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Crimée: «La législation russe restreint davantage les droits des citoyens»

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JOL Press : La situation des droits humains est-elle préoccupante en Ukraine ? 
 

Sacha Koulaeva : La situation des droits humains est fortement conditionnée par la crise qui fait rage entre l’Ukraine et la Russie, l’annexion de la Crimée et les menaces externes pour la sécurité du pays. Rappelons également que la situation pré-électorale dans le pays est extrêmement tendue. 

Une centaine de personnes sont mortes pendant les manifestations pro-européennes, cela faisait longtemps que cela n’était pas arrivé dans cette région. Les rapports disponibles montrent que de nombreuses personnes – principalement des journalistes, des activistes, des aides médicales – ont été visées par des snipers et ont trouvé la mort dans des agressions. Aujourd’hui, nous insistons sur la nécessité d’une enquête impartiale et transparente pour poursuivre en justice les auteurs de ces violences, enlèvements, tortures qui ont été réalisés pendant le soulèvement de Maïdan, dont nous avons des descriptions extrêmement détaillées.

JOL Press : Dans ce contexte tendu, craignez-vous que ces questions soient laissées de côté ?
 

Sacha Koulaeva : Effectivement, nous craignons que ces questions passent à la trappe… Tous les évènements qui sont intervenus entre la fin du mois de novembre à fin février ne doivent pas être oubliés dans le cadre de l’annexion de la Crimée.

La justice doit être faite : c’est uniquement cela qui pourra garantir le développement de la société civile ukrainienne. Nous sommes aujourd’hui dans une période extrêmement complexe avec la mise en place d’un nouveau gouvernement. Nous encourageons le nouveau à faire tout le nécessaire pour pouvoir ratifier le statut de Rome de la Cour pénale internationale, qui serait une preuve de la volonté du nouveau gouvernement à mettre fin à l’impunité.

JOL Press : Quelles sont les conséquences de l’annexion de la Crimée par la Russie pour les droits de l’homme dans cette région ?  
 

Sacha Koulaeva : Tant que la Russie considèrera la Crimée comme son propre territoire, elle appliquera la même législation, alors que la situation des libertés individuelles est catastrophique en Russie. Quasiment tous les mois, il y a une nouvelle législation qui restreint davantage les droits des citoyens, des associations, des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes…

L’annexion de la Crimée a engendré encore plus de violations par rapport à la société russe. Quatre sites indépendants ont été fermés par simple décision du procureur, sans procès, les premiers jours du début de l’occupation de Crimée. Les manifestants ont été maltraités, arrêtés et jugés. La propagande a commencé à battre son plein.

En Crimée, de nombreux activistes russes ou ukrainiens qui étaient venus observer le référendum et protester contre les violations des droits de l’homme : ont été enlevés, puis relâchés. Plusieurs missions internationales, y compris le représentant de l’ONU ont été expulsées de force en Crimée, lorsqu’ils sont venus pour observer la situation. Nous sommes dans une période de transition, il est donc difficile d’observer à juste titre ce qui se passe : mais les nombreux cas d’enlèvements, de disparition, de torture, remettent en question le respect des notions de droit de l’homme dans cette région. 

Propos recueillis par Louise Michel D. pour JOL Press

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Sacha Koulaeva est Responsable du bureau Europe de l’Est et Asie centrale à la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH).

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