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La guerre est déclarée entre Pékin et Ottawa 

Alors que les relations diplomatiques et commerciales entre les deux géants, l’un démographique l’autre géographique, ne cessent de se détériorer, elles pourraient cette fois avoir atteint un point de non-retour.

Causes des tensions

A l’origine de la colère d’Ottawa, de sombres histoires d’espionnage et de corruption orchestrées par Pékin sur le sol canadien. « Il y a de fortes indications que le département du Travail du Front uni du Parti communiste chinois est très actif dans les opérations de capture de membres de l’élite que mènent l’ambassade de Chine à Ottawa et les consulats à travers le Canada », explique Charles Burton, sinologue du Macdonald-Laurier Institute d’Ottawa.

La Chine dispose de nombreux postes de police chinois illégaux au Canada (à Toronto et Vancouver notamment) grâce auxquels elle persécute ses ressortissants qu’elle juge dérangeants. « Des communautés et des groupes ouïgours, tibétains, de Hongkong, du Falun Gong et pro-démocratie, ont été ciblés. Ils ont subi des intimidations, des menaces, ici, au Canada, tout comme les membres de leur famille en Chine, en raison de leur militantisme pour les droits de la personne », détaille Alex Neve, professeur à la faculté de droit de l’université d’Ottawa et de la Dalhousie University.

Ottawa accuse également Pékin de se livrer à un espionnage industriel massif sur son territoire. « Certains secteurs sont plus visés que d’autres: la biopharmaceutique, la santé, l’intelligence artificielle, les technologies quantiques, les technologies marines et l’aérospatiale », précise le directeur des services de renseignement canadiens, David Vigneault.

Alex Neve résume la situation ainsi : «Le statu quo n’est plus suffisant dans la relation Canada-Chine. Il y a eu trop de points irritants et de tensions et aucun moyen efficace d’y répondre ».

Ottawa hausse le ton 

Face à ces ingérences, le Canada montre désormais les crocs, en la personne de Mélanie Joly, la ministre des Affaires étrangères canadienne, qui se montre on ne peut plus claire. « Nous défierons la Chine quand nous le devrons », un régime dont « les intérêts et les valeurs s’éloignent de plus en plus des nôtres », a récemment déclaré la ministre en conférence de presse. 

Un aplomb face à la Chine que peu de pays occidentaux osent, car ils ne disposent pas des mêmes armes qu’Ottawa. En effet, le Canada jouit de vastes ressources naturelles, dont la Chine est dépendante, tout en étant très peu dépendant commercialement de Pékin (près de 72 % des exportations canadiennes se font avec les États-Unis). 

Ainsi, comme l’a rappelé Mélanie Joly fin novembre, le Canada serait prêt à rompre complètement ses relations commerciales avec Pékin, en tournant sa stratégie indo-pacifique vers l’Inde et les pays de l’Asie du Sud-Est. « Le Canada est convenu d’un dialogue stratégique avec les États-Unis sur la politique indo-pacifique. Et Ottawa a demandé son admission au Cadre économique indo-pacifique pour la prospérité dirigé par les États-Unis. Il est probable que ces derniers aient exigé que le Canada fasse preuve de plus de détermination à l’égard de la Chine », explique Charles Burton.

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