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Israël prépare sa riposte contre le Hamas après la mort de trois jeunes

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Le Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou a menacé le Hamas de lourdes représailles (Photo: Shutterstock.com)
JOL Press : La tension monte entre Israël et le Hamas. La situation peut-elle dégénérer ? 
 

Frédéric Encel : Oui, la situation peut dégénérer. La découverte des corps de ces trois jeunes Israéliens constitue un traumatisme national. La grande majorité de l’opinion publique, de droite comme de gauche, soutient les actions de représailles du gouvernement nationaliste de Nétanyahou. L’évolution de la situation dépendra du degré et de la nature des représailles.

Je pense qu’Israël va viser, par des attaques ciblées dans la bande de Gaza, des têtes militaires, voire politiques, du Hamas. Je ne crois pas à une offensive terrestre comme ce fut le cas en 2008/2009. Pour le moment, les gouvernements occidentaux sont derrière I’Etat hébreu. En lançant une opération militaire massive, Israël perdrait cet avantage politique. 

JOL Press : Les tensions actuelles pourraient-elles aboutir à une troisième Intifada ? 
 

Frédéric Encel : Ce n’est pas à exclure. Cela étant, les deux premières Intifada ont été lancées dans des contextes de forte dégradation sociale, s’ajoutant à des revendications politiques.

Or, ces dernières années, on a observé une véritable progression du pouvoir d’achat en Cisjordanie (principal territoire de l’Autorité palestinienne). Cette hausse s’explique notamment par une aide de plus de 7 milliards de dollars de la communauté internationale aux Palestiniens. Le risque de voir l’exaspération politique se doubler d’une exaspération sociale est donc limité. C’est pourquoi je ne crois pas, à court terme, à l’hypothèse d’une troisième Intifada.

JOL Press : Les succès des jihadistes en Irak pourraient-ils encourager le Hamas à mener des actions violentes ? 
 

Frédéric Encel : Non, car il s’agit de deux courants islamistes très différents. Leurs stratégies et leurs objectifs ne sont pas les mêmes. Le Hamas, la branche palestinienne des Frères musulmans, veut établir un Etat palestinien. A l’inverse, l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL), même s’il tend à se territorialiser, est dans une logique jihadiste et donc sans frontières.

JOL Press : La mort des trois adolescents israéliens menace-t-elle la réconciliation récente entre le Fatah, principal parti de l’Autorité palestinienne, et le Hamas ? 
 

Frédéric Encel : Oui. En scellant leur réconciliation, le 2 juin dernier, le Fatah et le Hamas se sont engagés à former un gouvernement d’union nationale respectant le principe de non-violence. L’assassinat des trois jeunes fragilise évidemment cet accord et met le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, dans une position délicate.

Benyamin Nétanyahou a d’ailleurs appelé Mahmoud Abbas à rompre son alliance avec le Hamas, désigné comme responsable de ce triple meurtre. 

JOL Press : L’assassinat des trois jeunes peut-il servir la politique de colonisation de Nétanyahou ? 
 

Frédéric Encel : Fondamentalement, cela ne changera pas grand-chose. Les dernières élections ont montré qu’un Israélien sur deux soutient l’implantation de colonies dans les territoires occupés. Ce triple meurtre pourrait susciter une vague de sympathie pour les colons. Mais quoi qu’il arrive, le gouvernement nationaliste poursuivra sa politique d’implantation.

Propos recueillis par Marie Slavicek pour JOL Press

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* Frédéric Encel est docteur en géopolitique, professeur à l’ESG Management School et maître de conférences à Sciences Po. Il est l’auteur de plusieurs livres, dont «Atlas géopolitique d’Israël. Aspects d’une démocratie en guerre» (Autrement, 2008, nouvelle éd. revue et augmentée en 2012) et «De quelques idées reçues sur le monde contemporain. Précis de géopolitique à l’usage de tous» (Autrement, 2013).

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