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La situation se dégrade à Zaporijjia

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Alors que les frappes s’intensifient autour de la centrale nucléaire de Zaporijjia, les deux camps se rejettent la faute des bombardements qui frôlent le site. Les Russes, accusés d’abriter leur matériel militaire (artillerie et munitions) dans l’enceinte de la centrale, démentent. Kiev enrage. 

Dangereuse exaspération ukrainienne

« Ils tirent parce qu’ils le peuvent. Sans risque. Les nôtres ne peuvent pas répliquer au risque d’une catastrophe absolue, fulmine Genade Borovic, maire de Marhanets, la commune située en face de la centrale de Zaporijjia. Cette centrale nous fait peur. Bien plus que tous les bombardements du monde. Si un accident devait survenir, ce n’est pas seulement Marhanets ou l’Ukraine qui seraient menacés, mais toute l’Europe ».

Et lorsque les Ukrainiens répliquent tout de même, à proximité de la centrale, la partie russe crie au scandale. Kiev met « le monde au bord d’une catastrophe nucléaire» , accuse en effet Evgueni Balitsky, le chef de l’administration prorusse local.

« Ce sont des provocations, fulmine Andreii, un ancien cadre de la centrale étant devenu officier de l’armée ukrainienne. Les derniers tirs, jeudi, ont été faits par des mortiers. On le voit sur la vidéo. Or nous n’avons pas de mortiers de cette portée par ici. Nous ne sommes de toute façon pas assez fous pour tirer sur une centrale nucléaire ».

Stockage de munitions

« Les militaires russes ont stocké des armes, c’est certain, près de la première turbine, et sans doute même à l’intérieur, poursuit l’officier. Il y a là des blindés, des camions mais aussi d’importantes quantités de munitions que l’on espère correctement sécurisées. Elles ont été mises là, près de l’un des réacteurs mais aussi de deux réservoirs, l’un d’huile et l’autre de 200 m3 d’hydrogène hautement inflammable. Même avec un tir de très haute précision, on ne peut les détruire sans prendre le risque de faire surchauffer le réacteur numéro 1. Ça conduirait directement à un scénario à la Fukushima ».

Et bien que Moscou nie utiliser la centrale comme dépôt de munitions, plusieurs sources extérieures affirment le contraire. Selon le Think-Tank Institute for the Studies of War (ISW), « des mines, des munitions et véhicules sont amassés dans les environs de la centrale ». 

Mais « bien sûr qu’il y a des munitions. Ils s’en servent tous les jours », s’emporte Dmitri Orlov, maire d’Enerhodar, une autre ville voisine de la centrale. « Les Russes ont mis des batteries de Grad en plein centre, parfois à moins de cent mètres des immeubles, et les utilisent pour détruire Nikopol et Marhanets sans crainte. Puis, ils vont chercher les recharges dans la centrale ».

Impuissance de l’ONU

La situation à Zaporijjia ne fait qu’une fois de plus mettre en lumière l’impuissance de l’ONU, dont la solution proposée il y a des mois, de créer une zone démilitarisée autour des six réacteurs, n’a toujours pas été mise en place. « C’est pourtant la seule possible, affirme Dmitri Orlof. Le drame peut survenir n’importe quand. Mais on peut craindre qu’une fois de plus, l’ONU ne soit qu’un organisme impuissant ».

Et pendant ce temps, les deux grandes puissances nucléaires se rejettent la faute, la Russie faisant comme de coutume preuve d’une mauvaise fois sans pareille. « La solution pour ce qui se passe à Zaporijjia est simple. Les États-Unis appellent la Fédération de Russie à retirer immédiatement ses forces du territoire ukrainien », prône Bonnie Jenkins, sous-secrétaire d’État américaine au désarmement. « Nous appelons les États soutenant le régime de Kiev à le forcer à mettre un terme une fois pour toutes aux attaques contre la centrale », lui rétorque l’ambassadeur russe Vassily Nebenzia au Conseil de sécurité de l’ONU.

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