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Que perdrait la France à rompre ses relations économiques avec la Russie?

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François Hollande soupera avec le président russe jeudi 5 juin (Photo: Shutterstock.com)

JOL Press : Aujourd’hui, comment qualifier les relations qu’entretiennent la France et la Russie ?
 

Alexandre Melnik : A l’heure actuelle, je dirais que cette relation est en stand-by. Il y a une sorte d’attentisme de part et d’autre. Il s’agit d’une relation peu dynamique, politiquement et économiquement plutôt creuse. En tout cas en deçà du potentiel qui existe entre ces pays.

On observe de l’incompréhension et de la frustration des deux côtés. Des liens historiques assez forts unissent la France et la Russie. Mais cette attirance mutuelle n’arrive pas à s’exprimer à cause des tensions géopolitiques actuelles. 

JOL Press : Que perdrait Paris à rompre ses relations économiques avec Moscou ?
 

Alexandre Melnik : La Russie est un partenaire commercial modeste de la France (nos exportations ont atteint 7,7 milliards d’euros en 2013, soit 1,77% des exportations françaises, ndlr). Nos importations de pétrole et de gaz russes sont élevées. Toutefois, Paris n’est pas vraiment dépendante de Moscou dans le domaine énergétique, contrairement à l’Allemagne.

Par ailleurs, de grands champions français sont implantés en Russie, dans le secteur automobile (Renault, PSA), du BTP (Bouygues, Vinci) ou de l’électronique (Alcatel-Lucent). Ces activités seraient probablement assez affectées en cas de rupture des relations économiques avec Moscou.

JOL Press : Qu’en est-il sur le plan financier ? 
 

Alexandre Melnik : Ce secteur serait aussi touché, les banques françaises étant très exposées en Russie (les créances des banques françaises sur les débiteurs russes s’élèvent à 36,5 milliards d’euros, ndlr). Les conséquences seraient à sens unique : les institutions financières russes ne sont pas présentes en France, à part quelques exceptions datant de l’époque soviétique. 

JOL Press : Sur le plan géopolitique, quelles sont les conséquences de ces relations économiques ? 
 

Alexandre Melnik : Du fait de son indépendance énergétique, la France pourrait se permettre des marges de manœuvre plus importantes par rapport à Moscou. L’Allemagne, qui importe 40% de son gaz de Russie, ne peut pas jouer cette carte. Les pays Baltes et d’Europe centrale, également très dépendants du gaz russe, n’hésitent pas à condamner la politique impérialiste de Vladimir Poutine, alors que la France a une position beaucoup plus ambigüe.

Je n’adhère absolument pas à l’idée du «business as usual». Il faut bien comprendre que le développement des relations économiques est l’otage des problématiques géopolitiques. Ces dernières se répercutent nécessairement sur le marché.

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