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À Budapest: Máté Hajba décrypte la montée du Jobbik en Hongrie

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Máté Hajba m’attend au premier étage d’un « book shop » au centre de Budapest. Le jeune homme de 25 ans est étudiant en droit à Budapest. Parallèlement à ses études, il écrit des articles sur la percée de l’extrême droite en Hongrie, pour des grands journaux comme Forbes : il vient d’ailleurs de terminer un papier sur cet ancien skinhead, élu vice-président du Parlement hongrois, soutenu par les élus de son parti, le Jobbik, mais aussi par la plupart des membres du parti conservateur Fidesz du Premier ministre Viktor Orban, accusé d’être proche de l’extrême droite.

Jobbik: parti antisémite, anti-Rom et opposé au projet européen

« La montée des partis d’extrême droite est un phénomène européen: ces partis sont de plus en plus populaires, notamment le parti Jobbik en Hongrie » explique Maté. Le Mouvement pour une meilleure Hongrie (Jobbik) a débuté en tant que groupe paramilitaire « la Garde hongroise » en se déplaçant dans les campagnes, avant de devenir un parti politique en 2003. Parti antisémite, anti-Rom et opposé au projet européen, le Jobbik a renforcé son ancrage politique lors des élections législatives du 6 avril dernier et se considère aujourd’hui comme le parti d’extrême droite le plus puissant d’Europe.

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« Le Jobbik a changé son slogan »

Le parti néo-nazi a pris soin de banaliser son image avant les élections législatives, et le scrutin européen de la fin du mois de mai : « Jobbik essaie de se donner une image respectable pour grignoter des voix au centre, et il y arrive… » constate Máté. Les membres du parti ont troqué leurs anciennes affiches agressives de skinheads pour des campagnes publicitaires présentant « la famille parfaite » et un slogan fort : « la sécurité avant tout ».

Stratégie de communication

Extrêmement bien organisé, Jobbik est l’un des seuls partis politiques hongrois à se déplacer sur le terrain pour rencontrer ses électeurs : « Ils se sont rendus dans les petits villages de la région Est de Hongrie, la plus pauvre du pays, pour rencontrer de potentiels électeurs » raconte encore l’étudiant. Boycotté par les mass médias hongrois, le Jobbik a donc misé sur sa communication, en faisant rentrer dans ses rangs des experts marketing et en devenant très actif sur les réseaux sociaux : « c’est le premier parti qui a réalisé à quel point Facebook ou Twitter pouvaient être des plateformes utiles pour transmettre un message ».

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Les jeunes : priorité du Jobbik

Concernant les électeurs, Jobbik se vante d’être le parti le plus populaire chez les jeunes : « La jeunesse hongroise est en effet attirée par le vent nouveau que renvoie l’image de ce parti relativement récent sur la scène politique » analyse Maté.

Dans un contexte de crise économique, les jeunes, déçus de voir que les politiques au pouvoir ne font pas d’eux une priorité, ne voient plus l’intérêt d’aller voter : « Les jeunes ne se sentent plus concernés » explique le garçon qui fait partie d’une association « Polgari Platform » qui se mobilise pour pousser les gens à aller voter. « La majorité des jeunes Hongrois n’a plus aucun d’espoir…Beaucoup font le choix de quitter la Hongrie dans le but d’avoir un meilleur futur ».

Première destination de la jeunesse hongroise : Londres, qui compterait aujourd’hui 200 000 expatriés : « On dit que Londres est devenue la deuxième ville de Hongrie aujourd’hui, tellement de jeunes partent pour s’y installer ! » déclare-t-il. Le leader du parti d’extrême droite, Gabor Vona, s’est d’ailleurs rendu dans la capitale britannique au mois de janvier dernier pour donner un meeting.

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Ceux qui restent

Parmi les jeunes qui restent, certains veulent trouver une alternative politique : celle qu’essaie d’incarner aujourd’hui le parti Jobbik. « Tous les partis hongrois essaient de viser les jeunes sans succès, à l’inverse du parti Jobbik, qui compte de nombreuses jeunes figures dans ses rangs et qui ne cesse de répéter que la Hongrie doit être un endroit meilleur pour les jeunes, en promettant une baisse du chômage et une meilleure éducation » poursuit Maté.

En sortant du café, dans la rue Andrassy, les panneaux électoraux attirent nos regards. Nous nous arrêtons pour les analyser. Bien que le jeune homme émette quelques reproches à l’encontre de l’Union européenne dans sa forme actuelle – « trop centralisée, manque de transparence et de démocratie » -,  il déclare se sentir aujourd’hui davantage européen qu’hongrois.

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