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Les raisons du double jeu israélien en Ukraine

Depuis le début de la guerre, l’Etat hébreu affiche un apparent alignement avec l’occident tout en ménageant la Russie, un double jeu qui agace Kiev et ses alliés, mais duquel Tel-Aviv ne semble pas pouvoir s’extirper.

L’alliance entre Moscou et Téhéran « n’aurait tout simplement pas existé si vos politiciens avaient pris une décision à l’époque. La décision que nous demandions », dénonçait Volodymyr Zelensky lundi dernier lors d’une conférence organisée par un média israélien. Mais justement, il apparaît que c’est cette alliance russo-iranienne, ou plutôt l’ambivalence de cette relation, qui est à l’origine du double jeu israélien. 

Question syrienne 

« Israël se veut neutre car le pays est englué dans une vaste toile d’araignée où se multiplient les intérêts régionaux », explique le général François Chauvancy, également consultant en géopolitique. Et l’« élément central de cette neutralité affichée » est bien entendu la Syrie, comme le rappelle David Rigoulet-Roze, spécialiste du Moyen-Orient à l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS).

Moscou et Tel-Aviv ont en effet conclu un accord tacite de déconfliction autour de la Syrie. Celui-ci permet notamment à Tsahal (l’armée israélienne) de frapper les milices pro-Iran et les positions du Hezbollah sans déclencher l’intervention de la couverture anti-aérienne russe, et permet aux appareils russes de survoler l’espace israélien pour bombarder des positions proches de la frontière.

Israël a donc besoin de cette entente avec Moscou pour pouvoir frapper l’Iran en Syrie. Il y a « parfois une convergence opportuniste d’intérêts entre Moscou et Tel-Aviv sur la question de la présence iranienne en Syrie, résume David Rigoulet-Roze. Vladimir Poutine ne souhaite effectivement pas que Téhéran prenne trop de place auprès du régime de Bachar al-Assad ».

Si Tel-Aviv se mettait Moscou à dos, en autorisant des livraisons d’armes à l’Ukraine, par exemple, « les Russes pourraient aussi permettre un accroissement de la présence militaire iranienne en Syrie par le remplacement de leurs troupes au sol restantes », pointe François Chauvancy.

Prudence israélienne 

« La position qu’Israël affiche sur l’envoi d’armes à Kiev est ferme, mais elle s’infléchit de plus en plus », analyse David Rigoulet-Roze. Notamment en raison de l’implication grandissante de l’Iran en Ukraine. « Ce que l’on voit actuellement avec les attaques de drones kamikazes, c’est un show technologique de l’Iran, qui entend manifester ses capacités opérationnelles », explique le spécialiste.

Et face à cette montée en puissance, Tel-Aviv ne sait pas vraiment comment réagir. D’un côté l’Etat Hébreu aimerait rendre la pareille à l’Iran, mais de l’autre il ne veut surtout pas que ses technologies tombent entre les mains des Iraniens. « Israël veut coûte que coûte garder ses capacités secrètes, et notamment son Dôme de fer, explique Milan Czerny, chercheur spécialiste de la Russie. Et il ne faut pas oublier que les armes sophistiquées d’Israël sont souvent conçues en partenariat avec les États-Unis. L’Amérique aussi refuse de livrer ce type de système … »

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