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«Iranorama»: Immersion ludique et éducative dans la société téhéranaise

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JOL Press: Quelle est l’origine du webdocumentaire Iranorama ?
 

Yann BuxedaL’origine de ce projet vient de l’intérêt que je porte à la problématique iranienne depuis maintenant une dizaine d’années. C’est un sujet qui m’a toujours passionné et que je couvre ponctuellement pour France 24 depuis des années. Depuis un certain temps, je souhaitais mener à terme un projet de longue durée autour de cette thématique.

C’est dans cette optique que je suis parti en Iran à deux reprises, en 2009, afin de poser les bases de ce projet que je voulais déjà « web » à l’époque. Et l’émergence du webdoc m’a permis de le matérialiser quelques années plus tard.

JOL Press: Vous vous êtes déjà rendu à Téhéran deux fois. Ce projet est-il une sorte de transposition de vos voyages sur écran ? 
 

Yann BuxedaC’est exactement cela. Evidemment, pour dynamiser l’expérience, nous avons choisi d’organiser l’enquête d’Iranorama sur quatre épisodes et autant de jours, mais le déroulement du scénario est très largement inspiré de faits réels. L’idée, c’est de réaliser un support ludique, qui soit avant tout crédible. Et difficile d’être plus crédible qu’en décrivant des faits.

JOL Press: Est-ce une manière d’aborder les enjeux de la présidentielle iranienne ? Quels sont-ils ? 
 

Yann BuxedaTout à fait. Politique intérieure, crise économique, géopolitique et relations internationales, dossier du nucléaire… Les enjeux de cette présidentielle iranienne sont multiples. Et toutes ces thématiques sont traitées dans les quatre épisodes d’Iranorama, pour proposer aux internautes des clés de compréhension. 

L’idée, c’est de profiter de ce webdoc, à mi-chemin entre le reportage, la bande dessinée et le jeu vidéo, pour transmettre de l’information. Car même si Iranorama est divertissant et amusant, c’est aussi une plateforme qui se veut éducative et informative.

JOL Press: Iranorama repose sur le concept du « Livre dont vous êtes le héros », où les choix posés font avancer le récit. Une manière d’impliquer l’internaute ?
 

Yann BuxedaImpliquer l’internaute, oui, mais aussi le divertir. L’idée, c’est aussi de se baser sur un mécanisme d’apprentissage tout naturel : le jeu. De la même façon qu’un enfant apprend à différencier les couleurs, les formes, les lettres en jouant, il est possible de transmettre une information aux adultes en passant par le jeu. 

C’est de ce constat simple que sont nés les « serious games », très en vogues en ce moment dans les entreprises pour accompagner la formation des salariés. Le procédé est également applicable sur un plan journalistique. Si vous souhaitez que votre lecteur se souvienne de l’information que vous voulez lui transmettre, créez-lui un cadre divertissant et immersif, c’est très efficace.

JOL Press: À l’approche de l’élection présidentielle iranienne, tous les yeux sont tournés vers l’Iran. Pensez-vous que les gens aient une vision biaisée de la société iranienne ?
 

Yann BuxedaOui, c’est inévitable. En dépit de son rôle central dans les relations internationales, l’Iran est un pays assez peu présent dans le paysage médiatique français. On évoque souvent les négociations autour du nucléaire ou les tensions géopolitiques entre l’Iran et les occidentaux, mais la société iranienne, elle, est assez méconnue. 

Du coup, les stéréotypes sont nombreux et sont principalement liés à une méconnaissance profonde du sujet. Beaucoup de gens font un amalgame « Irak-Iran-Afghanistan » parce que les médias évoquent l’actualité sans prendre le temps de contextualiser l’information en profondeur. Du coup, l’Iran traîne une image de dictature opaque qui – sans que cela puisse être comparé à la Corée du Nord – suscite l’inquiétude et la méfiance.

JOL Press: Dans un pays où les interdictions sont nombreuses, quelle est la situation de la jeunesse iranienne ? 
 

Yann BuxedaLes jeunes Iraniens rivalisent d’ingéniosité pour contourner les interdits du régime. En dépit des lois, ils fument, boivent de l’alcool, font la fête loin des yeux du régime. Ils sont également très portés sur la culture occidentale et ont une vision éclairée de la situation politique de leur pays. 

Il s’agit justement d’une thématique largement évoquée dans Iranorama, où nous traitons de la consommation de drogues et d’alcool des jeunes Iraniens et de leurs autres échappatoires ludiques et culturelles.

JOL Press: Avez-vous eu recours au financement participatif pour votre projet ?
 

Yann Buxeda: Oui. En plus du soutien financier de France 24, nous avons été désignés lauréats de la Bourse Orange / formats innovants remise par l’Association Beaumarchais. Et nous avons lancé une campagne de « crowdfunding » (collecte de fonds) en mars dernier pour compléter le budget d’Iranorama.

JOL Press: Quels sont vos projets futurs ? Quelle sera l’évolution d’Iranorama ?
 

Yann Buxeda: L’idée, est d’accompagner Iranorama dans les prochains mois. Le webdoc a remporté le prix du public du meilleur webdocumentaire du WebProgram Festival de La Rochelle en 2013 et nous souhaitons continuer à le faire vivre à travers les différents festivals accueillant des webdocs. 

Ensuite, en fonction de l’accueil du public et de l’envie des médias prescripteurs, nous envisagerons de renouveler l’expérience dans un autre pays. Enfin, nous nous posons la question d’éditer une version livre d’Iranorama même si la priorité reste pour le moment la version web.

Propos recueillis par Louise Michel D.

 

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