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Israël-Palestine: les réseaux sociaux incitent-ils à la haine et à la violence?

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Quel rôle jouent les réseaux sociaux dans l’escalade des tensions entre le mouvement islamiste palestinien Hamas et Israël ? – Photo DR Shutterstock

JOL Press : Les réseaux sociaux participent-ils à l’exacerbation de la haine dans le conflit israélo-palestinien ?  
 

Pascal Boniface : Les réseaux sociaux sont le reflet de la société : ils peuvent aussi bien participer à l’exacerbation de la haine qu’à l’apaisement des esprits, en fonction de l’état d’esprit des citoyens, de la société civile et d’une nation. Les réseaux sociaux, en tant que tels, ne sont pas un instrument positif ou négatif : ils permettent aux gens de s’exprimer. Le problème, c’est qu’en période d’affrontements, ce sont plutôt des messages négatifs et de haine qui sont diffusés.

Mais s’il n’y avait pas les réseaux sociaux, cette haine s’exprimerait autrement. Ils peuvent donner une alternative à la parole étatique. Il est évident aujourd’hui que les deux sociétés, palestinienne et israélienne, sont dans une surenchère de colère et de haine : les réseaux sociaux en sont le reflet et non la cause.

JOL Press : La violence est-elle banalisée sur ces plateformes interactives ?
 

Pascal Boniface : L’anonymat permet effectivement de développer le caractère rapide de l’expression. Ce caractère spontané vient développer l’exaltation par rapport à une expression plus mesurée. L’anonymat est le principal problème des réseaux sociaux parce qu’il permet aux plus lâches d’exprimer des sentiments de haine qu’ils n’exprimeraient peut-être pas publiquement. Hélas, il n’y a pas besoin de se cacher derrière l’anonymat pour envoyer des messages de haine dans la région, ni bien sûr pour les penser…

JOL Press : Des soldats israéliens ont lancé des messages sur Facebook appelant à attaquer la Palestine, après la mort de trois jeunes israéliens. Comment réagit l’armée israélienne ?
 

Pascal Boniface : Il y a une certaine mansuétude de l’armée israélienne par rapport aux multiples bavures ou exactions des soldats : l’occupation a créé un sentiment de domination. Des vidéos attestent bien cette idée. Des soldats pensent avoir une sorte d’impunité qui leur permet non seulement de véhiculer des messages de haine mais parfois de passer à des pratiques scandaleuses. Une fois encore, Internet et les réseaux sociaux ne sont pas dans cette affaire le problème mais le reflet du problème.

JOL Press : Dans ce conflit, les réseaux sociaux sont-ils des sources d’informations alternatives aux médias standards ?
 

Pascal Boniface : Beaucoup de gens se sentent directement concernés et ont envie de s’exprimer sur le conflit israélo-palestinien. Sur les réseaux sociaux, les internautes se confrontent pour parler des thématiques qui les concernent de près. Comme le conflit israélo-palestinien est la préoccupation majeure pour beaucoup de personnes, à différents échelons et différentes familles de pensées, les gens n’attendent pas uniquement de recevoir des informations de façon verticale de la part des médias mais participent eux-mêmes au débat, à l’information d’un certain côté, où à la fabrication de l’opinion.

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Pascal Boniface est Directeur de l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS) et enseignant à l’Institut d’Etudes européennes de l’Université de Paris 8. Il dirige La revue internationale et stratégique et L’Année stratégique. Il est également l’auteur de l’ouvrage « La France malade du conflit israelo-palestinien » (Editions Salvator)

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