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Le futur plan de paix américain pour le conflit israélo-palestinien sous le feu des critiques

Que sait-on du « le deal du siècle », le plan de sortie de conflit israélo-palestinien préparé par le gendre et conseiller spécial de Donald Trump, Jared Kushner ? Pas grand-chose. On sait qu’il compte faire fi des paramètres traditionnels de résolution pour ce conflit, comme l’a récemment annoncé le secrétaire d’Etat américain, Mike Pompeo : « Ce qui a été tenté auparavant a échoué », a-t-il expliqué lors d’une audition parlementaire. « Je pense que nous avons des idées qui sont neuves, fraîches et différentes » avait-il alors martelé, annonçant en quelque sorte la couleur : le texte serait sans aucun doute possible disruptif.

La nouvelle n’est toutefois pas une grande surprise, l’administration Trump ayant rompu presque systématiquement avec la tradition diplomatique américaine et le consensus juridique international – elle en a même fait sa marque de fabrique. Le conflit israélo-palestinien n’a d’ailleurs pas fait exception : la reconnaissance unilatérale de Jérusalem comme capitale d’Israël, celle de la souveraineté israélienne sur le plateau du Golan ou encore le rejet de la terminologie de territoires « occupés », autant d’exemples qui montrant le peu d’égards que Washington a pour l’approche diplomatique classique sur ce dossier.

Un nouveau mandat pour Benyamin Netanyahou

On a appris cette semaine que le texte, en préparation depuis près de deux ans, sera rendu public après le ramadan et la formation officielle du nouveau gouvernement israélien. Pour l’heure, l’administration américaine a évoqué le début du mois de juin. S’il était pressenti pour la fin du mois d’avril, Trump aura sans doute voulu laisser la voie libre à son allié, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou, pour former une nouvelle coalition gouvernementale. La tâche ne sera pas évidente au vu des affaires judiciaires dont il fait l’objet, et des sa marge de victoire réduite. Le Likoud est en effet arrivé à égalité (35 députés chacun) avec la formation Bleu Blanc, conduite par l’ancien général, Benny Gantz.

Raisons de ce report, l’annonce américaine pourrait provoquer des tensions et faire diviser au sein la nouvelle majorité que M. Nétanyahou souhaite constituer. Cette dernière s’appuierait, selon toute vraisemblance, sur un partenariat avec l’extrême droite et les partis ultraorthodoxes.

On sait que ce plan de paix américain devrait comporter 4 piliers : la liberté, le respect, la sécurité et les opportunités. On sait aussi qu’il devrait comporter deux parties : un volet économique pour stimuler le développement des territoires palestiniens, susceptible de créer grdes tensions chez les ultranationalistes israéliens, et un volet politique qui aborde les points-clés du processus de paix, tels que le statut de Jérusalem. Et ce justement ce dernier point qui inquiète hors d’Israël, puisque Donald Trump n’a jamais caché son rejet d’une solution à deux États israélien et palestinien. Des craintes réitérées par le Washington Post, qui affirme avoir au accès à des éléments confirmant que Trump ne prévoit pas la création d’un Etat palestinien indépendant.

La timide mobilisation européenne

La position américaine n’est pas partagée par les européens. Réagissant à l’annonce par M. Nétanyahou de sa volonté d’œuvrer à l’annexion « graduelle » des colonies en Cisjordanie – une première – un groupe de 37 anciens ministres des affaires étrangères de plusieurs états membres de l’UE a publié un lettre publique dimanche dernier, afin de « marquer le coup pour rappeler quelques principes de base », notamment la solution à deux Etats. Le texte, repris par Haaretz mais aussi Le Monde, déplore que « malheureusement, l’actuelle administration américaine s’est éloignée des politiques longtemps suivies par les Etats-Unis et a pris ses distances vis-à-vis des normes du droit international ».

Cette missive dénonce une « inquiétante indifférence » face à l’extension des colonies israéliennes, avant d’ajouter qu’il est inconcevable de créer « une entité dépourvue de souveraineté » en Palestine. Hubert Védrine, cosignataire du texte, résume l’initiative américaine à « un plan Afrique du Sud », en référence à l’apartheid qui avait existé dans ce pays. « C’est le moment de s’exprimer car personne ne le fait. Nétanyahou a été extrêmement efficace ces dernières années pour accuser d’antisémitisme toute critique d’Israël. Même si ce sont des propos de campagne, ses récentes déclarations en faveur d’une annexion des colonies auraient provoqué une levée de boucliers il y a dix ou vingt ans ».

Trump ne bénéficierait donc que d’un soutient très relatif en Europe, encore très divisée sur ce dossier. Mais là encore, ça ne l’a jamais arrêté. L’Autorité palestinienne pour sa part, refuse tout contact avec le gouvernement américain et refuse même que Trump vienne à la table des négociations. Pour Mahmoud Abbas, Washington n’est plus un interlocuteur impartial. Il est, en ce sens, largement soutenue par l’opinion publique : d’après un sondage publié en mars par le centre d’études PSR, 79 % de Palestiniens veulent que le plan Trump soit rejeté, avant même d’en connaître le contenu.

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