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Élections en Belgique: vers un nouveau scénario de crise?

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L’actuel Premier ministre belge, Elio Di Rupo (PS) (Photo: U.S. Department of State)

 
JOL Press : Pourquoi les Belges se rendent-ils aux urnes ce dimanche ?
 

Pascal Delwit : Il s’agit d’un triple scrutin. Les Belges voteront pour élire leurs 21 eurodéputés. Ils désigneront aussi les 150 députés qui composent la Chambre des représentants dans le cadre des élections législatives et les députés des parlements régionaux (Wallonie, Flandre et la Région de Bruxelles-Capitale). Indirectement, les électeurs choisiront également leurs députés communautaires (pour les communautés française et flamande). Les députés de la Communauté germanophone sont élus directement.

Voilà pourquoi ce scrutin est appelé «la mère de toutes les élections». Il est très rare que l’on vote en même temps pour le niveau européen, pour le niveau fédéral et pour les entités fédérées. 

JOL Press : Quels sont les enjeux de ces élections ?
 

Pascal Delwit : La première catégorie d’enjeux concerne bien évidemment les politiques publiques. Au niveau fédéral, la question principale est de savoir comment parvenir à un assainissement des finances publiques (par une diminution drastique des dépenses, une réforme de la fiscalité ou encore une politique de relance).

Le deuxième enjeu – qui focalise plus l’attention des politiques et des médias – concerne le destin de l’Etat fédéral. Sur ce point, les observateurs seront très attentifs aux résultats de la N-VA, le parti nationaliste flamand. N’oublions pas qu’après les élections de 2010, il a fallu 541 jours pour former un gouvernement fédéral. Sera-t-on capable, au terme de ce scrutin, de mettre en place assez rapidement une coalition ? C’est la grande interrogation. 

JOL Press : Faut-il s’attendre à une poussée des indépendantistes ? 
 

Pascal Delwit : En Flandre, la N-VA tourne autour de 30%, c’est-à-dire sur 58% de la population belge. Selon un récent sondage, son score sera moins élevé à l’échelle nationale. Surtout, 20% des électeurs sont encore indécis parmi les néerlandophones et les francophones.

Reste à savoir si l’électorat néerlandophone sanctionnera ou non le gouvernement en place, en particulier les trois partis néerlandophones qui en sont membres (les démocrates-chrétiens, les libéraux et les socialistes). Du côté des francophones, toute la question est de savoir si le Parti socialiste du Premier ministre Elio Di Rupo arrivera à se maintenir. Les sondages lui prédisent des scores nettement inférieurs à ceux réalisés en 2010. 

JOL Press : A quels résultats s’attend-on ? 
 

Pascal Delwit : En Belgique, du fait de l’existence de partis néerlandophones et francophones, on résonne davantage en termes de familles politiques qu’en termes de partis (exception faite de la N-VA). A priori, les socialistes ont plus de chances d’arriver en tête, devant les libéraux. Mais rien n’est certain, chaque siège comptera. Dans la grande majorité des cas, le Premier ministre est désigné parmi la famille politique arrivée première. 

JOL Press : Les Belges craignent-ils une nouvelle crise politique comme ce fut le cas entre juin 2010 et décembre 2011 ? 
 

Pascal Delwit : Oui. Au demeurant, il s’agit d’une crainte fondée. En 2007 et 2010, la formation d’un gouvernement de coalition a été très compliquée. Le risque d’une paralysie du pouvoir exécutif, ou du moins la mise en place difficile d’un gouvernement, n’est pas à exclure. 

Toutefois, deux éléments laissent à penser que la situation à venir sera moins dramatique qu’en 2010. D’abord, à l’exception de la N-VA, tous les partis néerlandophones considèrent qu’une réforme de l’Etat n’est plus une condition sine qua non pour participer au gouvernement.

En 2010, la Belgique a pu se permettre cette crise car les indicateurs socio-économiques n’étaient pas mauvais. Aujourd’hui, le pays emprunte sur les marchés financiers à des taux très bas. Dans l’hypothèse d’une crise politique, ces taux augmenteraient, avec des conséquences importantes sur le niveau de la dette. Il y aura donc une pression forte pour ne pas faire durer les choses.

Propos recueillis par Marie Slavicek pour JOL Press

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