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Zahra, une candidate fictive pour une élection libre en Iran

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JOL Press : Comment est née la campagne virtuelle ?

Amir Soltani : Pour comprendre l’origine de la campagne vote4zahra, il faut remonter à l’élection présidentielle iranienne de 2009. Lors du mouvement de contestation qui a suivi la réélection de Mahmoud Ahmadinejad, des millions d’Iraniens ont envahi les rues de Téhéran pour protester contre la fraude. Avec une question : «Où est mon vote? ».

Au lieu de respecter la requête du peuple et d’examiner les résultats, le Guide suprême de la République islamique, l’ayatollah Ali Khamenei a interrompu le processus électoral et a proclamé Mahmoud Ahmadinejad – son candidat favori – vainqueur des élections. Mais les manifestations se sont poursuivies. L’ayatollah a alors ordonné une répression du mouvement iranien. Il a abusé de son autorité religieuse et politique pour sanctifier la fraude par la force.

Pendant la révolution verte, Neda, Sohrab et de nombreux autres jeunes manifestants ont été tués dans les rues de Téhéran. D’autres ont été violés, torturés et tués dans des centres de détention comme celui d’Evin ou de Kahrizak, dans la banlieue sud de Téhéran. 

En 2009, nous avons décidé de lancer la BD Le paradis de Zahra, d’abord comme webcomic sur Internet, pour raconter la douleur d’une mère iranienne qui a perdu son fils lors d’une manifestation. Cette histoire a été suivie par des milliers d’internautes. 

Avec United4Iran, une organisation en faveur des droits de l’homme et de la démocratie, nous avons donc commencé à travailler ensemble. Nous partagions la même vision d’un Iran meilleur. Nous avons eu l’idée de créer la canditate Zahra et avons trouvé un réseau mondial de militants et sympathisants à la campagne. Et une occasion de faire avancer les choses concernant les droits humains des élections présidentielles de 2013.

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JOL Press : Quel est l’objectif de cette campagne ?

Amir Soltani : Comme Karim Sadjadpour, analyste Iranien à la Fondation Carnegie pour la paix internationale, l’a souligné, il n’y a pas d’élections en Iran. Il y a des auditions. C’est le chef suprême qui choisit le président parmi ses « copains ». Par conséquent, il n’existe pas de véritables candidats ni de vraies élections à proprement parler. Créer cette campagne était donc le seul moyen de proposer aux Iraniens un candidat en faveur des droits de l’Homme pour entamer un changement démocratique dans son pays. Zahra est par ailleurs la seule femme à briguer la présidence de l’Iran.

JOL Press: Zahra est un personnage fictif, mais son histoire est basée sur l’histoire vraie de milliers d’Iraniens, lors de la révolution verte. Est-elle une façon de protester contre un système politique corrompu et répressif ?

Amir Soltani : Effectivement. Nous avons créer le personnage de Zahra en 2009 après avoir visionné une vidéo sur youtube montrant une mère iranienne qui était sur le point d’enterrer son fils, Sohrab dans le paradis de Zahra, le plus grand cimetière de Téhéran. Sur son visage transparaissait l’angoisse, la tristesse mais également la colère du peuple iranien. Et aussi leur dignité : leur refus d’accepter les assassinats et les mensonges du régime.

Depuis 1979, la République islamique a tué des milliers de personnes en Iran. Le mémorial Omid, présente une liste partielle des noms de plus de 16 000 victimes issues de tous les milieux. 

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JOL Press : Pensez-vous que les élections de juin prochain puissent dégénérer comme en 2009 ?

Amir Soltani : Avec ou sans élections, la République islamique a perdu sa légitimité. L’abus de pouvoir de l’ayatollah Khamenei a dépouillé la République islamique de légitimité, à la fois populaire et religieuse. Par conséquent, ce à quoi nous pourrions assister au mois de juin c’est à l’effondrement de son autorité.

JOL Press : Comment la campagne est-t-elle perçue en Iran?  Avez-vous reçu un soutien des internautes ?

Amir Soltani : Beaucoup de jeunes manifestants qui ont été contraints de fuir l’Iran à la suite des élections de 2009 ont soutenu notre campagne. Zahra est la seule candidate à la présidence qui puisse rassembler les femmes et les jeunes. 

JOL Press : A l’approche de l’élection présidentielle, le 14 juin prochain, le gouvernement iranien durcit la censure sur Internet. Pensez-vous que la campagne aura une visibilité en Iran?

Amir Soltani : Yes We can ! Les Iraniens sont de jeunes prodiges en technologie pour contourner la censure, nous avons donc une solide présence sur internet. Sans compter que la blogosphère joue un rôle prépondérant en Iran. La campagne virtuelle peut également trouver un écho grâce à différents médiums comme la télévision, la radio, et la presse écrite qui relayent l’information. Il nous reste quelques tours dans notre sac. Alors restez connectés.

Propos recueillis par Louise Michel D.

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