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Élections européennes: le Parti pirate en quête de plus de démocratie

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En France, le Parti pirate se présente pour la première fois aux élections européennes, il lui sera donc certainement difficile d’obtenir un siège. Mais le mouvement est à considérer davantage à l’échelle européenne. Explications.

JOL Press : Où êtes-vous présents pour ces élections européennes ?

Thomas Watanabe-Vermorel : Le Parti pirate va essayer d’être présent dans les huit circonscriptions électorales. Mais il faut avant tout rappeler que notre parti ne s’est vraiment constitué qu’à l’échelle européenne : notre plate-forme de propositions est commune à tous les partis européens. De nombreux pays en Europe présenteront donc aussi des candidats à l’occasion de ces élections européennes. En France, nous avons des candidats dans la circonscription Sud-Ouest (Languedoc-Roussillon, Midi-Pyrénées et Aquitaine), la circonscription Sud-Est (Rhône-Alpes, Paca et Corse), la circonscription Nord-Ouest (Nord-Pas-de-Calais, la Picardie et les deux Normandie) et en Ile-de-France mais nous essayerons d’être présents partout.

JOL Press : Pourquoi est-ce si important pour vous d’être présents aux européennes ?

Thomas Watanabe-Vermorel : Les élections européennes sont les élections les plus légitimes pour le Parti pirate. Nous avons déjà une représentation au Parlement européen : les Suédois Amelia Andersdotter et Christian Engström. La plupart de nos combats et de nos valeurs trouvent leur meilleure expression à l’échelle européenne. Les problématiques franco-françaises ne correspondent pas, selon nous, à la façon dont on doit imaginer la politique de demain. Les frontières nationales ne sont pas le périmètre dans lequel on arrivera à changer le monde. Dans l’ADN du Parti pirate, il y a la volonté d’être transfrontalier et d’incarner un mouvement global. A ce titre-là, la présence du Parti pirate aux européennes nous apparaît comme une évidence.

JOL Press : Quelles seront les grandes lignes de votre programme ?

Thomas Watanabe-Vermorel : Les trois grands axes que nous défendons, à l’échelle nationale et européenne, sont toujours les mêmes. Premier axe : la défense et la conquête des droits fondamentaux. Nous défendons la vie privée et la privatisation de la correspondance sur Internet et nous sommes tout à fait hostiles à tout ce qui relève de la société de surveillance.

Deuxième axe : la lutte pour la diffusion du savoir, des techniques et de la culture. Cet axe concerne tout le pan des droits d’auteurs et des brevets qui sont faits de telle façon qu’ils sont plus dans une logique de capitalisme que de bien commun. Cette organisation-là ne permet pas le développement de nouvelles entreprises et fragilise les petites structures par rapport aux grosses. Nous considérons, au Parti pirate, que, pour l’essentiel, la connaissance doit appartenir au patrimoine humain. Certes, il faut trouver des solutions pour rétribuer la recherche et la et mettre en place un système de droits d’auteurs qui soit efficace mais nous ne pouvons pas accepter le mode de fonctionnement qui existe aujourd’hui.

Troisième axe : le renouveau démocratique. En Europe, nous voyons bien que c’est la grande faille. L’essentiel des pouvoirs est détenu par la Commission qui n’est pas élue démocratiquement et le fossé se creuse entre le citoyen européen et les institutions parce que l’Europe politique ne s’est pas faite. Nous sommes fondamentalement pro-européens mais il faut absolument que l’Europe soit un lieu d’expression citoyenne et politique.

JOL Press : Sur quoi allez-vous baser votre campagne ?

Thomas Watanabe-Vermorel : En parallèle du TTIP/TAFTA (Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement, envisagé pour 2015 entre UE et USA), l’Union Européenne mène des négociations secrètes avec le Canada en vue de l’adoption du traité de libre-échange CETA, un traité plus large dans le style d’ACTA (traité international multilatéral sur le renforcement des droits de propriété intellectuelle, rejeté par le Parlement européen en juillet 2012). Ces négociations sont pour nous la preuve des dérives démocratiques de l’UE. Ces traités de libre échange sont actuellement négociés hors de l’espace public, dans le secret. Et c’est assumé : sur le site de Commission européenne, on peut lire que la teneur des négociations ne sera pas rendue publique. Au Parti pirate, nous considérons qu’il nous suffira de mettre en lumière ces négociations pour les détruire tant leur teneur est inacceptable.

Selon ce traité, un investissement devrait pouvoir faire le même chiffre d’affaire dans les différents pays signataires. Concrètement, si une entreprise considère que les règles spécifiques à un Etat l’empêche de faire du bénéfice, elle pourra attaquer l’Etat en question et obtenir des compensations financières. On ne veut pas de gaz de schiste sur notre sol ? Shell pourra nous attaquer pour demander une compensation financière. Ce n’est pas abstrait, un tel accord a déjà été mis en place entre les Etats-Unis et le Canada. Tout ceci est négocié par des gens qui ne sont pas élus et dans un mandat sur lequel le public n’a aucun regard. Ce traité, s’il est adopté en 2015, sera, comme tous les traités, supérieur au droit national.

JOL Press : Quels sont aujourd’hui vos liens avec les différents Partis pirates européens ?

Thomas Watanabe-Vermorel : Le 23 mars dernier, nous avons fondé le Parti pirate européen qui regroupe beaucoup les partis d’une Europe beaucoup plus élargie que la communauté européenne. Ensemble, nous avons rédigé un même programme pour ces élections européennes. Nous formons un seul et même parti avec différentes cultures et différents moyens d’action.  

Propos recueillis par Marine Tertrais pour JOL Press

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