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Pourparlers de paix au Proche-Orient: bal des vanités à Washington?

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Les sceptiques étaient formels. L’intense activité diplomatique déployée par John Kerry, depuis qu’il a succédé à Hillary Clinton au poste de secrétaire d’Etat en janvier, viendrait se heurter aux positions irréconciliables de Benyamin Netanyahou et Mahmoud Abbas, et aux faibles marges de manœuvre dont disposent les deux hommes au sein de leurs propres camps. C’était sans compter sur la détermination du nouveau chef de la diplomatie américaine à inscrire une avancée historique vers la paix au Proche-Orient au bilan du second mandat de Barack Obama. Rien n’est gagné et, désormais, les mêmes sceptiques persistent à promettre un semblant d’accord, a minima.

Une fenêtre d’opportunité

John Kerry a reconnu lui-même qu’il y avait de nombreuses « haies » à franchir avant d’aboutir à un accord significatif. Pourtant, dès cette première rencontre à Washington, il tentera, avec Barack Obama, de faire taire les Cassandre et de convaincre les deux protagonistes que, plus que jamais – et compte tenu du contexte régional et international –, l’intérêt de leurs camps et leurs intérêts personnels respectifs nécessiteraient d’enterrer la hache de guerre.

Le Premier ministre israélien et le président de l’Autorité palestinienne semblent d’accord sur un point : les pourparlers qui s’ouvrent à Washington pourraient être la dernière opportunité – avant longtemps – d’aboutir à une solution pacifique durable au Proche-Orient entre Israéliens et Palestiniens. De plus, les alternatives à la paix pourraient faire basculer la région dans une nouvelle spirale de violence, sans retour.

Benyamin Netanyahou et les frontières de 1967

Le Premier ministre israélien rechigne profondément à revenir sur les frontières dites de 1967 et à céder la moindre parcelle de territoire colonisée par Israël depuis 46 ans. Pourtant, il est une perspective à laquelle il est, semble-t-il, encore plus opposée, la création d’un Etat binational entre le Jourdain et la Méditerranée. Cette éventualité ne pourrait avoir que deux issues, toute aussi funeste l’une que l’autre à ses yeux, la fin d’Israël en tant qu’« Etat juif » ou la création d’un régime d’apartheid dans lequel les Palestiniens se verraient refuser l’égalité des droits.

Dans ces conditions, Benyamin Netanyahou pourrait avoir conclu qu’il fallait mieux abandonner une partie du territoire acquis depuis 1967.  

Mahmoud Abbas et la promesse d’un Etat de Palestine

Les alternatives sont tout aussi peu attrayantes pour le président de l’Autorité palestinienne. D’un côté, Mahmoud Abbas ne saurait être celui qui a enterré la promesse faite aux Palestiniens d’obtenir leur propre Etat, de l’autre, il prend le risque que la frustration et le sentiment de trahison des Palestiniens ne se traduisent par un retour de la violence, une violence qui pourrait être attisée par la situation régionale – de l’Egypte à la Syrie et à l’Iran.

Comme le sait si bien Mahmoud Abbas, l’adhésion internationale à la perspective d’un Etat palestinien est sans rapport avec la réalisation de cette promesse.

Vanité, vanité… et si tout n’était que vanité ?

Un signe de l’atmosphère dans laquelle s’ouvrent ces pourparlers… Dimanche 28 juillet, le Premier ministre israélien a dû mettre tout son poids dans la balance pour convaincre les membres de sa coalition de faire un premier geste de bonne volonté sous la forme de la libération de 102 prisonniers palestiniens. Il ne l’a emporté que de 13 voix contre 7 – et il avait dû préalablement faire passer un texte prévoyant la tenue d’un référendum en cas d’accord avec les Palestiniens, une perspective censée rassurer les colons et la frange dure de la majorité. Or, Benyamin Netanyahou a entamé son troisième mandat – et probablement son dernier – et il pourrait être motivé par le désir de rester dans l’histoire comme celui-ci qui a conclu un accord historique, reléguant au second plan ses prédécesseurs. Vanité.

La chose pourrait être tout aussi vraie de Mahmoud Abbas, qui a consacré l’essentiel de sa vie aux négociations avec Israël. A 78 ans, le temps est compté pour le leader palestinien et l’Histoire ne tardera pas à juger… Vanité.

Vanité aussi du côté de l’administration américaine, chez Barack Obama et, tout autant, chez John Kerry, en quête de revanche sur son propre destin présidentiel brisé. Vanité ?

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