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Kherson est encore loin d’être reprise

Malgré l’avancée fulgurante des forces ukrainiennes ces dernières semaines, la bataille pour la ville de Kherson est loin d’être gagnée. Pour l’heure rien n’indique quelle stratégie les troupes russes adopteront, entre repli stratégique ou résistance acharnée.

Regroupement

« Rien que depuis le 1er octobre et rien que dans la région de Kherson, plus de 500km2 de territoire et des dizaines de localités ont été libérées », fanfaronnait jeudi le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Le jour même, les forces de Kiev n’avaient pourtant pas conquis un pouce de terrain. 

« Les forces ukrainiennes se sont regroupées hier et ont assuré leurs gains, explique l’historien Cédric Mas. Elles ont procédé à des rotations d’unités et des prolongements de chaînes logistiques : il faut déminer et restaurer les routes et les ponts, déplacer l’artillerie … ».

Intérêt symbolique et stratégique

Les troupes de Kiev actuellement massées à 25 kilomètres au nord-ouest de Kherson sont sur le point de lancer à la reconquête de la ville. La reprise de celle-ci, unique métropole importante prise par Moscou depuis le début de la guerre, présente un intérêt aussi symbolique que stratégique pour Kiev. 

En effet, au moins 15% des forces russes engagées en Ukraine sont présentes dans cette zone, soit environ 20 000 hommes. Une défaite russe à Kherson représenterait donc un revers de taille pour Vladimir Poutine, et ouvrirait la porte du Dombass aux forces ukrainiennes.

Bataille difficile

Face à l’avancée des Ukrainiens, les Russes « n’ont pas d’autres choix que le recul ou l’encerclement », estime l’analyste stratégique et général français Olivier Kempf. Et un encerclement serait particulièrement difficile à rompre par Moscou, puisque « géographiquement la région de Kherson est la plus éloignée des bases logistiques installées en Russie », comme le rappelle Édouard Jolly, chercheur à l’Irsem en théorie des conflits armés.

Un abandon de la ville par les Russes semble toutefois peu probable, et deux scénarios sont privilégiés : « Une retraite de la manière la plus coordonnée possible au sud de la rive occidentale du Dniepr, de façon à reconstruire une position défensive autour de Kherson, ou un repli à l’intérieur même de la ville, en assumant la probabilité du combat urbain », suggère Édouard Jolly. 

Toutefois, d’après le général Olivier Kempf, « les Russes ne sont pas prêts à reproduire Marioupol, où l’armée de Kiev avait laissé un volume conséquent de force pour fixer les forces russes et consommer leurs troupes ». D’un autre côté, « il ne faut pas oublier que les Ukrainiens sont dans une phase d’exploitation d’un succès tactique, mais qu’une attaque faiblit toujours dans la durée et la distance », rappelle Édouard Jolly.

Enfin, comme Napoléon et Hitler avant eux, les belligérants vont à leur tour être confrontés à l’hiver rigoureux de ces contrées. « La menace météo va ralentir les opérations », assure le général Olivier Kempf. « L’hiver est une période clé, car on s’y bat moins bien et le matériel doit être encore mieux entretenu », abonde le général François Chauvancy. 

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