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Algérie: le silence de Bouteflika paralyse la campagne présidentielle

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C’est sans doute avec circonspection que les Algériens intéressés par la politique de leur pays ont débuté cette nouvelle année. Une année électorale puisque dans trois mois, les électeurs seront appelés aux urnes pour élire leur président. Pourtant, alors que l’échéance approche, le flou est encore complet et la campagne électorale n’a pas vraiment démarré.

Une certaine lassitude

A l’aube de ce scrutin, les Algériens semblent pourtant mitigés. Pour Madjid Makedhi, éditorialiste pour le quotidien El Watan, « c’est une année exclusivement politique pour les Algériens qui s’attendent à une animation intense de la scène politique nationale durant les trois prochains mois ».

« Ils souhaitent en tout cas, ajoute encore le journaliste, en finir avec la léthargie et les incertitudes politiques qui ont caractérisé l’année qui vient de s’achever […] Le changement vers un avenir meilleur pour le pays reste, en effet, leur plus grand vœu pour ce nouvel an ».

D’autres Algériens assisteront pourtant à ce scrutin avec une certaine lassitude. « Ils ne s’y intéressent absolument pas », expliquait récemment Kader Abderrahim, maître de conférence à Sciences Po et chercheur à l’Institut des relations internationales et stratégiques. « Les Algériens ne s’intéressent pas à la politique et il suffit de regarder les taux de participation des scrutins précédents pour s’en rendre compte ».

Et pour cause, « le niveau de confiance de la population dans la classe politique n’a cessé de baisser depuis plusieurs années. Aujourd’hui, lorsqu’ils regardent leur classe politique, ils ne voient que la corruption de dirigeants qui vivent dans une bulle sans jamais se préoccuper de leur quotidien, et dont le seul objectif est de rester au pouvoir », ajoute encore le chercheur.

Suspense complet autour de la candidature du président sortant

Les faits tendent en effet à prouver que la classe politique algérienne travaille plus pour garder sa place que pour la valeur du système démocratique. Les rumeurs persistantes concernant une éventuelle candidature du président Bouteflika à sa propre succession ne font qu’ajouter au mépris des Algériens contre un « régime incarné par un Président qui, par sa volonté ou par celle de ses proches, veut prolonger encore son magistère contre vents et marées », estime Madjid Makedhi dans les colonnes d’El Watan.

Alors qu’il est au pouvoir depuis maintenant 14 ans, et que la Constitution l’oblige à laisser sa place, Abdelaziz Bouteflika, sous la pression de son entourage, pourrait en effet être amené à prolonger l’aventure, sous réserve d’une modification de la loi fondamentale.

Les accidents de santé du président et les nombreuses conséquences néfastes sur la vie institutionnelle du pays n’y font rien, Abdelaziz Bouteflika, 77 ans, laisse volontairement planer le flou sur ses ambitions.

Pas d’opposition, surtout si Bouteflika se présente

« L’entretien du suspense autour de la candidature du président de la République à une quatrième mandature est faite dans une seule et unique visée », estime Madjid Makedhi. Il s’agit de « freiner les ardeurs des hommes politiques ambitieux et éliminer toute candidature sérieuse à la joute politique d’avril 2014 ».

En Algérie, l’opposition au pouvoir est plutôt limitée. Elle est « discréditée dans l’opinion », remarque Kader Abderrahim. « Une frange de cette opposition a été récupérée par le régime, comme les islamistes qui se sont associés à l’alliance présidentielle. Quant aux autres partis, ils sont souvent inexistants sur la scène publique et ne trouvent pas d’écho au sein de la population ».

Et même si certains hommes politiques avaient décidé de tenter l’aventure, la stratégie du régime semble avoir porté ses fruits, estime pour sa part Madjid Makedhi. « A moins de trois mois des élections et à la veille de la convocation du corps électoral, seulement quelques candidats sont connus. Et même parmi ces derniers, certains menacent de se retirer dans le cas où l’actuel locataire d’El Mouradia annonce sa participation à la prochaine échéance ». 

« Ils ne sont pas lâches, mais ils se disent conscients qu’on ne peut pas gagner lorsque le jeu est fermé ».

Une conclusion partagée par Kader Abderrahim pour qui « le régime est très habile et sait parfaitement comment manipuler l’opposition dont les revendications ont toujours été étouffées dans l’œuf ».

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