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Ces dictateurs qu’on a longtemps menacés avant d’agir

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Il est des dictateurs chanceux. Ou du moins, des dictateurs qui parviennent à diriger leur pays sans risquer de s’attirer les foudres démocratiques de la communauté internationale. Les premières heures de la rébellion syrienne n’étaient pas achevées que déjà, les Occidentaux regardaient avec stupeur le régime syrien répliquer avec dureté à ces rebelles dérangeants pour le régime en pleine épidémie de « Printemps arabes ». Bachar al-Assad n’a sans doute pas eu de chance.

Le colonel Khadafi, chanceux dictateur

Il en est d’autres, en revanche, qui ont su passer plus longtemps au travers des mailles du filet.

Mouammar Kadhafi en est la preuve. Un destin fatal pour le président libyen qui ne sera pas venu à bout du soulèvement de son peuple auquel l’opération de l’OTAN a apporté une aide définitive, mais à qui la communauté internationale aura fait gagné de nombreuses années de pouvoir et ce malgré le caractère dictatorial de ce pouvoir.

C’est en 1969 que le colonel Khadafi, au terme d’un coup d’Etat bien orchestré, parvient à la tête de la Libye en tant que président du Conseil de commandement de la révolution (CCR). Il a alors 27 ans et très vite, les bases d’un régime autocratique se mettent en place. Culte de la personnalité et propagande de régime font les bases de la gouvernance du régime.

Les méthodes de gouvernement du régime de Khadafi ne sont vite plus un secret pour le monde. Les opposants sont réprimés de la manière la plus brutale. Pendaisons, mutilations, retransmises parfois à la télévision.

Les « ennemis de la révolution » qui se trouvent parmi les universitaires, les étudiants, les Frères musulmans et les journalistes sont une cible privilégiée du régime.

Premières alertes internationales

Les années 80 voient le régime de Mouammar Khadafi prendre un nouveau tournant dictatorial. Une tentative d’attentat manqué contre lui en 1984 l’incite à mettre en place une politique de répression radicale. Des milliers de personnes sont emprisonnées. Les exécutions publiques sont fréquentes et les « disparitions » se multiplient.<!–jolstore–>

Ces mêmes années, le dirigeant libyen est également accusé d’avoir abusé sexuellement de nombreuses jeunes filles et femmes libyennes. Considéré comme un prédateur, Mouammar Khadafi est connu, selon les nombreux témoignages qui ont été révélés après sa mort, pour avoir multiplié les esclaves sexuelles. Nombre d’entre elles faisaient d’ailleurs partie de sa cour « d’amazones » qui le suivait dans tous ses déplacements.

Mouammar Khadafi, un dictateur qui, en termes de politique étrangère, pratique l’interventionnisme. Et si les manières intérieures du chef d’Etat libyen n’intéressent pas plus que ça les Etats-Unis, la trop grande proximité de Khadafi avec les Africains tend à inquiéter les Américains. La tension est à son comble entre les Etats-Unis, qui multiplient les manœuvres militaires en Méditerranée, et la Libye, qui n’a que faire du bon-vouloir américain. Puis vient le 15 avril 1986. Mouammar Khadafi, à qui l’on reproche déjà son soutien au terrorisme international, est accusé d’avoir organisé un attentat à la bombe dans une discothèque fréquentée par des militaires américains à Berlin-Ouest. Ronald Reagan, alors président, ordonne un raid sur Tripoli et Benghazi. Le président libyen survit à cette attaque, malgré ses blessures.

40 ans de règne, 25 ans de répit

Nous sommes alors en 1986. S’ensuivra une période de détente en Libye qui, après des années d’isolement, retrouvera une forme d’état de grâce auprès de la communauté internationale.

Un état de grâce qui s’achèvera par les premiers mouvements de foule de la révolution de 2011. La Libye se soulève, en écho à sa voisine tunisienne.

Le colonel réprime dans le sang et le sort des civils de Benghazi inquiète soudainement la communauté internationale qui, peu de temps avant, accueillait avec bonne volonté le chef d’Etat et sa célèbre tente berbère.

Mouammar Khadafi aura régné en tyran éclairé pendant plus de quarante ans sur le peuple libyen. Depuis les premières altercations avec la communauté internationale jusqu’à l’intervention finale qui aura précipité son ingrate mort près de Syrte, le colonel aura vécu en paix durant 25 ans. 

Slobodan Milošević, dix ans de diktat

Slobodan Milošević est un autre exemple de chef d’Etat qui a eu le temps d’agir avant d’être arrêté par la force internationale. Le président serbe, avant de devenir président de la République fédérale de Yougoslavie, a, à son actif, deux guerres successives et l’organisation d’un massacre qui reste encore commémoré par des milliers de personnes chaque année.

Elu à la tête du Praesidium du Comité central de la Ligue des communistes de Serbie, Slobodan Milošević devient président de son pays en 1989. Immédiatement, il annule les mesures autonomistes prises par le régime précédent et transforme la Constitution afin de s’octroyer plus de pouvoirs.

Les Etats « indépendants et souverains » de la Yougoslavie titiste que sont la Slovénie, la Croatie, mais aussi la Macédoine ou la Bosnie-Herzégovine, commencent à se détacher progressivement de la fédération constituée en 1992.

Durant l’été 1991, Slobodan Milošević lance sa première guerre contre la Croatie. Quelques mois plus tard, une deuxième guerre est lancée contre la Bosnie-Herzégovine. Trois ans plus tard, il faudra le massacre de Srebrenica, en juillet 1995, durant lequel entre 6 000 et 8 000 hommes sont tués, pour précipiter une intervention de l’OTAN.

De nombeux doutes persistent sur sa mort

Le chemin de Slobodan Milošević ne s’arrête pourtant pas là. En 1997, il est élu à la présidence de la République fédérale de Yougoslavie.

Au terme de huit années de violences, l’OTAN ordonne de nouveau, en 1999, des frappes aériennes contre la Yougoslavie. La signature des accords de Kumanovo, le 10 juin 1999, accélère la suite des événements pour Slobodan Milošević qui se voit inculpé de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide devant le Tribunal pénal international.

Après un siège de 33 heures devant sa résidence, le président se rend à la justice le 1er avril 2001 et est livré à l’ONU quelques semaines plus tard.

L’année suivante, à La Haye, débute son procès pour crimes contre l’humanité, infractions graves aux Conventions de Genève et violation des lois ou coutumes de la guerre. Le 11 mars 2006, Milošević meurt au centre de détention des Nations unies à Scheveningen. Les circonstances de sa mort n’ont jamais été clairement établies et aujourd’hui encore, certains doutes planent quant à un éventuel empoisonnement de l’ancien chef d’Etat serbe.

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