique Sabrina Mervin, chercheuse au CNRS et spécialiste de la question chiite. « Très schématiquement, pour les chiites, elle revient de droit aux imams, divinement désignés parmi les descendants du prophète par sa fille Fâtima et son cousin Ali. Alors que ceux qui allaient devenir les sunnites ont élu des califes parmi les compagnons du prophète. »

Un schisme millénaire

C’est en 632 que se produit ce schisme, à la mort du prophète Mahomet. Les controverses sur la succession de ce dernier conduira ensuite à des problématiques théologiques qui demeurent encore aujourd’hui.

« Il en résulte des doctrines différentes sur l’autorité : ainsi, l’imamat fait partie des fondements de la religion chez les chiites qui vouent amour et dévotion aux imams et à la famille du prophète », explique Sabrina Mervin.

Dans le monde chiites, douze imams sont reconnus infaillibles quant à leur interprétation du Coran. Onze d’entre eux ont déjà existé tandis que le dernier, l’imam Mahdi, devra revenir à la fin des temps afin de juger les hommes.

Des hiérarchies religieuses

Dans le quotidien, ces divergences de fond ont également des incidences. Les sunnites considèrent en effet que le Coran est une création divine tandis que les chiites l’interprètent comme une œuvre humaine.

Les sunnites possèdent également la « sunna » comme livre de référence. Ce livre retranscrit la vie du prophète sous forme de préceptes à respecter dans la vie d’un musulman.

Le sunnisme diverge également du chiisme dans la hiérarchie religieuse. Ainsi, les sunnites n’accordent aucune importance dans la séparation du politique et du religieux, un chef d’Etat peut donc être le chef des croyants. Chez les chiites, le commandeur des croyants est une personne totalement séparée du monde civil et politique. En Iran, pays qui regroupe la majorité des chiites du monde arabo-musulman, le chef d’Etat Mahmoud Ahmadinejad est totalement indépendant des ayatollahs tandis qu’au Maroc, pays sunnite, le roi Mohammed VI est également le chef religieux.

Les chiites pratiquent le mariage temporaire

Dans le quotidien et dans certaines pratiques, chiites et sunnites cultivent leurs différences. Les sunnites pratiquent la prière du Tarawih, durant le Ramadan, prière qui n’est pas observée par les chiites.

Alors que les chiites peuvent se marier de manière temporaire, les sunnites croient en l’indissolubilité du mariage.

Les sunnites pensent également que le prophète Mahomet n’était pas infaillible et a commis des péchés lorsqu’il était sur terre, ce que refusent les chiites pour qui Mahomet a été conçu sans péché.

D’autres branches de l’islam

Si les sunnites constituent la plus grande majorité de musulmans, et les chiites la deuxième branche principale, ces deux écoles ne sont pas les seules et dans le monde arabo-musulman, de nombreuses versions de l’islam font les diverses communautés de musulmans.

« Les sunnites constituent la branche majoritaire de l’islam, et elle est elle-même divisée. Il y a quatre écoles juridiques, différents courants théologiques, des ordres soufis, des courants issus de réformismes comme le wahhabisme ou le salafisme », explique Sabrina Mervin.

« Les chiites forment la seconde branche de l’islam et représentent entre 12 et 15% des musulmans. Cette branche est elle aussi divisée en sous-groupes apparus à diverses périodes de l’histoire : les chiites imamites ou duodécimains qui sont les plus nombreux – ils sont ceux que l’on trouve en Iran, en Irak, au Liban, etc. – les ismaéliens, les zaydites, les chaykhis, les alaouites, etc. » explique-t-elle.

« Enfin, il existe une troisième branche de l’islam, aujourd’hui très minoritaire, celle des ibadites, que l’on trouve notamment dans certaines régions du Maghreb et à Oman. »

Pas de guerre fratricide

Si ces diverses communautés s’entretuent parfois, lorsque le sensible équilibre qu’elles trouvent pour cohabiter est mis à mal, il ne faut pour autant pas parler de « guerre fratricide ».

Pour Sabrina Mervin, « il n’y a pas « une » guerre fratricide, mais des situations tendues ou des conflits dans plusieurs pays, au Pakistan, en Irak comme en Syrie. »

« Pour des raisons propre à chaque dynamique locale. L’histoire de la civilisation islamique a traversé des situations de rivalité, notamment entre l’Empire ottoman et l’empire safavide, mais aussi des moments régis par la diplomatie et les échanges. On ne peut en tout cas pas parler de guerre entre sunnites d’un côté et chiites de l’autre, cela ne s’est pas produit. »

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