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La Russie coupe le gaz à l’Ukraine: pas d’effet immédiat sur l’Europe

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Une part importante du gaz importé de Russie en Europe transite par l’Ukraine (Photo: Shutterstock.com)
 
JOL Press : Quelles sont les conséquences de cette coupure ?
 

Jean-Pierre Favennec : Pour l’Ukraine, qui importe 60% de son gaz de Russie, cette décision est grave. L’Union européenne importe près de 30% de sa consommation de gaz depuis la Russie. Jusqu’à une époque récente, 80% de ce gaz transitait par le territoire ukrainien. Une partie du gaz consommé par l’Europe transite encore par ce pays.

Le ministre ukrainien de l’Energie a assuré que son pays ne perturberait pas les transferts vers l’UE. Cependant Kiev pourrait, si les conditions l’exigeaient, prélever du gaz sur les volumes en transit, comme ce fut le cas pendant les précédents conflits gaziers, en 2006 et 2009. 

JOL Press : L’Europe risque-t-elle une pénurie de gaz ? 
 

Jean-Pierre Favennec : La décision russe n’aura pas d’effet immédiat, mais «nous aurons un problème en cas d’hiver rigoureux» en Europe, a averti Günther Oettinger, le commissaire européen à l’Energie. Cela étant, les situations sont très différentes d’un pays à l’autre. Les pays baltes, l’Allemagne, la Pologne ou encore la République tchèque dépendent beaucoup du gaz russe, contrairement à l’Espagne ou la France par exemple.

JOL Press : Cette mesure intervient dans un contexte diplomatique tendu entre les deux pays… 
 

Jean-Pierre Favennec : Je crois qu’il faut être prudent par rapport aux interprétations politiques que chacun donne de cette décision. Quels sont les faits ? La dette gazière de l’Ukraine a atteint des sommets – 4,5 milliards d’euros. Le président russe, Vladimir Poutine, a d’ailleurs adressé plusieurs lettres aux dirigeants européens pour les alerter de ce problème. En vain.

L’atmosphère est effectivement très tendue entre Kiev et Moscou. L’Ukraine accuse la Russie d’avoir augmenté ses prix après l’arrivée au pouvoir de pro-occidentaux en février (les 1 000 mètres cubes de gaz étaient alors passés de 268 dollars à 485 dollars, ndlr). Toujours est-il que les impayés de Kiev sont nettement supérieurs aux surfacturations imposées par Moscou.

JOL Press : Comment la situation pourrait-elle évoluer ? 
 

Jean-Pierre Favennec : Lorsque 80% du gaz russe à destination de l’UE transitait par l’Ukraine, Kiev disposait d’un argument de poids. Le rapport de force n’est plus le même : Moscou domine le jeu, notamment grâce au Nord Stream, le gazoduc reliant la Russie à l’Allemagne via la mer Baltique. La part du gaz transitant par l’Ukraine a donc fortement décru.

Il va falloir trouver un accord, même temporaire. Le groupe ukrainien Naftogaz veut demander aux Européens de leur céder une partie du gaz russe qu’ils importent. Mais il faudra bien que l’Ukraine règle sa dette envers la Russie.

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