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Premier centre d’études occidentales au Moyen Orient

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[image:1,l]Lorsque Fahad A. Alhomoudi étudiait à l’université canadienne McGill en vue d’achever son doctorat d’études islamiques, en 2000, il a fait une découverte qui l’a surpris.

Créer un pont entre le monde arabe et l’Occident

« Il y a, dans presque toutes les universités américaines et européennes, un centre pour les études sur le Moyen Orient ou le monde arabe ou encore le monde islamique » explique le professeur saoudien lors d’une interview dans son bureau, à Riyad. « Mais il n’y avait pas un seul centre d’études sur l’Occident au Moyen Orient. »

C’est lorsqu’il a réalisé cet état de fait que Fahad A. Alhomoudi, enseignant dans la très conservatrice université Al Imam Muhammad bin Saud Islamic de Riyad, a imaginé, pour la première fois, créer un tel centre.

Plus d’une décennie plus tard, son projet s’est réalisé. L’Institut des études occidentales a ouvert ses portes il y a un an. C’est la première organisation non-gouvernementale, en Arabie Saoudite, dédiée à la promotion du dialogue entre l’Occident, particulièrement les Etats-Unis, et le Moyen Orient, en particulier l’Arabie Saoudite.

La très religieuse Arabie Saoudite tente de s’ouvrir au monde

Cela peut sembler banal. Mais ici, en Arabie Saoudite, l’ouverture de cet institut a surpris pour plusieurs raisons. Il est particulièrement difficile pour quiconque, Saoudien ou étranger, d’obtenir la permission du gouvernement de fonder une ONG quel qu’en soit l’objet. En outre, l’Institut est une organisation à but non lucratif, enregistrée aux Etats-Unis.

Surprenant encore car Riyad est le bastion d’une version saoudienne et très conservatrice de l’islam, connue sous le nom de Wahhabisme, qui, durant des siècles, a préconisé aux musulmans de ne pas entrer en contact avec des étrangers ou des personnes pratiquant une autre religion afin de ne pas affaiblir leur foi.

Mais les temps changent, et même ce royaume pétrolier replié sur lui-même évolue.

Les violents attentats contre des villes saoudiennes en 2003, inspirés par Oussama Ben Laden, l’enfant du pays, a convaincu de nombreux Saoudiens de l’importance d’ouvrir les portes de leurs universités et de leurs esprits au reste du monde. Les intellectuels et les gouvernants prennent visiblement conscience que le monde d’aujourd’hui est un village dans lequel une coopération et une compréhension entre les peuples sont vitales, particulièrement lorsqu’il s’agit des relations entre l’Islam et le reste du monde.

Enseigner pour dialoguer

« Nous essayons de sensibiliser la population à l’importance de la compréhension de l’autre, […] et de renforcer l’amitié qui s’est distendue » du fait d’évènements qui « ont suscité de la haine », explique Fahad A. Alhomoudi, président de son Institut. Parmi ces évènements, il inclut notamment les attentats du 11 septembre et l’invasion de l’Irak en 2003.

L’ambition de l’Institut, selon lui, « est de créer des ponts entre l’Arabie Saoudite et le monde arabe avec les Etats-Unis et l’Occident pour trouver des zones d’intérêts mutuels. »

Pour l’instant, l’Institut concentre son travail sur l’enseignement juridique, religieux et commercial, « parce que c’est dans ces domaines que les personnes entrent en conflits », explique Fahad A. Alhomoudi. A ce jour, les premiers projets ont consisté à traduire les textes légaux du français à l’arabe et à organiser quelques programmes d’échanges de professeurs d’université.

Bien que Fahad A. Alhomoudi ait imaginé la création de son institut dès 2000, c’est en 2008, alors qu’il était professeur invité à la Temple University de Philadelphie et titulaire de la bourse Fulbright que son projet a réellement commencé à prendre forme. C’est en abordant l’idée de son centre avec les membres de la faculté que certains ont répondu avec enthousiasme et l’ont soutenu dans ses démarches.

Deux ans plus tard, l’Institut a obtenu son enregistrement en tant qu’institution éducative à but non lucratif avec un conseil d’administration constitué de six membres. Les bureaux de Riyad ont ouvert en janvier 2011.

Une collaboration américano-saoudienne

L’organisation continue, aujourd’hui encore, de collaborer avec l’Université Temple, particulièrement dans le domaine du dialogue inter-religieux. Mais il a également construit un partenariat avec l’université d’études professionnelles George Washington afin de fonder le Centre d’éducation pour le dialogue américano-saoudien (ASAD), qui deviendra une plateforme de collaboration bilatérale dans des domaines tels que la loi, l’économie et le commerce. L’Institut est actuellement en train de développer un programme d’échange avec l’université d’Etat de l’Ohio.

En Arabie Saoudite, le premier partenariat formel de l’Institut s’est développé avec l’université Al Imam Muhammad bin Saud Islamic, considérée pour beaucoup comme la citadelle de la théologie wahhabite ultra-conservatrice.

Ce partenariat, qui doit développer certains programmes d’échanges, n’était pas le premier pas de l’université traditionnelle pour sortir de son isolement. En 2010, elle a accueilli Leonard Swidler, professeur de pensée catholique romaine à l’Université Temple et penseur renommé du dialogue inter-religieux. C’était la première fois qu’un érudit chrétien était invité à échanger son point de vue avec la faculté Al Imam.

Fahad A. Alhomoudi se souvient que certains de ses amis conservateurs, inquiets des motivations derrière le soutien américain à son projet, ont essayé de le convaincre de mettre un terme à ses efforts. C’est un réel exemple, pour lui, de l’incompréhension qui règne entre les deux mondes.

« Nous ne voulons pas occidentaliser l’Arabie Saoudite » dit-il. « Ce n’est pas notre mission. Mais nous savons qu’il y a de bonnes et de mauvaises choses en occident et nous essayons de les comprendre. »

Global Post / Adaptation Sybille de Larocque – JOL Press

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