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La contre-offensive ukrainienne est lancée

Lundi 5 septembre, les forces ukrainiennes ont lancé une vaste contre-offensive dans le sud du pays pour reprendre la ville de Kherson. Pour la première fois depuis le début du conflit, les Russes se retrouvent en position de défense. 

Intérêt stratégique

Bien que lancée lundi dernier, la contre-offensive a été préparée de longue date. Le 10 juillet dernier, déjà, le ministre de la Défense ukrainien, Oleksiy Reznikov, annonçait que « plus d’un million d’hommes » se regroupaient pour « reprendre le sud du pays ». Dans le même temps, l’artillerie ukrainienne commençait à pilonner l’arrière-front russe, détruisant réserves de fuel et stocks de munitions du Dniepr à la Crimée.

Pressée par le temps, l’Ukraine a finalement lancé sa contre-offensive pour maintenir le moral de ses troupes, et pour prouver aux occidentaux qu’une victoire était encore possible. Mais Kiev veut surtout empêcher Moscou de s’implanter en territoires occupés, en organisant des référendums d’adhésion à la Russie, comme en Crimée.

Et le lieu de la contre-offensive, Kherson, a été choisi en raison de sa position stratégique. Reprendre la ville permettrait en effet de protéger encore davantage le port d’Odessa en sécurisant Mikolaïv, et de se rapprocher de Mélitopol, devenue une enclave ukrainienne en territoire occupé par les Russes. Mais surtout, prendre Kherson placerait la Crimée à portée de tir de l’artillerie ukrainienne.

Cette contre-offensive consiste en « une intense préparation d’artillerie ukrainienne sur l’ensemble de la tête de pont russe au-delà du Dniepr. Sont plus particulièrement frappés certains points d’appui de la ligne de front, les ponts de Kherson et de Nova Kakhovka, ainsi que les bases d’artillerie de part et d’autre du fleuve. C’est la plus importante concentration de feux de l’artillerie ukrainienne depuis le début de la guerre et elle présente toutes les conditions nécessaires à une offensive importante par la recherche de la neutralisation des défenses ennemies », explique Michel Goya, ancien officier des troupes de marine et historien militaire.

Loi du silence

Pour le moment, peu de renseignements nous parviennent concernant l’offensive. Rien de plus normal, selon les autorités ukrainiennes. « Toute opération militaire demande le silence. Nous devons achever certains objectifs militaires avant de pouvoir les évoquer », explique Natalia Humeniuk, porte-parole de l’armée ukrainienne, pour justifier le brouillard de guerre entourant l’opération.

« Vous n’entendrez rien des vrais responsables. Car c’est la guerre. Et c’est ainsi qu’une guerre se fait », a de son côté déclaré le président ukrainien Volodymyr Zelensky.

Mais pour la partie russe, le silence ukrainien est éloquent. « Les unités ukrainiennes ont subi de lourdes pertes. C’est une nouvelle tentative d’offensive ennemie qui échoue lamentablement », a déclaré le ministère de la Défense russe dans un communiqué. 

Ponts détruits

« Le Dniepr est puissant et ne peut pas être passé ainsi. L’ennemi essaie donc de faire remonter des réserves mais sa logistique est perturbée par notre artillerie. Nous avons soigneusement et ponctuellement pilonné ces ponts: les principales artères de transport à travers le Dniepr sont devenues infranchissables pour les équipements lourds », a seulement accepté de révéler Natalia Humeniuk. Mais détruire les ponts n’est pas suffisant pour bloquer complètement le ravitaillement russe, et cela pourrait en définitive pénaliser l’avancée ukrainienne. 

« Même si les ponts étaient définitivement coupés, les Russes auraient toujours la possibilité de construire des pontons et d’utiliser des barges, ce qu’ils font déjà actuellement, rappelle Michel Goya. Une coupure totale adviendrait si les Ukrainiens arrivaient jusqu’au Dniepr et le franchissaient. Notons néanmoins que la destruction des ponts empêche aussi sur le long terme les forces ukrainiennes, qui n’ont pas les mêmes moyens de génie que les Russes de franchir le fleuve ».

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