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La charia sera bientôt enseignée au lycée français de Doha

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Une vue aérienne de Doha, capitale qatarie. (Crédit Shutterstock)

A Doha, au Qatar, le lycée français Voltaire accueillera de nouvelles options dans son programme éducatif. En effet, selon un accord signé entre les responsables qataris, la direction de l’établissement et en présence de la ministre déléguée aux Français de l’étranger, Hélène Conway-Mouret, l’enseignement de la charia, la loi islamique, sera désormais au programme, selon une information révélée par Courrier International.

« Une chance pour les jeunes Qataris »

Les nouveautés incluses dans cet accord ne s’arrêtent pas là et selon cet accord la mixité dans les classes du secondaire qui devraient prochainement s’ouvrir, sera désormais bannie. Si l’enseignement des contenus religieux « ne concerneront que les élèves musulmans », a indiqué le porte-parole de la ministre, la non-mixité sera valable pour tous les élèves. Une réforme qui ne manque pas de créer la polémique.

C’est le quotidien Al-Arab qui révèle cette affaire en titrant « Le Lycée Voltaire ouvrira une troisième branche ». Sous ce titre, on aperçoit une photo illustrant la poignée de main échangée entre la ministre française et le président du conseil administratif du lycée, Ali bin Fetais Al-Marri.

« Ce lycée a été créé pour favoriser le pluralisme culturel et la rencontre des civilisations », note le quotidien dans son article. « L’émir s’est demandé pourquoi les citoyens qataris n’y allaient pas, et on lui a répondu que c’était à cause de l’absence d’enseignement de la loi musulmane, de l’arabe et de l’histoire du Qatar », écrit encore le journal.

« Répondre aux demandes de la société locale donne une immense chance aux jeunes Qataris de maîtriser le français et la civilisation de ce grand pays qu’est la France sans renoncer à leur culture. […] Ces jeunes francophones seront un pont entre nos deux pays », conclut enfin le quotidien.

Le Qatar invoque l’amitié avec la France

Ali bin Fetais Al-Marri, qui n’est autre que le procureur général du Qatar, invoque la compréhension et l’amitié franco-qatarie pour justifier de ces aménagements pour le lycée Voltaire, qui accueille un millier d’élèves français.

« Il y a trois questions importantes pour les Qataris et les Arabes qui fréquentent cette école, ce sont l’enseignement de la charia islamique, de la langue arabe et de la séparation entre garçons et filles à partir d’un certain âge », a ainsi expliqué le président du conseil d’administration, selon des propos retranscris dans l’hebdomadaire Marianne. « Nos amis français se sont montrés très compréhensifs car l’essentiel pour nous est d’avoir des Qataris francophones attachés à leur langue et leur religion ».

Le Qatar assure désormais la gestion du lycée français

Une compréhension et une amitié bilatérale qui survient cependant après plusieurs précédents. En effet, Doha, la capitale de la pétromonarchie wahhabite, abrite un deuxième lycée français, le lycée Bonaparte. Ce dernier a fait parler de lui en septembre dernier après que les autorités françaises ont dû exfiltré son directeur, accusé d’avoir une « attitude anti-musulmane », avait révélé le site Mediapart.

A l’origine de cette affaire, une dénonciation de la directrice financière l’école concernant un différend portant sur l’enseignement de l’histoire et des sciences.

Fin 2012, le proviseur du lycée Voltaire, Franck Choinard, avait également été incité à quitter son poste, après avoir été accusé de pédophilie, accusations qu’il a toujours réfutées. Encore plus tôt, c’est la mission laïque qui régissait auparavant le lycée qui fait aujourd’hui la Une des journaux qui avait été accusée de détournement de fonds. La plainte déposée en France à ce sujet a été classée sans suite mais cette accusation avait permis aux Qataris de se débarrasser de cette mission laïque pour prendre le contrôle de la gestion de l’établissement.

Nouvelle polémique en France

Cette dernière nouvelle, assortie de ces nombreux précédents, lance une nouvelle polémique en France.

Sur son blog hébergé par le site Marianne, la journaliste Martine Gozlan, également auteur de « Les rebelles d’Allah. Ils ont défié l’ordre islamiste », condamne l’inclinaison des autorités françaises devant ce qu’elle considère comme les « désidératas wahhabites de leurs majestés Qatariotes ».

« On aurait espéré que Paris défendrait la liberté de penser, marque de fabrique de notre identité universelle », écrit encore la journaliste. « Hélas, là encore, l’infidélité à notre héritage et à notre message s’exhibe avec obscénité ».

Mise à jour Qatar – Lycée Voltaire de Doha – Déclaration du porte-parole du ministère des affaires étrangères (Paris, 28/01/2014)

« Contrairement à une information de presse, l’accord relatif au lycée Voltaire de Doha, qui a été signé aujourd’hui, ne porte ni sur les cours de religion ni sur les questions de mixité.

L’accord établit une relation contractuelle entre le lycée Voltaire et l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE). Le premier s’engage à verser une contribution à l’agence, en échange de laquelle il bénéficiera, pour ses professeurs, de formation continue et de visites d’inspection. L’établissement va pouvoir se rapprocher des normes et des pratiques françaises. En signant l’accord, l’établissement s’engage notamment à respecter la «charte de l’enseignement français à l’étranger», qui se réfère aux principes de laïcité et de neutralité de l’éducation.

L’établissement, qui accueille des enfants de la maternelle à la sixième, est mixte. Toutes ses classes mêlent garçons et filles, conformément à l’esprit et à la pratique de l’éducation française.

S’il existe des cours de religion au lycée Voltaire de Doha, ils sont dispensés en dehors du programme scolaire officiel français, dans le temps périscolaire, comme cela se fait dans de nombreux pays. En outre, seuls les Qatariens sont tenus de suivre ces enseignements, conformément à la loi locale. L’obligation ne s’impose en aucun cas aux autres enfants (non-qatariens), en particulier aux jeunes Français. Cette pratique est donc parfaitement conforme à nos principes de laïcité ».

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