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Crise au sein de l’Agence spatiale européenne

Les nombreuses tensions entourant le couple franco-allemand depuis l’arrivée au pouvoir d’Olaf Scholz n’ont pas épargné le secteur aérospatial, les deux pays cherchant à imposer leur domination sur l’Agence spatiale européenne (ESA). 

Projets parallèles

Vouloir s’imposer « serait un non-sens absolu ! Le budget de l’Esa n’est pas une course de vitesse entre nos pays ! », s’exclament d’une même voix les deux patrons des agences nationales Walther Pelzer, directeur général de l’agence spatiale allemande (DLR), et Philippe Baptiste, président du Centre national d’études spatiales (Cnes).

Car même si la contribution de l’Allemagne à l’ESA a dépassé celle de la France en 2019 (3,29 milliards d’euros sur trois ans 2,6 milliards), l’Hexagone mène d’autres projets en parallèle (Défense, accords binationaux avec la Nasa par exemple, …), et doit à chaque instant choisir dans lequel d’entre eux investir. « Pour chaque euro dépensé, nous regardons quel est le meilleur canal », résume Philippe Baptiste.

Importance de l’ESA

Mais ces autres projets ne remettent pas en cause l’importance de l’ESA, dont le budget doit sérieusement être discuté par Paris et Berlin, les deux principaux contributeurs, s’ils veulent que les programmes qu’ils estiment prioritaires aboutissent. 

« Nous accorder sur le budget de l’Esa est un défi car les Etats se mobilisent déjà pour aider leurs citoyens et leurs entreprises fragilisés par les crises multiples que vit l’Europe: guerre en Ukraine, inflation, envolée des prix de l’énergie », explique Walther Pelzer. «Pourtant, si nous voulons une Europe forte, nous devons investir dans le spatial, un marché en forte croissance, au nom de notre sécurité, de notre souveraineté et de notre économie, qui ne pourraient plus fonctionner sans les données et services spatiaux ».

A titre d’exemple, rappelons que les satellites d’observation « sont cruciaux pour surveiller et collecter les données sur notre planète, qui alimentent les modèles mathématiques permettant de prévoir les évolutions du climat », ajoute Philippe Baptiste.

Quelques points de convergences

Le principal élément rassembleur est bien sûr le programme de fusée Ariane 6, mais Paris et Berlin ont d’autres points de convergence. Par exemple, ils comptent sur l’ESA pour augmenter sa gouvernance et ainsi mieux chapeauter le domaine spatial européen. « L’Esa sera partie prenante du processus de sélection des industriels. Elle le sait le faire, comme elle l’a démontré pour les programmes Copernicus (observation de la Terre) et Galileo (GPS européen). Mais elle devra être plus ouverte à la compétition et plus flexible », pointent les patrons des deux agences spatiales.

Les dirigeants s’accordent également sur le fait qu’il faudrait à l’ESA un deuxième site de lancement, en plus de la base spatiale de Kourou, en Guyane. Il existe bien un « projet au nord de l’Europe », mais il « est à mettre au compte d’une entreprise privée allemande et n’est pas soutenu par le gouvernement », assure Walther Pelzer. 

De même, ils s’accordent sur la nécessité de s’allier pour réaliser des vols habités. « Ce serait bien si nous disposions de budgets illimités mais ce n’est pas le cas. Donc, à nos yeux, la coopération est la bonne option dans ce domaine », estime Walther Pelzer. 

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