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Le Plan B d’Abou Dhabi pour exporter son pétrole

Emirats arabes unis, Iran, FoujeyraEmirats arabes unis, Iran, Foujeyra

Les Emirats arabes unis (EAU) ont misé gros sur la petite principauté de Foujeyra pour exporter leur pétrole en cas de tensions dans le Golfe persique. Seul émirat à disposer d’une large ouverture sur la mer d’Oman, il permet de contourner le détroit d’Ormuz, que l’Iran menace constamment de fermer … mais ce plan n’est peut-être pas aussi sûr qu’ils le croyaient. 

Deuxième place mondiale du « bunkering »

Depuis 2012, Foujeyra est relié aux champs pétrolifères d’Abou Dhabi par un oléoduc d’une capacité de 1,8 million de barils par jour, soit les trois quarts de la production émiratie. Depuis lors, les EAU ne sont donc plus dépendant du détroit d’Ormuz pour exporter leur pétrole.

Grâce à ce pipeline terrestre, le port de Foujeyra s’est développé au point de devenir la deuxième place mondiale dans le secteur du soutage (ou « bunkering »), juste derrière Singapour et devant Rotterdam. « On est devenu une mini-ville pétrolière, alors même que l’on ne produit pas la moindre goutte de pétrole », jubile Sharif Al-Awadhi, directeur de la zone franche de Foujeyra.

Sans compter que le développement de Foujeyra est loin d’être terminé, car ADNOC, la compagnie pétrolière d’Abou Dhabi, a prévu d’y creuser trois cavernes de stockage pétrolier, d’une capacité totale de 42 millions de tonnes, capables de résister à d’éventuels bombardements. 

Stabilité avant tout

« Les Emirats ne veulent pas dire haut et fort que Foujeyra est en danger, explique Robin Mills, un expert pétrolier qui réside à Abou Dhabi, suite à l’attaque contre quatre tankers au large de Foujeyra, dimanche 12 mai. A supposer que l’Iran soit derrière les déboires rencontrés par les quatre navires, ils répugnent à lui donner un succès de propagande. »

Ce flegme est d’autant plus étonnant de la part des EAU, dont la diplomatie agressive est constamment vent debout contre Téhéran. « C’est de la façade, pour montrer aux investisseurs que tout est sous contrôle, assure Laurent Lambert, géographe spécialiste des questions énergétiques dans le Golfe basé au Qatar. Dans la réalité, les Emiratis sont très contrariés de constater que leur plan B pour exporter du pétrole n’est pas autant protégé des turbulences régionales qu’ils le pensaient. »

« Le modèle économique des EAU repose en grande partie sur la stabilité, explique un bon connaisseur de la région. Les Emiratis savent qu’ils auraient tout à perdre à un conflit, qu’ils seraient les premiers visés par des représailles iraniennes. Ils comprennent que Trump partira un jour, que le parapluie américain n’est pas éternel, mais que l’Iran sera leur voisin pour l’éternité. Ils sont plus réalistes qu’on ne le pense ».

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