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Bras de fer entre l’Europe et les pays gaziers

Bien que les pays européens aient trouvé suffisamment de gaz pour passer l’hiver malgré la coupure des approvisionnements russes, ils restent dépendants des autres producteurs, comme les États-Unis, l’Algérie, l’Azerbaïdjan … et le Qatar, impliqué dans le récent scandale du Qatargate.

Exemple qatarien

En réponse aux soupçons d’eurodéputés pesant sur le Qatar, les autorités européennes ont pris des premières sanctions contre les autorités de l’émirat, bannissant ses représentants des institutions bruxelloises et suspendant les négociations pour supprimer toutes les obligations de visas pour les Qatariens dans l’espace européen.

Il s’agit d’« une restriction discriminatoire qui limite le dialogue et la coopération », a protesté un porte-parole qatarien le 18 décembre auprès de l’Union européenne, décidée avant même que « l’enquête judiciaire soit terminée ». Le représentant est d’ailleurs allé jusqu’à proférer des menaces à peine voilées, rappelant que « le Qatar (était) un important fournisseur de gaz naturel liquéfié en Belgique », et que le gouvernement belge était, donc, prié de « rétablir les faits », au risque que ce désaccord n’entraine des « effets négatifs » dans la coopération future avec les pays européens.

Face à de telles pressions, la relation avec le Qatar inquiète côté européen. « Est-il possible d’acheter du gaz qatari, si le Qatar achète des députés européens ? », demandait par exemple un journaliste au ministre allemand de l’Economie, Robert Habeck, le 19 décembre dernier. Oui, selon le ministre.

« La corruption est un crime. Le commerce avec les autres pays doit toujours être évalué au regard des conséquences morales. Dans le même temps, vous devez veiller à la sécurité des approvisionnements. Dans ce cas, c’est une question d’achats gaziers. L’Europe ou l’Allemagne ont intérêt à compenser la perte du gaz russe. Donc je pense qu’il faut distinguer les deux choses », avait-il répondu.

Nécessité de plafonner ?

Lundi 19 décembre, les États membres se sont mis d’accord sur un plafonnement des prix du gaz, pour interrompre les achats européens lorsque les cours dépasseront les 180 euros le MWh trois jours de suite. « Il s’agit de notre sécurité énergétique. Il s’agit d’avoir des prix abordables et d’éviter la désindustrialisation », se félicite le ministre belge de l’Energie, Tinne Van der Straeten. « Nous avons rempli une mission qui semblait impossible », abonde le ministre tchèque de l’Industrie, Jozef Síkela.

Mais pour certains, ce plafonnement n’est rien d’autre qu’une incitation à augmenter les prix. « Cela donne l’impression que l’on peut se permettre de payer 180 euros le MWh. Or on ne le peut pas », estime un diplomate.

« Il y a tant de mesures de sauvegarde qu’il est difficile de pleinement comprendre comment cela va se mettre en œuvre. Le plafonnement du prix du gaz est perçu par plusieurs États membres comme le remède miracle. Mais cela ne va pas résoudre par magie tous nos problèmes. Ce serait une grave erreur de le penser », explique Simone Tagliapietra, spécialiste des questions énergétiques à l’institut Bruegel.

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