Site icon La Revue Internationale

Gaz de schiste: David Cameron prêt à sacrifier sa campagne anglaise?

[image:1,l]

L’engagement de David Cameron en faveur de l’exploitation du gaz de schiste n’est plus à prouver. Fin décembre 2012, son gouvernement autorisait la reprise des forages, accompagnée de quelques contrôles supplémentaires, et, en juillet, il complétait le dispositif d’un coup de pouce fiscal.

« Si nous ne soutenons pas cette technologie, nous perdrons une formidable occasion d’aider des familles à payer leurs factures et de rendre notre pays plus compétitif. L’exploitation du gaz de schiste par fracturation pourrait réduire la facture et la dépendance énergétique du pays, créer des emplois et dégager des ressources financières nouvelles pour des villes et des communautés. »

Le 12 août dernier, dans les colonnes du Daily Telegraph, le Premier ministre britannique a persisté et signé. Ce faisant, il semble avoir ouvert un nouveau front politique aux conséquences incertaines en vue des prochaines élections législatives, au plus tard en 2015.

La campagne anglaise, le nouveau Texas ?

Le tableau est idyllique… L’Angleterre de carte postale, sa campagne verdoyante, vallonnée, comme intacte – ou presque – depuis des siècles, ses cottages, ses pubs aux noms improbables et ses terrains de cricket.

C’est là, dans le sud du pays, entre Londres et la Manche que se trouve la ligne de front entre le gouvernement et les opposants à l’exploitation des gaz de schiste et, en particulier, à la fracturation hydraulique.

Sous leurs pieds, des centaines de milliards de mètres cubes de gaz dont l’extraction d’un seul dixième permettrait sans doute d’assurer un demi-siècle d’indépendance énergétique pour le Royaume-Uni. Ils ne veulent rien savoir. La priorité, leur environnement.

Une atmosphère de jacquerie

Un village est devenu le symbole de la résistance, Balcombe. Aux entrées du village, des banderoles : « Fracking kills » – la fracturation tue… tue l’environnement et le cadre de vie en risquant notamment d’empoisonner les nappes phréatiques, tue l’art de vivre à l’anglaise.

La mobilisation a attiré quelques célébrités, comme Bianca Jagger ou encore les rockers Ray Davies des Kinks et Chrissie Hynde des Pretenders. S’il ne s’agissait que de cela – que d’activistes classés à gauche -, David Cameron n’aurait sans doute que relativement peu à craindre de cette mobilisation mais la colère s’étend et a déjà gagné les rangs de la droite et de son propre parti, le parti conservateur.

Vers une jacquerie électorale ?

« Conservatives against fracking » – les conservateurs contre la fracturation -, c’est sous cette banderole que les Tories opposés à la politique de David Cameron se sont déjà regroupés. Pour la plupart, électeurs loyaux, ils ne se sont jamais mobilisés ainsi. Jamais, ils n’avaient même songé fricoter ainsi avec l’adversaire, la gauche et les écologistes.

Ce qu’ils entendent préserver, c’est précisément un certain art de vivre « à l’anglaise » et c’est pour cette raison qu’ils refusent de voir leurs jolis paysages bucoliques métamorphosés en champs pétrolifères. Et puis, aussi, ce qu’ils reprochent à David Cameron, c’est d’avoir pris des décisions aussi majeures sans le moindre débat…

Sur le fond, ces électeurs conservateurs ne défendent pas des positions très éloignées des écologistes mais, lorsqu’il faudra voter, ils risquent vraisemblablement de se tourner plus aisément vers UKIL, le parti de l’indépendance du Royaume, eurosceptique, anti-immigration mais surtout défenseur de l’ »Anglicité » et de la « Britannitude », ouvertement réactionnaire, plus que conservateur.

Cette perspective est une véritable menace pour David Cameron et ses conservateurs très modérés. Depuis 2010, l’UKIP ne cesse de gagner du terrain par rapport au Tories, sur l’Europe et sur la peur de l’immigration. La prochaine élection générale s’annonce particulièrement serrée. Que le Premier ministre sortant perde alors une petite poignée de circonscriptions sur la seule fracturation du gaz de et il pourrait se retrouver contraint de dire « Bye bye » au 10 Downing Street.  

Quitter la version mobile