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Le mystère plane sur l’incarcération d’une Pussy Riot

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En Russie, la « disparition » d’une Pussy Riot inquiète son mari et les soutiens à la jeune femme, condamnée en 2012 à une peine de deux ans de prison.

Sans nouvelles depuis deux semaines

Nadejda Tolokonnikova, qui fêtera bientôt ses 24 ans, est emprisonnée pour avoir participé à une « prière punk » dans une cathédrale de Moscou début 2012 avec le groupe de punk-rock féministe Pussy Riot. Son mari, Piotr Verzilov, a déclaré samedi 2 novembre être sans nouvelles d’elle depuis treize jours.

L’administration pénitentiaire russe (FSIN), qui avait annoncé son transfert le 18 octobre, avait précisé que selon la législation russe, l’un des proches de Nadejda serait informé du nouveau lieu de sa détention « au plus tard 10 jours après son arrivée à cet endroit ».

Son mari a précisé que les dernières nouvelles d’elle qu’il avait eues remontaient au 21 octobre, lorsque les gardes du camp l’ont mise dans un train, en route vers une autre prison. Selon la BBC, elle aurait cependant été vue le 24 octobre par un passager lorsque le train est arrivé dans la ville de Tcheliabinsk, dans l’Oural.

Changement de camp

Mais son mari, artiste et activiste russo-canadien, s’est plaint, samedi 2 novembre, de n’avoir eu aucun contact avec elle et de n’avoir pas été tenu au courant du nouveau lieu de détention de sa femme.

Selon le quotidien anglophone Russia Today, qui cite l’agence Interfax, les services pénitenciers ont fait savoir samedi, après la plainte de Piotr Verzilov, que la jeune femme avait été placée dans un nouveau camp dont le lieu sera bientôt révélé à sa famille.

« Conformément à une décision prise par le service pénitentiaire fédéral de Russie (FSIN) en ce qui concerne le changement de lieu de Nadedja Tolokonnikova, elle est actuellement déplacée vers un établissement correctionnel différent », a déclaré un responsable du FSIN à Interfax.

L’emplacement du prisonnier ne peut être divulgué à quiconque en dehors de sa famille proche, normalement au maximum dix jours après son incarcération, conformément à la loi russe. « À son arrivée dans l’établissement, l’un des parents, choisi par Tolokonnikova, aura l’information », a également indiqué le responsable sans donner plus de détails.

Lettre ouverte et grève de la faim

Fin septembre, la jeune femme, qui est également mère d’une petite fille de cinq ans, avait écrit une lettre ouverte dans laquelle elle annonçait entamer une grève de la faim et dénonçait les conditions de détention dans le camp numéro 14 de Mordovie, à 600 kilomètres à l’est de Moscou, qui rappelait selon elle le goulag soviétique.

Contrainte à arrêter sa grève de la faim après avoir été hospitalisée et mise sous perfusion, la jeune femme avait ensuite été transférée le 22 octobre dans un autre camp.

La jeune Pussy Riot avait repris une deuxième grève de la faim pour dénoncer les menaces dont elle disait faire l’objet depuis la parution de sa lettre ouverte.

« Vide informationnel »

Olga Kokorina, porte-parole de l’association Russie-Libertés, qui lutte pour le « développement d’une démocratie digne de ce nom en Russie », dénonce le « vide informationnel » qui entoure la détention de la Pussy Riot : « On ne sait absolument pas où elle se trouve », explique-t-elle à JOL Press. « Selon les dernières sources, elle est peut-être à Irkoutsk [en Sibérie] mais rien n’est sûr, nous n’avons aucune nouvelle d’elle », indique Olga Kokorina.

« En parlant avec une autre détenue du camp, désormais réfugiée en France, celle-ci me disait qu’il était courant que les autorités pénitentiaires russes déplacent un détenu d’un camp à un autre pour que les proches et les journalistes, surtout dans des affaires médiatisées comme celle des Pussy Riot, ne puissent pas le trouver », explique-t-elle.

« Dans ce cas-là, ils n’ont aucune information et le prisonnier se trouve toujours dans un « blocus » informationnel. »

Pour Piotr Verzilov, interrogé par le site BuzzFeed, la décision de déplacer sa femme viendrait directement des autorités moscovites.

« Ils veulent la couper du monde extérieur », a-t-il estimé, accusant les autorités de vouloir la punir en raison de ses critiques envers le pouvoir et précisant que les deux grèves de la faim avaient par ailleurs affaibli sa femme.

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