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Quand Dominique de Villepin et Alain Juppé changent d’avis sur la Syrie

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Ce n’est pas qu’il se contredit vraiment mais s’il est aujourd’hui vigoureusement convaincu de l’utilité d’une intervention en Syrie, Alain Juppé émettait, en 2011, quelques réserves quant à une éventuelle intervention militaire. « Il est hors de question de s’engager dans une intervention militaire si on n’a pas le feu vert des Nations Unies. Nous respectons le droit international. Et on n’aura pas ce feu vert parce que la Russie continue à bloquer », expliquait-il, il y a deux ans, au micro de Jean-Jacques Bourdin sur BFMTV et RMC.

Or, le 23 août dernier, l’ancien ministre des Affaires étrangères appelait la communauté internationale à « s’affranchir des blocages » au sein de l’ONU et « aider militairement la résistance syrienne », dans un billet intitulé « L’innommable », posté sur son blog.

« S’affranchir des blocages onusiens »

« Les démocraties avaient prévenu : l’utilisation d’armes chimiques par le régime est la ligne rouge à ne pas franchir. C’est fait », a estimé Alain Juppé. « Les images que nous avons tous vues ne sont pas probantes ? Même l’écume sur les lèvres des agonisants ? Qu’attendent alors, pour aller vérifier, les observateurs des Nations Unies qui sont sur le terrain, à quelques kilomètres du site ? »

Et quid du droit international ? « Je sais bien que le Conseil de Sécurité est bloqué par le veto des complices du régime syrien, Russie en tête. Je sais que le respect de la légalité internationale, c’est-à-dire l’autorisation dudit Conseil préalablement à tout emploi de la force, est un principe de base de notre diplomatie », explique-t-il. « Mais il n’est pas besoin d’invoquer Antigone pour se souvenir qu’il existe des lois non écrites qui l’emportent sur le droit positif. Il faut donc aujourd’hui s’affranchir des blocages onusiens et aider militairement la résistance syrienne. C’est risqué. »

Et d’ajouter : « Je connais les objections, sérieuses, qu’on peut soulever à l’encontre de toute intervention. Mais la seule alternative, c’est la poursuite du martyre du peuple syrien. Il ne faudra plus, alors, continuer à verser des larmes de crocodile. Il nous restera le silence de la complicité. »

« Réfléchir à une action sur le terrain, des frappes ciblées »

Mais il n’est pas le seul à avoir changé d’avis sur le sujet. Le 4 mars 2012, alors qu’il était en train de récolter les 500 parrainages nécessaires pour sa candidature à la présidence de la République, Dominique de Villepin avait expliqué l’importance d’une intervention militaire en Syrie : « Il est temps maintenant de réfléchir à une action sur le terrain, des frappes ciblées à la fois sur les institutions civiles et militaires syriennes ». « Si la menace de la force n’intervient pas, le pouvoir syrien ne modifiera pas son cours », avait-il ajouté. « Les choses ne peuvent pas continuer comme aujourd’hui. »

Or il apparaitrait que l’ancien ministre de Jacques Chirac ait plaidé, le 28 août dernier, pour une ligne plus diplomatique. « Notre vocation n’est pas de punir quiconque par le biais militaire », a-t-il clairement affirmé sur BFM TV. « Je comprends que l’on veuille agir. C’est tentant de vouloir balayer d’un coup de telles horreurs, mais cela ne se fait pas ainsi. C’est tout le principe de la diplomatie : définir une stratégie au service d’une vision. Aujourd’hui, la stratégie est aveugle ».

Et comme s’il avait parfaitement oublié ses anciennes position : « Des frappes militaires nous éloigneraient d’un règlement politique et diplomatique en Syrie ». Dominique de Villepin a ensuite appelé à une intervention « utile », en protégeant les populations touchées : « On ne peut pas décider d’une stratégie militaire sans avoir de vision politique ».

« S’il s’agit d’éviter des massacres, il n’est pas trop tard pour mettre en place une zone d’exclusion aérienne en Syrie », a rappelé l’ancien patron du Quai d’Orsay. « Cette dernière enverrait un signal très fort de notre détermination ».

Dominique de Villepin avait connu une certaine renommé internationale en 2003, lors de la crise irakienne. Une envie de popularité Dominique de Villepin ?

Une enquête CSA pour Atlantico révèle que 45% des Français sont pour une intervention de l’Onu et 40% sont contre. Et selon une enquête Ifop pour le Figaro, 55% y sont favorables. Il semblerait que les Français, non plus, ne sachent pas trop quelle serait la meilleure solution.

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