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Un journaliste allemand placé en détention en Turquie

Après treize jours de garde à vue, la justice turque a ordonné le 27 février que le correspondant du quotidien berlinois à Istanbul, Deniz Yücel, soit placé en détention en l’attente de son procès. Le journaliste, qui possède la double nationalité turque et allemande, est poursuivi pour un article polémique où il s’en prenait avec virulence au parti islamo-conservateur d’Ankara. Une telle durée de détention est formellement possible en vertu de l’état d’urgence en vigueur en Turquie.

« Il n’est ni nécessaire, ni juste de priver Deniz Yücel de sa liberté aussi longtemps », s’est indigné Sigmar Gabriel, le ministre allemand des Affaires étrangères, dans un entretien à paraître dans l’édition dominicale du journal Die Welt. Et ce, d’autant que le journaliste s’était rendu de lui-même à la police pour répondre aux enquêteurs. Il n’a donc pas d’intention manifeste de s’enfuir. « Il est temps maintenant pour la justice turque de prendre une décision. (…). Nous continuons à faire tout ce que nous pouvons pour trouver une bonne solution. »

Deniz Yücel s’était attiré les foudres du régime turc en écrivant sur le piratage de la messagerie électronique de Berat Albayrak, ministre de l’Énergie et gendre du président turc Recep Tayyip Erdogan. Les courriels, piratés par des hackeurs, dévoilent les dessous politiques du gouvernement turc, notamment les pressions sur des médias et des stratégies de manipulation de l’opinion sur les réseaux sociaux. Yücel est accusé « d’appartenance à une organisation terroriste, d’utilisation de données et de propagande terroriste ».

Cette procédure est venue jeter un sérieux froid dans les relations déjà endommagés entre Berlin et la Turquie. L’Allemagne a critiqué de nombreuses fois les dérives autoritaires d’Erdogan. En contrepartie, Ankara n’a pas digéré le vote en juin des députés allemands reconnaissant le génocide d’Arméniens perpétré par l’empire Ottoman au début du 20e siècle. LaChancelière allemande, Angela Merkel a qualifié la nouvelle d’ « amère et décevante ».

Depuis le coup d’Etat avorté du 16 juillet 2016 en Turquie, plus d’une centaine de journalistes ont été arrêtés sans être jugés, 170 médias ont été fermés et 775 cartes de presse annulées selon les décomptes d’associations de défense de la liberté de la presse.

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