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Que représentent aujourd’hui les Frères musulmans en Égypte?

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Le président Mohamed Morsi ainsi que 35 autres responsables des Frères musulmans seront convoqués par la justice égyptienne le 16 février prochain. Le président islamiste déchu le 3 juillet dernier comparaîtra pour « espionnage » en vue de mener des « actions terroristes », tandis que tous ses proches sont accusés d’avoir « espionné au profit de l’organisation internationale des Frères musulmans, de sa branche militaire et du Hamas » ainsi que « d’actes terroristes dan le pays visant ses biens et ses institutions ».

Une manifestation symbolique de 18 jours

Depuis ce 3 juillet, jour où l’armée égyptienne, au terme de 48 heures d’ultimatum, a défait le président élu un an auparavant, les manifestations n’ont pas cessé et les Frères musulmans ont vivement combattu contre ce qu’ils qualifient d’un putsch contre la démocratie.

Alors que la date de ce procès a été rendue publique, l’Alliance nationale pour la défense de la légitimité, une coalition qui milite pour la réhabilitation de Mohamed Morsi, a appelé à une manifestation de 18 jours. Cette mobilisation tient lieu d’anniversaire à l’occasion des trois ans du soulèvement du 25 janvier contre Hosni Moubarak.

Selon les instructions données par les partisans de Mohamed Morsi, les manifestants sont appelés à investir toutes les places du pays et ce jusqu’au 11 février suivant, jour où l’ancien président égyptien a quitté le pouvoir après avoir passé 30 ans à la tête du pays.

De plus en plus de violences, dénonce Amnesty International

Ces manifestations n’ont bien entendu pas qu’un but commémoratif et selon le communiqué diffusé par l’agence, la mobilisation populaire tend à renverser le « régime militaire » instauré à la suite du renversement de Mohamed Morsi.

D’ores et déjà, ces manifestations s’annoncent d’une rare violence. Dans un rapport publié jeudi 23 juillet, l’ONG Amnesty International a mis en garde contre « l’ampleur sans précédent » des affrontements entre manifestants et forces de l’ordre.

Les autorités « écrasent les dissidents et foulent aux pieds les droits de l’homme », a ainsi indiqué l’ONG qui parlent notamment d’arrestations de masse, de pressions sur la liberté d’expression et de limites au droit de manifester.

Les Frères musulmans ont beaucoup perdu de leur popularité

Les Frères musulmans et leurs soutiens n’en démordent pas et bien qu’une nouvelle constitution ait été votée et validée par référendum, ils poursuivent leur combat pour la réhabilitation de leur président. Mais après plusieurs mois de mobilisation, force est de constater que les Frères musulmans ne sont définitivement plus en position de force en Egypte. Eux qui, à l’hiver 2012, raflaient la majorité des places au Parlement ne semblent plus réunir une majorité d’Egyptiens autour d’eux.

« Les Frères musulmans ont perdu beaucoup de leurs capacités d’action, surtout depuis leur évincement du pouvoir », explique ainsi Barah Mikaïl, directeur de recherche pour le think tank Fride. « Leurs recours sont des plus limités maintenant qu’ils sont hors système », explique-t-il encore.

Pour Clément Steuer, spécialiste des questions politiques en Egypte, le déclin des Frères musulmans s’est aggravé « durant leur année au pouvoir » mais « avait été amorcé au cours des six mois qui avait précédé l’élection de Mohamed Morsi, alors qu’ils dominaient le Parlement ».

« Par ailleurs, la répression qui les frappe très durement depuis juillet dernier – et dont leur requalification en ‘organisation terroriste’ par le gouvernement ne constitue qu’un épisode parmi d’autres – a désorganisé l’appareil, ce qui réduit évidemment ses capacités à mobiliser », explique encore cet expert.

Les Frères musulmans ont-ils un avenir politique ?

Quel pourrait être le jeu politique des Frères musulmans maintenant qu’ils sont « hors circuit » ? Derrière les manifestations, se trame sans doute des projets politiques, même si de nombreux responsables de la confrérie, qui a été déclarée « organisation terroriste », ont été arrêtés par l’armée et ont vu leurs avoirs gelés.

« Il faudra voir si, pour les échéances électorales à venir, ils tenteront la participation à travers des candidats présentés officiellement comme indépendants », estime Barah Mikaïl. « Si c’est le cas, ce ne sera ni plus ni moins qu’un retour à la situation qui prévalait sous Moubarak. Mais avec des chances en moins pour eux de reconquérir la partie de l’électorat qui ne leur fait plus confiance ». 

« Il reste encore de nombreuses inconnues », note quant à lui Clément Steuer Notamment « les dates des élections présidentielles et législatives, le mode de scrutin, et l’éventualité d’une candidature du général Al-Sissi ».

« Probablement espèrent-ils qu’un éventuel éclatement de la coalition au pouvoir leur permette de sortir enfin de leur isolement », conclut enfin cet expert.

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