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La stratégie syrienne du président Morsi vivement critiquée en Égypte

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L’annonce du président égyptien de rompre toutes relations diplomatiques avec Damas a ravi l’opposition syrienne, samedi 15 juin.

Soutien affiché du président Morsi

Devant plusieurs dizaines de milliers de personnes venues assister à la Conférence nationale de soutien à la révolution syrienne, Mohamed Morsi s’est exprimé en ces termes. Après plus de deux ans d’un conflit qui atteindra bientôt le lourd bilan de 100 000 morts, l’Egypte a affirmé ainsi son plein soutien à l’opposition syrienne et envers le soulèvement contre Bachar al-Assad. L’ambassade de Syrie au Caire sera fermée, tout comme la mission diplomatique égyptienne à Damas.

« Nous avons pris la décision ferme aujourd’hui de rompre toute relation avec la Syrie et le régime syrien », a déclaré le président égyptien.

Ce soutien n’est pourtant pas nouveau. Le président Frère musulman au pouvoir n’a jamais caché son intimité avec les membres du Conseil national syrien (CNS), proches également des Frères musulmans et devenus depuis la Coalition nationale des forces d’opposition syrienne.

L’Armée syrienne libre en appelle à l’armée égyptienne

Le discours a été prononcé devant plusieurs dignitaires de la confrérie et diverses personnalités du clergé sunnite.

Parmi les invités, des membres du haut commandement de l’Armée syrienne libre (FSAJC) ont salué le discours du président égyptien, affirmant que celui-ci avait « allégé leur souffrance et leur peine », et invitant également le gouvernement égyptien à témoigner désormais de son engagement par des actions concrètes.

Fahd Al-Masry, porte-parole de l’Armée syrienne libre, a pour cela tendue la main la « courageuse » armée égyptienne pour venir soutenir le peuple syrien dans son combat contre l’armée de Bachar al-Assad.

Les salafistes demandent des explications au président Morsi

Mais dans un contexte de révolution inachevée en Egypte, le discours du président Morsi n’a pas résonné de la même manière au sein des différentes forces politiques du pays.

Ainsi, Nader Bakkar, vice-président pour les affaires médiatiques du parti salafiste Al-Nour a insinué que cette déclaration présidentielle avait été formulée de manière à ce qu’elle éclipse les tentatives de déstabilisation de l’opposition égyptienne qui prévoit une mobilisation massive le 30 juin prochain.

« Nous n’avons pas pris part à cette conférence sur la Syrie car nous émettons des réserves sur la stratégie du Parti de la liberté et de la justice qui organise de plus en plus d’événements avant le 30 juin », a-t-il déclaré.

Pour ce membre du parti salafiste, le président égyptien devrait avant tout clarifier sa position vis-à-vis de la Syrie. En effet, lorsqu’il était à Moscou en avril dernier Mohamed Morsi avait sous-entendu que l’Egypte se rapprocherait de la Russie dans sa position de défense du régime de Bachar al-Assad.

Menacer les manifestants du 30 juin

« Ce discours tenait plus du show visant à menacer ceux qui voudraient manifester le 30 juin », a pour sa part estimé Heba Yassin, porte-parole de la coalition d’opposition Al-Tayar Al-Sha’aby, interrogée par le quotidien Daily News Egypt.

Comme pour reprendre un argument régulièrement employé pour attaquer la présidence Morsi, cette porte-parole a également affirmé que la conférence du président égyptien n’avait été suivie que par ses proches au pouvoir ainsi que par ses plus fidèles partisans, bien que ce dernier prétende être le président de tous les Egyptiens.

« Avec tous les discours qu’il donne, la popularité de Morsi décline et il prouve qu’il est incapable de diriger le pays », a-t-elle encore ajouté.

Selon cette dernière, seuls les Syriens devraient avoir l’opportunité de décider pour les affaires du pays. Personne ne devrait interférer dans leur destin, affirme-t-elle encore. « Les islamistes ont limité la crise en Syrie à une lutte sectaire entre sunnites et chiites, et n’ont pas envisagé la lutte contre un régime dictatorial. »

Manque de directive du président Morsi

Le Mouvement de la jeunesse du 6 avril a estimé que la déclaration de Mohamed Morsi avait mis en lumière le manque de directive et de vision politique du président « alors que la situation en Syrie est compliquée et requiert avant tout une décision qui mettrait un terme au bain de sang », ont indiqué les membres dans un communiqué.

Pour l’ancien député et professeur de science politique Amr Hamzawy, la déclaration de Mohamed Morsi n’a été inventée que dans l’unique but de rallier à lui les salafistes à quelques jours de la manifestation du 30 juin, qui s’annonce d’ores et déjà historique.

« Cette présidence prouve son échec tous les jours, y mettre fin par des élections présidentielles anticipées est devenu une nécessité absolue », a-t-il encore indiqué sur Twitter.

L’Egypte veut organiser un sommet humanitaire

Malgré ces accusations, il semble pourtant que le président égyptien ait décidé de s’engager sur le front syrien. Selon ses propres termes, l’Egypte serait actuellement en pourparlers avec la Ligue Arabe afin d’organiser un sommet dans le but d’aider le peuple syrien.

Lors de son discours, Mohamed Morsi a accusé le président syrien au pouvoir de mener un « génocide » et un « nettoyage ethnique » contre sa population, il s’est également engagé à fournir un soutien moral et financer à l’insurrection.

« Nous n’allons pas les laisser tomber », a encore scandé le président après avoir affirmé que l’Egypte collaborait avec la Turquie, l’Arabie Saoudite, le Croissant-rouge islamique ainsi qu’avec des organisations de la société civile pour coordonner l’acheminement de l’aide aux rebelles en Syrie et aux réfugiés syriens en Egypte.

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